Mélenchon, la pente complotiste

Mélenchon, la pente complotiste
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Vous revenez sur cette phrase prononcée hier par Jean-Luc Mélenchon, je cite : « Cazeneuve, le gars qui s’est occupé de l’assassinat de Rémi Fraisse »...

Oui, et au-delà de l’insulte, cette phrase constitue d’abord un immense gâchis parce que le débat de la violence policière a lieu d’être. La mort de Remi Fraisse est le signe d’un dysfonctionnement grave du maintien de l’ordre en France. Le maintien de l’ordre est une affaire très complexe qui nécessite un savoir-faire et du courage politique pour contenir la culture répressive d’une grande partie de la police. S’il est vrai que les forces de l’ordre ont à faire, ces dernières années, à des manifestants eux-mêmes violents, déterminés, organisés, il n’en reste pas moins que Rémi Fraisse, militant écologiste, n’aurait pas dû mourir et que de nombreux blessés graves, par flashball notamment, n’auraient pas dû l’être.

Trop de bavures sont à déplorer

Certains mettent la diatribe mélenchonienne anti-Cazeneuve sur le compte de la tradition fratricide des 2 gauches à propos du maintien de l’ordre. La gauche la plus radicale accuse, de façon virulente, la gauche dite de gouvernement de traîtrise à la cause, de faire tirer sur le peuple. De Clémenceau à Jules Moch … et donc aussi à Bernard Cazeneuve, les ministres de l’Intérieur de gauche, soucieux de ce qu’ils appellent « l’ordre républicain », sont toujours voués aux gémonies, parfois non sans raison, par les gauches plus dures. C’est vieux comme la République. Mais ce qui est nouveau, c’est le complotisme.

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Le complotisme ?

Oui, « Cazeneuve s’est occupé de l’assassinat de Rémi Fraisse » dit Mélenchon… « Assassinat » c’est à dire intention de tuer, préparé, comme s’il voulait insinuer l’idée d’un coup monté. Le complotisme, l’insinuation, le « j’dis-ça-j’dis-rien » à tout propos, sur tous les sujets qu’il aborde, est désormais la nouvelle manie dialectique de l’Insoumis en chef. Ainsi répète-t-il en ce moment que ce sont 9 milliardaires de la presse qui ont fait la présidentielle, qu’il qualifie sur son blog de « farce» électorale « écrite de longue main ». Et puis, tiens !... comme par hasard, des centaines de milliers d’électeurs ont été radiés des listes alors que lui-même n’a que 600.000 voix de moins que Marine Le Pen et qu’à 7 électeurs près par bureau de vote (fétichisme des chiffres), il aurait rattrapé la candidate d’extrême-droite.

Il oublie au passage qu’entre elle et lui, il y a le vrai 3ème, François Fillon ! Jean-Luc Mélenchon a pourtant eu ce grand mérite, lors la présidentielle, de faire venir à la politique de nombreux jeunes. Ça devrait lui conférer une grande responsabilité. Il a, de plus, avec Benoit Hamon, introduit l’écologie au cœur du discours et du programme de la gauche. La radicalité de ses propositions a sa place dans le débat public, face à la persistance d’inégalités criantes et des puissances de l’argent. Mais cette radicalité a besoin de vérité et non pas de ces théories fumeuses qui généralisent le soupçon et le cynisme. Il est étonnant -et assez triste- de voir Jean-Luc Mélenchon, malgré sa culture politique, s’adonner, à ce point, au complotisme en vogue, ce poison qui abîme et pervertit le débat démocratique partout dans le monde.

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