Ce matin, vous évoquez la complémentarité de Jean-Luc Mélenchon et de François Hollande
Si Hollande et Mélenchon avaient voulu monter en douce, un coup de maître, ils ne s’y seraient pas pris autrement… Il n’en est rien, ne versons pas dans le conspirationnisme… Mais le résultat est là. François Hollande représente la gauche de gouvernement, responsable, (je mets les guillemets qu’il convient) et Jean-Luc Mélenchon occupe l’indispensable fonction tribunicienne. Les deux candidats ratissent suffisamment large pour enrôler l’ensemble du peuple de gauche, plus quelques nouveaux électeurs séduits par la verve de Mélenchon et quelques centristes rassurés par la modération de Hollande. Et les électeurs de Mélenchon comptent se reporter massivement sur Hollande au second tour. Ce n’est pas simplement l’application de la fameuse discipline républicaine, ni l’application de l’adage selon lequel, au premier tour on choisit, et au second on élimine… Il faut arpenter la foule des meetings de Jean-Luc Mélenchon pour comprendre.
Ils se complètent mais ils ne gouverneront pas ensemble !
Oui, pour battre Nicolas Sarkozy ils sont complémentaires, mais pour gouverner ils sont incompatibles. Hollande répète qu’il ne déviera pas de sa ligne et Mélenchon ne veut pas transiger. Et c’est justement parce que Jean-Luc Mélenchon sait qu’il ne sera pas en charge des affaires de la France dans un mois que ses mots, ses propositions ne sont pas soumis à la réalité immédiate. Ils sont d’autant plus attractifs ! Il peut user à loisir du lyrisme classique de gauche sans conséquences. Il a le talent pour ça. L’électeur en a besoin ! L’électeur de gauche sait qu’il finira par voter pour une forme de rigueur, un peu sinistre mais nécessaire. Alors pour supporter cette réalité, il se fait un petit shoot de Louise Michel et de cri du peuple avec Jean-Luc Mélenchon. Mais c’est essentiel à la vie politique d’un pays. La gauche et la droite ont une âme et une histoire. Mélenchon rappelle cette histoire et tire des lignes pour l’avenir. Il ne parle pas que du passé et ne fait pas que réveiller le sans-culotte qui sommeille en chaque électeur de gauche ! Il prend date pour l’avenir et tente de dessiner un autre monde, il parle d’écologie, de croissance différente. Mais pour l’instant il s’agit de sauver le modèle social. François Hollande et sa social-démocratie tempérée rassurent plus. En réalité ces deux gauches, celle qui ne renonce pas à l’utopie et celle qui s’apprête à gouverner en gestionnaire avec des caisses vides… ces deux gauches qui paraissent irréconciliables, sont souvent réunies au sein d’un seul et même électeur. Un électeur de gauche peut vibrer pour Mélenchon et acquiescer à Hollande. L’élection à deux tours permet d’exprimer cette contradiction intime. Cet électeur-là est contradictoire et sincère à la fois… On le trouve en nombre dans les meetings de Jean-Luc Mélenchon. Si Jean-Luc Mélenchon ne comprend pas ce phénomène, son succès finira par lui monter à la tête… mais je pense qu’il en est totalement conscient.
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