Olivier Wieviorka : "Hubert Germain était le dernier représentant d'un ordre très important"

L'historien Olivier Wieviorka, invité de France Inter.
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L'historien Olivier Wieviorka, invité de France Inter. ©Radio France - Xavier Demagny
L'historien Olivier Wieviorka, invité de France Inter. ©Radio France - Xavier Demagny
L'historien Olivier Wieviorka, invité de France Inter. ©Radio France - Xavier Demagny
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Olivier Wieviorka, spécialiste de l'histoire de la Seconde Guerre mondiale et professeur à l'École normale supérieure Paris-Saclay, est l'invité de France Inter au lendemain de la mort mardi d'Hubert Germain, dernier compagnon de la Libération encore en vie jusqu'ici.

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Il était le dernier compagnon de la Libération. Mardi, Hubert Germain est mort, à l'âge de 101 ans. Si l'expression est souvent galvaudée, c'est là une véritable page d'histoire qui se tourne, confirme l'historien Olivier Wieviorka.  

"Il était le dernier représentant d'un ordre extrêmement important, la chevalerie de la résistance intérieure et extérieure", précise le spécialiste de l'histoire de la Seconde Guerre mondiale et professeur à l'École normale supérieure Paris-Saclay. Un ordre créé par le Général de Gaulle, en septembre 1940 au début de la France libre pour honorer les "chevaliers" qui l'aidaient. 

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"Ce qu'il y a d'incroyable avec Hubert Germain, c'est son courage absolument fou, qui découle d'une certaine personnalité", souligne-t-il. "Jeune homme indiscipliné", mais qui à la veille de la guerre est en train de passer le concours de l'école navale, "il ne supporte absolument pas l'idée de la défaite et d'être militaire sous celle-ci". Au concours, il remet copie blanche car pour lui cette idée de défaite "est absolument intolérable"

Pendant la guerre, Germain participe à toutes les grandes campagnes de la France libre. Après la guerre, il entame une carrière politique "de deuxième division". Maire, député et ministre, "il dira que les honneurs ne lui ont jamais plu, ce n'est pas un homme de premier plan"

Enterré au Mont-Valérien

"L'ordre de la Libération avait prévu que le dernier compagnon serait enterré dans le dernier cercueil vide du Mont-Valérien et c'est ce qui arrive à Hubert Germain. C'est aussi ce que craignait Daniel Cordier, qui trouvait le lieu beaucoup trop froid", poursuit Olivier Wieviorka. 

Avec Hubert Germain, c'est donc la fin d'un ordre créé dès le début de la guerre. "De Gaulle a rajouté des noms au fur et à mesure de la guerre et il a clos l'ordre en 1946. Il y en avait 1.038, il ne l'a rouvert que deux fois, pour honorer Churchill et Georges VI." 

C'est un ordre beaucoup plus gaulliste qu'œcuménique. 

L'objectif était "d'honorer tous les résistants", mais la composition de l'ordre souffrait d'un "petit biais gaulliste", rappelle l'historien. "Ceux qu'on appelle les résistants de l'extérieur, qui ont combattu militairement au grand jour, ont été très largement favorisés sur les résistants de l'intérieur. Il y a une disproportion, c'est beaucoup plus gaulliste qu'œcuménique." 

Il rappelle que c'est aussi un ordre "très macho", car il ne comporte "que six femmes alors que leur participation a été beaucoup plus importante".