Jean-Francois Delfraissy : "La loi Claeys-Leonetti ne permet probablement pas de répondre à toute situation"

Jean-Francois Delfraissy
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Jean-Francois Delfraissy ©AFP - JOEL SAGET
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Jean-Francois Delfraissy, président du Comité consultatif national d'éthique (CCNE), immunologiste et ancien président du conseil scientifique, est l'invité du Grand entretien de France Inter.

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Mardi, le cinéaste Jean-Luc Godard est mort par suicide assisté, une pratique possible en Suisse et pas en France : "La fin de vie est quelque chose d'éminament personnel : je respecte son choix, il avait annoncé il y a quelques années qu'il ne voulait pas finir sa vie 'en brouette'", se souvient le président du Comité consultatif national d'éthique. "Est-ce que c'est l'exemple qui doit être retenu ? Non, c'est probablement beaucoup plus nuancé, c'est son choix, la législation suisse le permet en partie, tout cela doit nous porter à réfléchir".

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Notion de "moyen terme"

"Sur ce point, le CCNE ne va pas si loin, loin de là : nous ouvrons de façon prudente qu'il y a probablement quelques situations rares qui d'un point de vue éthique pourraient justifier d'aller vers une aide active à mourir", explique Jean-François Delfraissy. "Mais ce sont des situations rares, qui touchent des situations qu'a construit la médecine : des personnes en sixième, septième ligne de chimiothérapie, où il n'y a plus de sortie possible, des maladies neurologiques dégénératives, avec un pronostic vital à moyen terme, c'est-à-dire quelques semaines ou quelques mois", ce qui s'oppose au "court terme" de quelques jours ou quelques semaines auquel la loi Claeys-Leonetti apporte une réponse.

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Que dit l'avis du conseil d'éthique ? Déjà, il insiste "sur le fait que la loi Claeys-Leonetti n'est pas suffisamment connue ni appliquée. On le dit, on le redit : pourquoi faire une loi si on n'a pas les moyens nécessaires pour appliquer la loi Claeys-Leonetti ?", dit-il, appuyant le fait que plusieurs départements de France n'ont pas d'unité de soins palliatifs. "Les médecins de soins palliatifs font un boulot remarquable, il faudra prendre le temps de les écouter : ils ne sont pas énthousiastes pour une évolution de la loi, mais je leur dis que je reconnais l'importance majeure de cette situation", selon Jean-Claude Delfraissy.

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Scénario à la suisse, à la belge ?

Le médecin détaille : "La position du CCNE était de tenter, avec prudence, de regarder si, même si on avait tous les outils et les moyens de la loi Claeys-Leonetti, on pourrait répondre à toutes les situations. La réponse est probablement non : il existe des situations où le pronostic vital est clairement sur la table mais il ne l'est pas à très court terme, avec des souffrances physiques et/ou morales qu'on peut en partie calmer, mais en partie seulement, et où la personne pourrait souhaiter aller vers une aide médicale au suicide assisté". La notion de "moyen terme" est donc le principal changement. Mais il assure que la question "réclame" un grand débat sur le sujet.

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"Prenons le temps de prendre le temps de discuter autour de ces sujets"

Si l'avis du comité d'éthique était suivi, que se passerait-il pour une personne qui souffre d'une maladie qui correspond aux conditions de pronostic vital engagé "à moyen terme" ? Cela, le comité ne l'a pas défini, il le remet à la consultation qui sera lancée, "et en fonction du recueil qui sera fait, on verra bien comment peut-être, ou peut-être pas, aller vers une évolution de la loi. Il y a plusieurs modèles, celui de la Belgique, de la Suisse, ou de l'Oregon". En Belgique, c'est le médecin qui donne le produit létal, alors qu'en Suisse et en Oregon, c'est le patient qui se l'auto-administre. "On a assez peu de retours d'évaluation des politiques publiques", dit-il. "On a de bonnes données sur l'Oregon, mais ni sur la Suisse ni sur la Belgique, il faut qu'on prenne le temps d'aller voir, d'écouter".

Le cas d'un auditeur qui dit refuser la maladie d'Alzeihmer, Jean-Claude Delfraissy affirme que ce n'est pas quelque chose "avec une fin de vie programmée d'un point de vue médical", et ça ne rentre donc pas dans le cadre du "moyen terme". Pourquoi le CCNE est-il si frileux sur l'avis qu'il a rendu, demandent plusieurs auditeurs ? "Cette position est dans la continuité mais aussi dans le changement, ce qui pour une institution comme la nôtre va faire que des auditeurs vont nous demander pourquoi on change. On ouvre surtout un temps de discussion avec les citoyens", dit-il, appuyant le terme de "démocratie en santé" qu'il défend.

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Qu'en est-il de la terminologie ? "Suicide assisté" ou "euthanasie" sont-ils encore viables ? "Le mot "suicide", on bute dessus, il y avait une "journée de prévention des suicides" samedi dernier donc on voit bien l'ambiguité du terme. Il va falloir travailler sur ces deux mots", selon Jean-Claude Delfraissy. Le CCNE évoque des termes beaucoup plus en retrait sur le terme "d'euthanasie" contrairement à d'autres pays.