

Emma Haziza, Hydrologue, spécialiste de l'adaptation face au changement climatique et présidente fondatrice du centre de recherche de Mayane.
- Emma Haziza Hydrologue, fondatrice et présidente de Mayane
Des champs arides, des sols craquelés, la sécheresse est devenue un phénomène récurrent en France.
Depuis le début de la semaine, des records de température ont été battus dans le nord et le nord-est du pays, et en même temps, nous avons eu peu d'eau. Diriez-vous que cette situation est inquiétante ou catastrophique ? "Elle est problématique et inquiétante. Car cette année, on bat des accords historiques, notamment cette semaine, avec cette canicule automnale qui nous montre qu'on est dans un nouveau système. Chaque mois voire chaque semaine, on enregistre des records. Et cela fait 4 ans qu'on a des périodes de sécheresse dures, records, et où les sols font face à des situations de stress hydrique, c'est-à-dire que la demande en eau est plus importante que les réserves d'eau déjà présentes.
On peut se demander quelles sont les limites de l'utilisation de l'eau aujourd'hui en France, et est-ce qu'on n'atteindrait pas un point critique ?
On sait aujourd'hui grâce à des études qu'on doit garder 20 à 40% de nos eaux dans nos milieux naturels. Malheureusement, aujourd'hui, on a une très mauvaise vision de ce qu'on prélève. On a une vision de ce qui se passe dans nos rivières et dans nos nappes souterraines, mais on ne sait pas ce qu'il en est des prélèvements sauvages qu'on ne maitrise pas et qui engendre le fait qu'on a des nappes qui se tarissent".
Il y a beaucoup de prélèvements sauvages ? "Oui, dans toutes les rivières de France. Ce sont des prélèvements faits principalement par des agriculteurs et également par des particuliers. Mais ce sont des choses qu'on relève partout et il y a la double problématique quantité/qualité. Il y a un phénomène d'eutrophisation, car il y a beaucoup de nitrates dans l'eau et moins d'oxygène du fait d'une quantité moindre d'eau".
Il y a des problèmes qui s'amoncellent par effet domino, qui montrent que la situation est grave, et qu'il va falloir la traiter en urgence.
L'ensemble du territoire est-il touché ou y a-t-il des régions épargnées ? "On voit une bande centrale qui traverse la France d'est en ouest, qui est assez haute, au niveau de la Vallée de la Loire et du Rhône et qui remonte sur le Grand-Est. On avait l'habitude d'avoir des températures avec du trop ou du trop peu plutôt dans les régions méditerranéennes mais actuellement c'est une situation qui remonte, car la France se situe entre l'Espagne, pays semi-aride et la Belgique, plutôt humide. Cette situation doit nous alerter".
Vous avez été étonnée par des situations de sécheresse qui se déroulaient dans des parties du monde qui n'étaient pas concernées avant ? "Oui, qu'est-ce qui fait qu'on a des géants de l'eau comme le Brésil et de l'autre côté des pays arides comme la Namibie ? C'est le cycle de l'eau. Ce cycle est également présent au niveau continental et inter-continental. C'est ce qui permet à l'Asie d'être alimentée par l'évaporation de l'Europe. Mais on voit qu'il est de moins en moins présent ces dernières années : le recyclage continental ne se fait plus. Résultat : des régions auparavant humides deviennent de plus en plus sèches".
L'équipe
- Production
- Autre