

La glaciologue Heidi Sevestre et le professeur en géopolitique des Pôles à Sciences Po Mikaa Mered sont les invités de 8h20.
- Mikaa Mered chargé d’enseignement en géopolitique des pôles à Sciences Po et HEC
La situation aux pôles est critique : en Antarctique, le Glacier de l'Apocalypse menace de se fissurer. "Les régions polaires subissent de plein fouet l'oeuvre de nos activités : plus on émet de gaz à effet de serre, plus on consomme d'énergies fossiles, plus le thermostat de la planète augmente", explique la glaciologue Heidi Sevestre. "Dans les régions polaires, les températures sont en train d'augmenter deux à quatre fois plus vite que la moyenne planétaire : ces régions faites de neige et de glace sont en train de réagir extrêmement rapidement à ces changements".
Si les conséquences nous apparaissent lointaines, elles peuvent pourtant avoir un impact colossal dans le quotidien : "Si la banquise de l'Arctique disparaît, en France, on va avoir des perturbations extrêmes, des changements de températures, des changements au niveau des saisons, une agriculture qui va en souffrir", prévient-elle.
"Notre avenir est directement lié à ces glaces très lointaines".
Mais la situation n'est pas que scientifique, elle est aussi géopolitique : "L'Antarctique n'est pas un bien commun, c'est un bien de club, géré par 54 États", régi par un traité, rappelle Mikaa Mered, professeur en géopolitique des Pôles à Sciences Po, avec des états "plutôt en première division comme la France et d'autres plutôt en seconde", mais dont certains veulent désormais se faire mieux entendre.
Or ces zones sont aussi considérées comme des opportunités économiques, parce que la fonte ouvre de nouvelles voies navigables, et parce qu'elles sont riches en matériaux. Or, selon Heidi Sevestre, "on sait que pour éviter des conséquences irréversibles, il faut éviter de dépasser 1,5° d’augmentation de température. Aujourd’hui, on est à 1,2°C. Si on ne veut pas dépasser les 1,5°C, il ne faut pas toucher aux réserves de gaz et de pétrole qu'on trouve en Antarctique et en Arctique, et c'est pourtant ce qu'on fait".
La France renforce son engagement militaire en Arctique, notamment avec des patrouilles de la marine. Mais l'action des entreprises françaises a aussi permis à la Russie de se développer à une vitesse fulgurante sur cette zone. "Aujourd’hui, ce que beaucoup se disent, c’est que le développement de l’Arctique est inéluctable, et notamment on a besoin des métaux nécessaires à la transition écologique et numérique, et qui sont en Arctique", ajoute Mikaa Mered, qui pointe la nécessité d'une vraie stratégie en Arctique.
Problème : on parle de zone très fragiles. "On fait face à une région, l’Arctique, qui ne tolère pas la moindre pollution. On n’a pas la capacité d’aller nettoyer une marée noire dans l’Arctique. C’est malheureusement une question de temps avant que ça arrive", déplore Heidi Sevestre. Mikaa Mered apporte toutefois une touche d'optimisme, en expliquant que c'est peut-être là aussi que se trouve une partie de la solution au réchauffement : "En Arctique est développé l'hydrogène vert, un vecteur d'énergie décarboné. Ce peut être une partie de la solution. Mais là encore c'est un jeu d'équilibriste : plus on exploite l'Arctique, même pour faire de l'hydrogène vert, plus cela a de l'impact."
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