Une gauche inerte

France Inter
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démentis quant à un changement de cap de françois hollande
démentis quant à un changement de cap de françois hollande
© reuters

Retour ce matin sur les réactions au discours de François Hollande du 31 décembre et à son projet de pacte de compétitivité avec les entreprises…

Oui, pour constater que ce discours unanimement qualifié de "social libéral" ou de "socialisme de l’offre", étiqueté comme un revirement rigoriste n’est quasiment pas critiqué au PS. On n’entend aucune des voix fortes habituelles pour dénoncer une dérive droitière ou libérale ! Au delà du PS, le Front de Gauche (par ailleurs en pleine crise interne) s’insurge. Mais cela passe relativement inaperçu parce que Jean-Luc Mélenchon s’insurge de la sorte depuis le début du mandat de François Hollande et n’a toujours pas accepté que ce soit un modéré qui ait gagné en 2012.

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Au PS, donc c’est le calme plat. Même si les socialistes ont appris qu’avec François Hollande, il fallait attendre les précisions avant de se prononcer, des personnalités comme Benoît Hamon, représentant l’aile gauche, ne montrent, étrangement aucune réserve. La réaction syndicale aussi est très soft. Tout se passe comme si, au fond, les socialistes et les partenaires sociaux étaient tous devenus sociaux libéraux…

A moins qu’ils se sentent, tout simplement (et quoi qu’ils pensent du fond de l’affaire) rassurés que le Président ait enfin un discours tranché. Que François Hollande soit enfin lui-même. Qu’il ne soit plus habité par cette exigence de la synthèse. Une exigence qui lui fut utile dans l’opposition pour maintenir l’unité de son parti mais qui le handicape depuis un an et demi dans l’exercice du pouvoir.

Bon, c’est la gauche d’appareil, le PS, les politiques qui ne réagissent pas mais qu’en est-il de l’opinion de gauche ?

Il est trop tôt pour le dire mais vu sa popularité d’huissier de justice ou d’inspecteur des impôts, François Hollande ne risque rien à prendre enfin le taureau par les cornes et à agir en pensant plus aux résultats de son action qu’à l’acceptabilité de ses mots ! Il refusera certainement d’admettre que sa nouvelle politique constitue un revirement. Concédons que sortir de l’ambiguïté n’est pas forcément se contredire. François Hollande qui a longtemps intégré la fameuse maxime du Cardinal de Retz que l’on cite souvent « on ne sort de l’ambigüité qu’à son détriment » devra s’appliquer maintenant à la faire mentir !

Alors l’opinion de gauche suivra-t-elle ? C’est ce que pense, par exemple, Michel Sapin, le ministre du Travail qui a déjà fait accepter une réforme du marché du travail qui n’aurait certainement pas pu figurer telle quelle dans un programme de candidat socialiste. L’idée que tout se règle par la dépense publique et que l’impôt et les prestations sont l’alpha et l’oméga de la politique serait une idée en déclin même à gauche.

Le vertige des déficits après la crise de 2008 aurait fait, sur les consciences, son œuvre (bénéfique ou maléfique, selon les points de vue). La question que doit se poser maintenant le PS et la majorité est une question de pratique politique, pas de tactique ou de stratégie mais presque de philosophie politique : le candidat Hollande aurait-il pu gagner les élections en tenant le discours du 31 décembre 2013 ?

Il avait quasiment toutes les données en main en 2012 pour tenir un tel discours qui décrit la réalité de ce qu’il pensait bon pour le pays. Est-ce qu’un parti comme le PS peut se poser ce genre de question ? Il ne s’agit pas simplement d’honnêteté politique mais juste du minimum : prendre les électeurs pour des citoyens adultes responsables.

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