Pour sa quatrième chronique, Aldebert voulait parler des avortements clandestins dans des cliniques de brousse à la frontière guyanaise et puis il s’est dit que c'était p’têt pas la bonne période… il va plutôt faire dans le bisounours avec sa chanson « Sur la bouche ».
Du coup je vous propose de revivre, par le biais de cette chronique, le plus grand moment de l’existence :
Celui dont vous vous souviendrez toute votre vie, même sur la fin lorsque que vous croupirez au foyer médicalisé du Râle Poussif de Langres dans le 52 ( oui j’ai choisi la Haute Marne, parce que ça me paraissait corporate avec avec le côté « fin de vie » et ça faisait bien 2020 ) Donc, ce bel et angélique instant pratiqué sans masque, je veux bien sûr parler du : premier baiser.
Alors nan désolé mais la première pelle n’a pas forcément lieu sur une plage, faux ! Pour ma part, elle eut lieu dans un garage du centre ville de Besançon entre un appareil à raclette et des pneus hiver, là encore, on perd en exotisme ce qu’on gagne en authenticité mais c’est bien là que j’ai embrassé pour la première fois. Que d’appréhensions et que de turpitudes avant cette délicieuse minute adolescente :
Fallait-il, comme me l’avait vivement conseillé mon copain Pierre-Marie Hézard, avec qui je co-écris cette chronique, tourner la langue de gauche à droite 7 fois comme le dit l’adage, en faisant l’inspection détaillée des problèmes gingivaux de l’heureuse élue retenant difficilement sa salive qui s’échappe des bagues de son appareil dentaire ?
Ou au contraire comme le démentait Jacky Schwartzmann (qui a autre chose à foutre que de co-écrire des chroniques ) fallait-il laisser à votre partenaire l’élégance de définir le sens de rotation et vous abandonner dans cet ouragan bucco-romantique. Mystère…
Niveau musique, perso je voudrais remercier Eric Serra qui s’est chargé à l’époque de la bande-son de mon baptême de galoche. On était en pleine sortie du Grand Bleu, en 1988 et je re-triplais mollement ma troisième. (autant vous dire que je venais au collège en Fiat Panda et c’est moi qui conduisais ) J’étais moi aussi quelque part, un « grand bleu » au sens immense apprenti, grand néophyte, bref, un bizut du bisou. Bisou qu’on pratiquait d’ailleurs souvent en apné.
J’avais comme tout bon adolescent, cette chaussure noire, en référence au personnage des films de Veber, symbole de cette François Pignonite aiguë qui consiste simplement à tout foirer : En commençant par le brevet des collèges, auquel je me suis rendu les mains dans les poches, un crayon de papier sur l’oreille comme un boucher de quartier et des lacunes dans à peu près toutes les matières.
Tout foirer comme ces faux mots d’absence, gaulés par la CPE de l’époque : une ex-miss France 1948 qui s’était laissée aller pendant les trente glorieuses, méchante comme un chien de ferme et experte en graphologie ( Et oui, pour expliquer aux pitchounes qui nous écoutent, à l’époque nous étions tous des petits faussaires en puissance et on justifiait les absences par des hiéroglyphes sur des parchemins )
Mais l’espace d’un instant, dans les souvenirs intacts de ce premier baiser, nous fûmes ce Jaques Maillol alias Jean-Marc Barr, qui dans sa combi moulante croise au ralenti le regard de Rosanna Arquette, avant d’aller nager sous la glace, métaphore peut être de l’âge adulte, cette banquise infinie sous laquelle on trouve parfois quelques bulles d’oxygène coincées et qui permettent encore d’espérer et de récupérer un peu d’enfance.
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