

"Si on y réfléchit bien, c’est pas grand-chose cette histoire de gilets jaunes", "j’ai mis 2 millions et demi de personnes dans les rues"... Retour une séquence dont Bruno ne s'est toujours pas remis : l’interview que François Fillon a choisi d’accorder au présentateur vedette de la télévision suisse (RTS).
L'avatar médiatico-politique, probablement le plus surréaliste de l’année
Figurez-vous que c’était, hier, le come-back cathodique de François Fillon. Deux ans et demi qu’on était sans nouvelles de lui. 30 mois que l’ancien candidat à la présidentielle de 2017 avait disparu des radars pour cause de déroute électorale, de Pénélopegate et de triple mise en examen. Et voilà que le désormais salarié d’un fond d’investissement choisit la TSR, la Télévision Suisse Romande, pour nous donner de ses nouvelles. Alors j’ai eu très envie de vous raconter cet épisode car tout, absolument tout, m’a paru totalement incongru.
D’abord, le symbole : choisir le pays de l’exil fiscal quand on a des casseroles qui mettent à ce point en en cause votre honnêteté, faut le faire !
Mais surtout, surtout, ce qu’il y avait de particulièrement déconnant là-dedans, c’était bien sûr le contenu. Fillon a commencé par être interrogé sur le mouvement des gilets jaunes :
Si on y réfléchit bien, c’est pas grand-chose cette histoire de gilets jaunes. Y’a eu au maximum des manifestations 150, 180 000 personnes dans toute la France à manifester
Voilà, alors ça fait bientôt un an que ça dure, il n'y a pas eu 180 000 personnes maximum mais plus de 300 000 dans les rues, le premier samedi de 2018. Et son camp politique, Les Républicains, a passé son temps à tenter de grossir ce mouvement de contestation, sans précédent, à s’en emparer politiquement pour affaiblir Macron ! Merci Fillon et bravo. Ok, donc les gilets jaunes, c’est de la gnognotte. Autre chose ?
Je vais être un peu prétentieux mais quand j’étais ministre des affaires sociales, j’ai fait une réforme des retraites, j’ai mis 2 millions et demi de personnes dans les rues
Vous apprécierez la morgue et le cynisme du responsable politique, tout content de nous dire, depuis la Suisse, que le mécontentement social des français, non seulement, il s’en tamponnait le coquillard avec une pelle à gâteau mais qu’en plus, il était particulièrement fier de
Ah oui, vous avez fait mieux là. Macron, c’est un p’tit joueur à côté !
Voilà donc pour l’analyse très personnelle, de la situation sociale. Mais il y avait mieux : écoutez donc comment Fillon perçoit la situation politique de la France et plus particulièrement celle de son camp, la droite :
Je pense que la droite française s’est suicidée avec ses divisions. Et ça commence pas avec la campagne présidentielle, c’est bien plus ancien
Avant de poursuivre : "La droite française s’est suicidée !" Alors entendre ça de la bouche du type qui lui a collé une balle dans la tête en se retrouvant poursuivi par la justice de son pays, tout en refusant de se retirer de la course à l’Elysée, franchement, y’a de quoi s’étouffer !
Enfin, il faut que je vous dise un mot du timing choisit par Fillon. Car il a causé hier, c’est-à-dire deux petits jours, seulement, avant l’élection du prochain président des Républicains qui se tiendra ce week-end. Très joli coup de pied de l’âne, bravo champion.
En guise de conclusion, on rappellera tout de même au sémillant Fillon ce qu’il avait déclaré en novembre 2017 : « Dans la défaite, disait-il_, le chef se retire, sans chercher d’excuses et sans donner de leçons_ ». Et on remettra dans les feuilles de celui qui estime aujourd’hui, depuis la Suisse, que le président français a manqué d’autorité face aux gilets jaunes, ce qu’il disait lorsqu’il était candidat, en France, à la présidence de la république :
Il ne sert à rien de parler d’autorité quand on n’est pas soi-même irréprochable
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