Et si les élections régionales de décembre, dans le Nord-Pas-de-Calais-Picardie, préfiguraient ce qui pourrait se passer pour la France en 2017 ?
L’élection d’un président de droite modérée, avec les voix de la gauche, contre le FN. C’est (vue de ce mois de février 2016) le scénario le plus envisageable pour 2017. Mais, la présidentielle est encore loin ! C’est vrai que le Nord a été à l’origine de beaucoup de mouvements politiques. Il en fut au moins souvent le berceau le plus populaire, là où ces mouvements se manifestaient avec une dimension sociale très forte. De Gaulle est né à Lille et le Nord a été la place forte du Gaullisme social. Natacha Bouchard, la maire de Calais, en devient l’une des figures actuelle après Jean-Paul Delevoye. C’est aussi là que s’est développé le flanc gauche du MRP, après la guerre. Ici, la droite est souvent modérée, imprégnée de catholicisme social. C’est surtout, bien sûr, le berceau de la gauche ouvrière française, la terre de Germinal, des grandes luttes, de la SFIO, du PS et du PC, terre qui a vu s’épanouir des leaders emblématiques comme Jules Guesde, Maurice Thorez, Pierre Mauroy, puis Martine Aubry. Avec des dizaines de milliers d’adhérents, leur puissants relais syndicaux et associatifs comme la fédération Léo Lagrange ou les Jeunesses ouvrières chrétiennes. Longtemps la vie sociale, culturelle était intimement liée aux partis de gauche et leur maillage d’élus locaux qui structurait les rapports sociaux. Cette interdépendance syndicale, associative et politique aurait pu être un modèle de social-démocratie dont Pierre Mauroy rêvait pour la France.
Mais ce modèle très particulier du nord s’est effondré et aujourd’hui le FN menace !
Oui, il s’est effondré avec la désindustrialisation. Le PS, était passé d’un parti de masse à un parti de cadres, qui avait encore le contrôle des emplois publics, de la distribution de logement sociaux et de subventions. Pas étonnant que les scénaristes de la série le Baron noir se soient inspirés des pratiques locales. Les socialistes, après une période glorieuse, que Pierre Mauroy savait si bien raconter, à vous tirer des larmes, ont géré. Ils ont gérés les villes, les départements, la région, bien ou mal (très bien ou très mal). Ils ont aussi géré leur rente de situation, leur appareil. Mais en réalité, ils tournaient à vide : le peuple les quittait. Entre clientélisme et guerre de fédérations, ils sont devenus des notables vivant, bien souvent, sur la bête publique. Les ouvriers, devenus, précaires ou chômeurs ont désertés ou sont restés, mais en obligés plus qu’en militants. Cependant, il serait faux de croire que le FN remplace la gauche dans la région. Avec un million de voix ici, il y a 2 mois mais moins de 2000 militants, le FN est un parti d’affichage, pas de masse. Il se structure avec ses élus locaux mais son enracinement est superficiel. Il n’a pas les relais associatifs, religieux ou syndicaux du MRP ou du PS d’antan. Xavier Bertrand a été largement élu avec des voix de droite et de gauche contre le FN. Il lui incombe d’inventer un nouveau modèle politique populaire et social, comme l’a toujours fait la région. Il semble en avoir pris conscience. Il lui reste à le construire.
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