

Lundi 2 mai sur France 3, Thierry Ardisson accueille des personnalités disparues dans une nouvelle émission baptisée "L’Hôtel Du Temps". Un mausolée numérique rendu possible grâce à l'intelligence artificielle.
- Thierry Ardisson Animateur et producteur de télévision
"L’Hôtel du temps", Thierry Ardisson en parle depuis trois ans. Son face à face avec les stars, les vraies, les figures éternelles du Panthéon français, des figures populaires, inaccessibles, universelles, singulières, comme on n’en fait plus, pense Ardisson qui préfère le passé au présent. Son face à face avec la mort, donc, puisqu’il ressuscite des personnalités d’antan.
A la clé une prouesse numérique qui anime les visages et les voix pour faire de Gabin, Le Luron, Claude François, Eddy Barclay autour de Dalida. Ça, c’est pour le gadget.
La question, c’est plutôt ce qu’il en fait, Ardisson. Une interview en tête à tête, très scénarisée, dans un grand hôtel, entrecoupée de témoignages et d’archives : un format télé incroyablement classique, si seulement une défunte ne dialoguait pas avec un vivant.
Lorsque l’on me demande, je dis que c'est nouveau.
Thierry Ardisson est l’invité de Sonia Devillers pour parler de son nouveau produit, à mi-chemin entre le documentaire et la fiction.
Le concept
Le présentateur définit « L’Hôtel du temps » comme une interview posthume d’un nouveau style. « Tout ce que dit l'invité dans cette émission est vrai. Il l'a vraiment dit, évidemment. Sinon ça n'aurait aucun intérêt. » Pour autant, l’interview telle qu’elle n’a jamais eu lieu. Elle est reconstituée grâce à technologie. Tout ceci est scénarisé et mis en scène.
Thierry Ardisson explique pourquoi ce format est né. « Quand on s'intéresse aux gens disparus. On fait des biopics au cinéma. » Pour lui, les biopics ne sont jamais satisfaisants. « L'acteur leur ressemble rarement, ensuite les scénaristes leur font dire des choses qu'ils n'ont jamais dites, etc. Faire dire à des personnalités des choses qu'ils ont dites, avec un visage qui est exactement le même que celui qu'ils avaient. Je trouve que c'est beaucoup plus sérieux que de faire un biopic. »
Pour autant, le présentateur précise qu’il s’agit d’une reconstitution. Les informations sont réelles, mais le reste est écrit. « Il faut quand même montrer que tout ça, effectivement, c'est un spectacle. Ce n'est pas la vraie Dalida par exemple. » Dans cette optique, Thierry Ardisson n'interview pas les personnalités disparues pour leur faire parler de ce qui s'est passé après leur mort. « Ils ne savent pas ce qui s'est passé après leur mort. »
Comment ça marche
Le présentateur décrit comment il est possible de produire une émission où l’on fait parler les morts, grâce aux technologies actuelles. Selon lui, il faut travailler sur trois aspects.
C'est un processus très long et très compliqué.
Imiter numériquement le visage de la personnalité, grâce à l’intelligence artificielle. « On prend beaucoup d’images d’archives de la personne et on met ça dans la machine. C’est ce qu’on appelle du deep learning, l'apprentissage profond. On arrive à reproduire son visage avec tous les tics, la façon de lever les cils, la façon de jouer avec sa bouche, etc. » Il explique que pour que le résultat soit satisfaisant, le temps d’apprentissage de l’algorithme doit être d’environ trois semaines par personnalités.
Choisir un comédien qui incarne gestuellement le défunt. « Ensuite, on met ce masque généré par l’intelligence artificielle, sur le visage d’un comédien ou d’une comédienne. Celui-ci doit avoir la même gestuelle que l’invité. »
Arranger la voix du comédien pour qu’elle ressemble le plus possible à celle de la personnalité. « Pour la voix, nous avons fait appel à un organisme : l'Ircam. C'est ce qu'on peut faire de plus pointu en France en matière de recherche sonore. On donne la voix du comédien, de la comédienne et on la transforme numériquement pour qu'elle ressemble le plus à celle de la personnalité dont on fait l'interview posthume. »
Pourquoi c’est intéressant
Pour Thierry Ardisson, ce nouveau format fait appel à la nostalgie. « C’est quelque chose qui est complètement hors du temps, qui joue entre le passé et le présent. » Il renvoie lors de cette émission une image intemporelle et iconique. « On prend toujours la personne dans son image la plus iconique, celle dont on veut se souvenir. »
Selon lui, ce travail sur de nombreuses personnalités défuntes est éminemment respectueux. « Je respecte la mémoire. Je demande la permission des héritiers. Je ne suis pas obligé légalement de leur demander. Il n'y a pas de droit à l'image pour les morts. Mais je trouve ça plus respectueux. »
Pour autant, l’émission ne renvoie pas seulement une image fantasmée de ces personnalités disparues. Elle retrace leur vie, avec les bons et les mauvais côtés. « En fait, je réouvre le dossier. L'invité parle de tout. »
Selon lui, « L’Hôtel du temps » a aussi un intérêt didactique. « Cette émission peut avoir une fonction culturelle, pour communiquer avec les jeunes. Pour leur expliquer, qui était le général de Gaulle, pour leur expliquer qui était François Mitterrand, Jean Gabin ou encore Dalida. »
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