Le ministre de l'Économie et des Finances est l'invité du Grand Entretien de la matinale de France Inter. Il évoque le déconfinement qui doit commencer le 11 mai, une date essentielle selon lui pour relancer l'économie.
- Bruno Le Maire Homme politique français
La France est-elle prête à se déconfiner ? "Il faut que nous soyons prêts pour le 11 mai. Il est indispensable que le plus grand nombre de Français puissent reprendre le chemin du travail et retrouver une vie la plus normale possible. Il reste des questions : sur les transports, les écoles… Il nous reste quelques jours pour apporter des réponses. Ce que je peux vous dire, c’est que l’intérêt général, l’intérêt national, c’est que le plus grand nombre de Français puissent reprendre l’activité le 11 mai prochain. C’est important du point de vue économique, mais aussi du point de vue personnel : le confinement, c’est pas une vie. C’est pas une vie pour l’économie, c’est pas une vie pour la nation, c’est pas une vie personnelle souhaitable, c’est pas une vie pour les personnes âgées ou ceux qui sont privés de soins. Nous devons réussir le déconfinement le 11 mai. Le virus va continuer à circuler et nous obliger à avoir une attitude responsable, chacun d’entre nous."
"Beaucoup craignent ce déconfinement parce que c’est quelque chose de nouveau, parce que les responsabilités sont engagés", rappelle Bruno Le Maire. "Il faut donc que nous travaillions d’arrache-pied toute cette semaine pour répondre à toutes les inquiétudes qui peuvent se manifester, et que nous trouvions des solutions."
"Comme l’a dit avant moi le Premier ministre : si vous pouvez continuer le télétravail, continuez le télétravail", précise le ministre. "Il y aura d’autant moins de personnes dans les transports publics, d’autant moins de difficultés à l’entrée des administrations ou des entreprises, que ceux qui sont en télétravail continueront à le faire. Je mesure bien que le télétravail ce n’est pas facile, je le vois avec mes équipes et mes administrations. C’est compliqué d’être chez soi et de travailler avec la famille qui est là, les enfants qui peuvent faire du bruit, ce n’est pas bon de ne pas avoir de séparation entre son domicile et son lieu de travail. Je mesure parfaitement les contraintes que ça représente pour beaucoup de salariés français. Je les invite néanmoins à poursuivre encore quelques semaines, parce que ça évitera d’avoir trop de monde dans les transports en commun."
Bruno Le Maire le rappelle : "Au premier trimestre, nous sommes le pays européen dans lequel la chute d’activité a été la plus forte : il faut se redresser tout aussi fortement."
"C’est notre prospérité et l’emploi qui sont en jeu"
"Les secteurs d’activité dans lesquels l’économie a été à l’arrêt, alors même qu’ils étaient encore ouverts, doivent pouvoir redémarrer le plus vite possible", exige Bruno Le Maire. "Je pense notamment au bâtiment et aux travaux publics : nous sommes en contact régulier avec les organisations professionnelles pour lever toutes les difficultés qui se posent. Le BTP aujourd’hui est à l’arrêt à plus de 80 % alors qu’il tourne beaucoup plus fort en Allemagne, en Italie ou dans d’autres pays européens. Nous regardons chacun des sujets pour que dans tous les secteurs de l’activité économique, l’économie puisse redémarrer et l’emploi puisse repartir. Derrière, c’est notre prospérité et l’emploi qui sont en jeu, notre capacité à garder de grandes filières industrielles."
Quid des magasins qui ne pourront pas repartir, faute d'avoir survécu à la crise ? "Je souhaite que tous les commerces puissent rouvrir le 11 mai prochain. Si jamais il y a des difficultés qui se posent d’un point de vue financier, je rappelle qu’il y a un certain nombre de dispositions qui ont été mises en place et qui sont à destination des indépendants et des commerces. Le fonds de solidarité, pour tous ceux qui y avaient droit, sera maintenu jusqu’au 31 mai. Nous allons continuer à les accompagner. Après le 1er juin, le fonds de solidarité sera maintenu pour tous ceux dont l’activité continue à être fermée (bars, cafés, restaurants), tous ceux qui ont peu de chances de voir leur activité se re-développer dans les prochaines semaines (l’événementiel), tous ceux qui sont directement impactés par la fermeture des activités collectives (théâtres, festivals, cinémas). L’État continuera à accompagner les indépendants, les commerces, la culture : on ne va pas laisser tomber les gens."
"À partir de la fin mai, nous aurons une date de réouverture pour les restaurants, les bars, les cafés", assure-t-il. "Ce calendrier sera tenu. Ça suppose qu’on continue à travailler sur le guide des bonnes pratiques pour ces lieux de convivialité. Tout le secteur est totalement mobilisé et nous allons y arriver."
"Limiter le plus possible la casse économique et la casse sociale"
Toutefois, le ministre reconnait que ça ne se fera pas sans casse. "Oui, il y aura des faillites, je ne l’ai jamais caché. Il y en aura dans certaines petites entreprises, dans les commerces, nous le savons. Nous devons nous préparer à affronter ces moments qui vont venir dans les prochains mois, où les problèmes de trésorerie vont devenir pour beaucoup de chefs d’entreprise des problèmes de solvabilité. Nous commençons déjà à travailler là-dessus, pour accompagner le plus grand nombre de personnes et limiter le plus possible la casse économique et la casse sociale. Je m’attends à ce que dans les prochains mois, passé le premier choc qui a été amorti par la réponse massive et immédiate de la puissance publique, il y ait un deuxième temps où l’on reprend l’activité économique, mais où certaines entreprises parmi les plus fragiles peuvent ne pas y arriver. Il faut voir ce que nous allons faire pour elles. Le plus dur est devant nous du point de vue économique, nous nous y préparons."
Concernant le chômage partiel, il va progressivement être réduit. "C’est un choix que nous avions fait pour garantir les qualifications, le savoir-faire de tous les salariés français. Ça nous a évité d’avoir des millions de licenciements dans notre pays. Le chômage partiel va être maintenu intégralement pour tous les secteurs qui continueront à être fermés. Pour tous ceux qui continueront à fonctionner, nous allons avec Muriel Pénicaud proposer une évolution du dispositif à partir du 1er juin : elle sera progressive, pour favoriser le retour au travail. Massivement, le chômage partiel doit diminuer dans ce pays."
"Air France doit devenir la compagnie aérienne la plus respectueuse de l’environnement de la planète"
"Il faut identifier les secteurs les plus fragiles. J’en vois au moins trois : le tourisme, l’aéronautique et l’industrie automobile", énumère Bruno Le Maire. "Il faut travailler ensuite avec tous ses acteurs. Rien que pour l’industrie aéronautique, ce sont des centaines de milliers d’emplois dans notre pays, autour d’Air France ou d’Airbus et de leurs milliers de sous-traitants. Je propose que dès cette semaine nous examinions ce que pourrait être un plan de soutien à l’industrie aéronautique dans notre pays, et éventuellement la mise en place d’un fonds d’investissement pour soutenir les sous-traitants, les PME, tout ce tissu industriel à travers le pays. Je propose que nous fassions la même chose pour l’industrie automobile. Cela pourra passer par exemple par des soutiens à la demande, des soutiens à la consommation pour des véhicules électriques, propres."
Le ministre estime également qu'il y a "un troisième pilier très important, c’est de savoir où on va, quelle économie nous voulons, parce que ça permet d’orienter nos choix économiques". "Nous voulons une économie décarbonée, à la pointe de la technologie. Je pense que nous pouvons faire de cette crise une occasion unique de redéfinir ce que nous voulons pour notre économie et de nous donner une nouvelle ambition économique."
Air France, par exemple, devra avoir des objectifs écologiques ambitieux. "Cela fait partie du contrat qui a été conclu entre Air France et l’État quand nous avons apporté notre soutien financier : la condition, c’est que Air France devienne la compagnie aérienne la plus respectueuse de l’environnement de la planète. Oui, ça passe par des suppressions de lignes intérieures. Mais très franchement, quand on peut faire le trajet en train en moins de 2h30, l’avion ne se justifie pas. Ça ne doit pas être une mesure transitoire mais une mesure définitive."
"Le chômage partiel, c’est un choix que nous avons fait pour garantir les qualifications, le savoir-faire de tous les salariés français. Ça nous a évité d’avoir des millions de licenciements dans notre pays. Le chômage partiel va être maintenu intégralement pour tous les secteurs qui continueront à être fermés. Pour tous ceux qui continueront à fonctionner, nous allons avec Muriel Pénicaud proposer une évolution du dispositif à partir du 1er juin : elle sera progressive, pour favoriser le retour au travail. Massivement, le chômage partiel doit diminuer dans ce pays."
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