Morgan Large : "J'ai l'impression d'être une cible depuis que mon visage est paru sur le Twitter de la FNSEA"

Morgan Large
Morgan Large ©AFP - LOIC VENANCE / AFP
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Journée mondiale de la liberté de la presse : Morgan Large, journaliste à Radio Kreiz Breizh, victime d'intimidations suite à son témoignage dans le documentaire "Bretagne, une terre sacrifiée", est notre invitée de 6h20.

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Ce 3 mai est la journée mondiale de la liberté de la presse. Et à cette occasion, nous avons invité la journaliste Morgan Large qui subit insultes, menaces et sabotage : des tentatives d’intimidation, jusqu'au déboulonnage des roues de sa voiture, pour avoir dénoncé les dérives de l’agriculture intensive en Bretagne. "Il y a des jours où on se dit qu'il faut continuer de travailler dans ce domaine et d'autre où l'on est découragé, comme en ce moment où l'on voit qu'il y a une forme de justification de ce qu'il m'arrive par la presse agricole, et par certains patrons de l'agro alimentaire" raconte la journaliste. 

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Elle cite ainsi l'attitude de Georges Galardon, élu vice président de la communauté de commune dans laquelle la journaliste réside, et surtout ex-président de Triskalia, énorme coopérative de 4800 salariés et 18 000 adhérents : "Il déclare que je menace les patrons de l'agro alimentaire et des élus, que c'était du harcèlement, que quelque chose ne tournait pas rond chez moi, et à aucun moment il y a la condamnation d'employer des méthodes injustifiables, de me mettre en danger moi et ma famille" déplore Morgan Large.  

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"J'ai l'impression d'être une cible depuis que mon visage est paru sur le Twitter de la FNSEA régionale, je pensais que la médiatisation allait me protéger, mais là je suis assez inquiète". 

Elle a ainsi demandé une protection policière mais ne l'a pas obtenue, pas même un numéro de téléphone d'urgence : "On m'a dit que je pouvais téléphoner quand je voulais à Guinguamp, à 50 min de chez moi : non, je ne me sens pas très protégée". 

"Activistes persécuteurs"

C'est le documentaire "Bretagne une terre sacrifiée", diffusé sur France 5, qui a tout déclenché : elle intéressait ses auteurs pour sa condition de journaliste presse et radio qui s'intéresse à l'agro alimentaire, mais aussi pour son statut d'élue locale et de conseillère municipale : "Il était très dur d'en trouver qui acceptait de parler". Elle rappelle ainsi le rassemblement de soutien organisé pour elle le 6 avril dernier, avec beaucoup de maire avec leurs écharpes, des messages du président de région: "Mais je m'inquiète des éditos dans la presse agricole, qui parlent 'd'activistes persécuteurs'" dit cette fille de paysans qui a même passé un brevet professionnel d'exploitation agricole, il y a quelques années "parce que ces sujets m'intéressaient et que j'avais des lacunes théoriques énormes". 

"Je suis en général bien reçue dans les fermes, et ce sont les agriculteurs qui me demandent d'aller creuser des sujets pour lesquels ils n'ont pas de réponses."

Les crises agricoles se succèdent les unes après les autres, et les agriculteurs ne les comprennent pas. Elles citent l'exemple de ces marchés où des veaux sont bradés en fin de marchés : "2 veaux, pour 2 euros". 

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Une ONG pour soutenir le journalisme indépendant en Bretagne

Pour pourvoir continuer son travail d'enquête, elle a aussi monté une ONG, Splann, "première ONG d'enquêtes journalistique en Bretagne", montée avec d'autres journalistes pour mener des enquêtes en toute indépendance : "On a envie d'embaucher des jeunes journalistes et les rémunérer correctement et surtout donner une info gratuite aux gens, c'est un bien commun". Elle veut ainsi éviter aussi l'autocensure : "Quand on est fatigué, précarisé, quand on n'a plus envie de traiter des sujets sur l'agriculture qui reviennent ainsi à la seule presse agricole, une presse aux mains des grands groupes, dans lequel le milieu de la communication et de l'information est extrêmement poreux". 

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>> Voir "Bretagne, une terre sacrifiée" de France 5 extrait sur Disclose.