Spécialiste des questions numériques à Télérama, le journaliste revient sur les récentes "purges" mises en place par le réseau social Twitter, et sur les questions démocratiques que cela pose.
- Olivier Tesquet Journaliste à la cellule enquête de Télérama
Twitter a été créé en 2006 aux États-Unis, avec une promesse : être le réseau social de l'instantanéité, avec la possibilité d'écrire tout ce qui nous passe par la tête sous forme de micro-messages de 280 caractères. "Twitter est devenu le lieu de la parole publique et de la parole politique", analyse Olivier Tesquet, invité de Jacques Monin dans Secrets d'info.
Un modèle économique fragile
Twitter a été monté par un certain nombre d'entrepreneurs. Le réseau est aujourd'hui dirigé par Jack Dorsey. Sa particularité est qu'il ne gagne pas d'argent. "Ils n'ont pas vraiment de modèle économique. Ils n'ont pas pu devenir, comme Facebook ou Google, des régies publicitaires, qui aspirent quantité de données, et monopolisent le marché de la publicité en ligne. Cela fait des années que Twitter cherche la bonne formule. Donc aujourd'hui, il y a une pression très forte à accroître le nombre d'utilisateurs, qui est bien moindre par rapport à Facebook [environ deux milliards contre 300 à 400 millions pour Twitter]."
Au fil des années, Twitter est devenu un lieu inévitable pour les journalistes, pour les personnalités politiques et celles du monde du spectacle, avec toutes les conséquences, y compris les conséquences néfastes, que cela peut impliquer, et les questions démocratiques :
"On peut considérer qu'avoir viré Donald Trump de Twitter, c'est salutaire. Chacun peut penser ce qu'il veut. Mais c'est aussi révélateur du fait qu'un opérateur privé, sur la base de sa seule décision, peut vous exclure du débat public." Olivier Tesquet
"Les gouvernements veulent reprendre la main"
A la différence du débat sur Facebook, qui est une puissance économique gigantesque, pour Twitter, il s'agit d'une question purement politique, selon Olivier Tesquet : "Est-ce qu'on estime qu'une entreprise privée devrait faire valoir ses conditions générales d'utilisation plutôt que le droit tel qu'il a été édité par le législateur ? Je note une forme d'hypocrisie des responsables politiques français ou étrangers, qui se sont émus du bannissement de Trump. Mais depuis des années, la puissance publique, et notamment en Europe, a considérablement renforcé le pouvoir des plateformes en leur octroyant un droit de police privée et de Cour de justice privée en leur disant : 'Au nom de la lutte antiterroriste, vous devez censurer les contenus de plus en plus rapidement'. On sent donc à travers cet exemple une volonté des gouvernements de reprendre la main et de dire aux plateformes : 'Force revient à la loi et c'est la loi qui doit primer sur les conditions générales d'utilisation.'"
Aller plus loin
Olivier Tesquet est le co-auteur avec la journaliste Christelle Destombes de Tweets : l’Histoire s’écrit-elle en 140 caractères ?, paru en 2014 aux éditions Contrepoint.
Il publie le 4 février 2021 le livre État d'urgence technologique - Comment l’économie de la surveillance tire parti de la pandémie, aux éditions Premier Parallèle.
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