

Avec le reconfinement, c'est aussi le grand retour de l'Etat central...
Pour ceux qui auraient manqué l'épisode précédent... Nous sommes le 15 juillet à l'Assemblée : Jean Castex, fraîchement nommé Premier ministre, prononce 25 fois le mot "territoires" dans son discours de politique générale... 25 fois ! Avec cet accent gascon qui vient symboliquement souligner le virage amorcé par Emmanuel Macron. On tourne une page techno, centralisée, pour régénérer le quinquennat via les élus locaux, la "France d'en bas ou du bon sens" théorisée par Raffarin, revisitée par Castex. Le virus circule encore, mais à l'époque, "on vit avec", et désormais c'est au couple maire / préfet d'adapter la réponse au plus près du terrain.
La fameuse "gestion territoriale et graduée", avec ses 50 nuances de rouge... qui a donc vécu hier soir. Tout ça c'est fini ! Le coronavirus est partout. De conseil scientifique en conseil de défense, de conseil de défense en conseil des ministres, Emmanuel Macron reprend, seul, les habits de "père" de la nation : il sera "là" pour "protéger" et le reconfinement est bien national. Ni local, ni partiel, juste adaptable en outre-mer.
La parenthèse girondine aura été courte. Et sans instruire de faux procès (puisque bien malin celui qui aurait pu prédire un tel tsunami), on se demande pourquoi Edouard Philippe a été remercié. Jean Castex, l'élu de Prades, l'homme du déconfinement et des territoires, est désormais en charge de la mission inverse : faire accepter une nécessaire privation de libertés, partout en même temps et pour tout le monde...
Recentraliser, est-ce que c'est forcément négatif ?
Dans la crise, au contraire, c'est un plus ! Verticalité du pilotage, égalité de traitement, l'attestation, le rayon d'un kilomètre. En septembre, Marseille n'avait pas supporté l'immixtion d'Olivier Veran dans sa gestion locale. Chiffres contestés, quasi appel à la désobéissance civile... Le confinement national, c'est la chienlit, mais au moins c'est la même chienlit de la Canebière aux Champs-Elysées.
Et puis ailleurs en Europe, le modèle fédéral n'a pas fait ses preuves. La Suisse est tiraillée. Ce sont les cantons qui décident. A Genève, rassemblements interdits à plus de 5, quand à Zurich c'est sans limite. En Espagne, que de temps perdu en querelles et jeux politiciens entre Madrid et ses régions. Fin août, il a fallu déployer 2000 militaires pour aider à tracer les cas. Enfin, en Allemagne, la gestion de crise s'harmonise, mais il y a deux semaines, c'était le "corona-chaos", certains Länder peu touchés fermant leurs portes aux compatriotes venus de zone rouge.
Girondin pour déconfiner, le gouvernement redevient jacobin dans le confinement. Il faudra veiller aux excès. Il y en a eu après la première vague. Doit-on aller à la plage en étant statique ou dynamique, vous vous souvenez de ces questions existentielles traitées depuis Paris ? L'Etat ne pourra pas s'occuper de tout. D'ailleurs, Emmanuel Macron l'a redit aux maires hier soir : "j'aurais besoin de vous".
Et en janvier, si l'agenda ne change pas, le conseil des ministres examinera, enfin, le projet de loi 3D, censé donner un vrai droit d'expérimentation aux collectivités locales. Mais pas sur la santé, compétence régalienne, et dont l'Union européenne ferait bien, un jour, de se doter. Car cette fois, et contrairement à la première vague, la deuxième est puissante sur tout le continent, et exigera, comme pour la relance, une riposte commune. La balle est, comme toujours, dans le camp des Etats membres.
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