Alors que le Parlement entame ce mardi l'examen du texte de loi controversé sur la "sécurité globale" à l'Assemblée Nationale, Patrice Spinosi, avocat, spécialiste des questions de libertés publiques, est l'invité du Grand entretien de France Inter.
- Patrice Spinosi Avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation
"On vit aujourd’hui une période très particulière", remarque l'avocat Patrice Spinosi, spécialiste des questions de libertés publiques. Il souligne que nous acceptons la liberté restreinte ou la justification de nos déplacements "parce qu’il y a une menace sanitaire". "C’est normal de l’accepter parce que nous savons que c’est temporaire. Mais il y a un double danger : l'érosion de notre sentiment de liberté et l’utilisation de ce besoin de sécurité sanitaire."
Le "grand danger de notre siècle" est que l'on "oublie" l’État de droit. "L’épidémie est évidemment extrêmement grave. Mais on est au cœur de l’épidémie, et elle va passer. Et avec elle vont disparaître l’ensemble des mesures qui nous ont été imposées. C’est d’ailleurs la grande différence entre l’état d’urgence sanitaire et l’état d’urgence terroriste."
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Interdiction de filmer des policiers
"Ce texte punit toute diffusion d’image d’un gendarme en intervention à partir du moment où cela a pour but de porter atteinte à l’intégrité physique ou psychique de ce fonctionnaire. Sauf que c’est la lettre du texte sauf qu’il y a son application, la manière dont il va être mis en œuvre au quotidien par les forces de police", alerte Patrice Spinosi.
"Cela va aboutir à ce qu’on retienne uniquement l’interdiction de filmer les gendarmes et les policiers."
"En pratique, il va y avoir une menace, un effet dissuasif, une autocensure sur la possibilité de filmer des forces de police et on sait que c'est là l’un des moyens les plus efficaces pour pouvoir dénoncer certaines violences policières, certains débordements. Il y a un grand danger d’une atteinte à la liberté d'expression", souligne-t-il.
Patrice Spinosi craint qu’en pratique, "à partir du moment où on va filmer des forces de police, elles diront qu’on n’a pas le droit et vont pouvoir à partir de là confisquer votre téléphone, vont vous arrêter, vous mettre en garde à vue de façon préventive." Cela "va avoir un effet pratique, immédiat", qui va être "de limiter la possibilité d’avoir ces vidéos qui sont le fondement même de toutes ces affaires de violences policières".
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"On a dans notre législation les moyens de pouvoir lutter contre la violence envers les policiers", assure Patrice Spinosi. "On est dans le cadre d’une inflation législative : il y a un besoin d’action de la part du politique, ça ne coûte rien de faire des lois sur la sécurité et ça donne l'impression qu’on réagit. Mais on tue nos libertés sans vraiment en prendre conscience."
Il note que, sur les cinq dernières années, trois se sont déroulées sous le régime de l'état d’urgence, sanitaire ou terroriste. Sur les dix dernières années, pas une ne s'est passée sans une nouvelle loi sécuritaire, regrette-t-il.
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"La législation de notre asservissement"
Patrice Spinosi alerte sur la "spirale répressive". "Les Français ont besoin d'être rassurés, parce qu’ils ont peur de la menace terroriste, de la menace sanitaire. Mais ont-ils envie de plus de lois ? Certainement pas. Le problème c’est qu’il faut avoir conscience de ce qu’impliquent ces lois. On en revient au sentiment de liberté, à l’atteinte de l'État de droit."
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De plus, "on construit la législation de notre asservissement de demain", estime l'avocat. Car si l'on est habitués "à un gouvernement démocratique" et qu'on lui fait confiance, "qui sait demain qui pourra arriver au pouvoir ?", interroge-t-il. "Si vous avez demain un Macron à la Trump qui prend le pouvoir, qui sait ce qu’il fera de la législation qu’on est en train de construire ?"
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