

Opération sport féminin : Béatrice Barbusse Sociologue du sport, enseignante-chercheuse à l'université de Créteil, ancienne handballeuse de haut niveau, autrice de Du sexisme dans le sport (Anamosa) dont la réédition sort le 24 février
Béatrice Barbusse publie la semaine prochaine une version augmentée de son livre "Du sexisme dans le sport". Ancienne handballeuse de haut niveau, aujourd'hui sociologue du sport, comment voit-elle les Jeux olympiques en termes de présence féminine sur les épreuves et dans les retransmissions ? "On se rapproche de la parité, en 2024 on y sera, mais il aura fallu 130 ans pour y arriver. Il n'y a pas tout à fait les mêmes épreuves sur toutes les disciplines, mais l'écart s'est réduit", estime-t-elle.
Il y a quelques années par exemple, le saut à skis était interdit aux femmes aux JO, et le président de la Fédération internationale de ski arguait cela s'expliquait par des raisons médicales : "On entend de moins en moins ces propos, ce n'est pas crédible. Le saut à la perche était concerné par les mêmes arguments médicaux, qui sont aujourd'hui dénoncés", dit-elle.
La sociologue a elle-même subi ce sexisme pendant sa carrière dans le sport, "même si je ne l'appelais pas ainsi, je n'avais pas une conscience féministe éveillée, je me rendais compte des injustices, je représentais souvent mon équipe au Conseil d'administration". Un sexisme qui prend la forme "de créneaux d'entraînement moins favorables que les garçons, de conditions de déplacement qui ne sont pas les mêmes, d'accès aux salles de sport, etc". La professionnalisation du handball est aussi arrivée plus tard chez les femmes : "On voyait une équipe jouer pour de l'argent, et nous, au même niveau, mais pas pour de l'argent".
"Il y a du sexisme partout et à tous les niveaux dans le sport, que l'on soit joueuse, dirigeante, entraîneuse, arbitre. Toutes les femmes qui ont une fonction sportive dans cet univers connaissent ce genre de situation", explique Béatrice Barbusse, qui a complété son livre à la fois pour montrer qu'il y a du mieux mais que le sexisme est bien présent, du point de vue du temps de parole médiatique, du nombre de unes du journal l'Équipe, etc.
J'ai essayé de donner des preuves que le sexisme n'est pas une invention, qu'il existe encore.
"On a tendance à s'arrêter sur ce qu'il se fait de bien, comme le projet de loi sur la parité dans les instances dirigeantes des instances nationales", explique-t-elle, "mais on pourrait aller beaucoup plus loin, quand on regarde les statistiques on est encore très loin d'une situation égalitaire". Pour accéder à une situation plus paritaire, il n'y a que la loi, la contrainte, qui le permette, selon Béatrice Barbusse. "On le voit dans le monde de l'entreprise, par exemple, mais le sport est plus en retard".
Mais comment faire évoluer les mentalités, par rapport aux tenues des joueuses par exemple ? "On râle, on dénonce, et ça fonctionne !" assure-elle. "Cet été, les Norvégiennes n'ont pas voulu porter le bikini, elles ont eu des amendes, mais elles ont été rejointes par les Françaises, les fédérations, et résultat, le règlement a changé. Il faut prendre la parole".
Peut-on parler du "sport féminin" ? "Le sport n'a pas plus de sexe que le piano ou le cinéma. Je préfère "sport au féminin", quand on est bien obligé de le qualifier. Tant que le masculin sera synonyme de neutre, on sera, hélas, encore obligé d'utiliser ce terme".