Salaire net et monde de brutes

France Inter
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Un programme court a attiré mon attention : c'est court mais ça vise droit dans le mille ! Salaire net et monde de brutes, c'est sur Arte. En plein débat sur la loi El Khomri, c’est trois minutes de blagues et de sourire pour dépeindre un monde terrifiant, le nôtre. Elise Griffon et Sébastien Meunier ont tout connu des galères d’intérimaire. Ils en ont fait un blog. Le blog est devenu BD, La BD, petit dessin animé. Ça pétille de trouvailles. Jamais glauque, les personnages continuent d’y croire et s’enthousiasment à chaque fois que le téléphone sonne. La voix truculente de Marianne James leur propose le job qui tue. La réalité sera faite d’épuisement, d’humiliation et surtout d’absurdité. Les managers qui minutent les pauses pipi ou qui font du team-building façon Club Med, truffé d’anglais.C’est bien connu, « Get up et happy face », ça donne du baume au cœur. Et « kitchen rangers » pour désigner un commis de cuisine bac +6, ça passe beaucoup mieux ! En guise de chute : 8 euros et 26 centimes fois 145 heures égale 1197 euros et 70 centimes net. Bref, du concret. Mille balles les 150 heures harassantes et souvent dégradantes.

La série se paye les patrons, mais pas seulement. Nous tous, qui écrasons d’un petit coup d’ignorance les livreurs, serveurs, hôtesses et autres standardistes qui en bavent.

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Salaire net et monde de brutes
Salaire net et monde de brutes
© Arte

Par ailleurs, c’est le secteur merveilleux du loisir, le culte du divertissement qu’embroche Salaire net et monde de brutes . Là où l’envers du décor s’avère tout particulièrement hypocrite et gênant : dans les magazines de mode, les bistrots, les restaus branchés, les parcs d’attraction et les soirées dansantes. Lundi, je recevais dans l’Instant M , les youtubeurs à l’origine du hashtag "On vaut mieux que ça", invitant les internautes à témoigner de leur quotidien au travail, pendant que le gouvernement légifère. Depuis quelques mois, les sites qui recueillent ces récits de vie ancrés dans le labeur se multiplient. Pierre Rosavallon, professeur au Collège de France, a même créé le Parlement des invisibles sur internet : « le roman vrai de la société d’aujourd’hui ». Alors, oui, Salaire net et monde de brutes tape juste, car il tombe en pleine réforme du droit du travail et que c’est du vécu. Une pointe de burlesque en plus. Par les temps qui courent. Ça ne fait pas de mal !

« Salaire net et monde de brut », c’est tous les soirs sur Arte, à 20H50

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