Perquisition du siège de la France Insoumise : quand les émissions dévoilent les rushs

Jean-Luc Mélenchon
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Jean-Luc Mélenchon ©Maxppp - La Provence
Jean-Luc Mélenchon ©Maxppp - La Provence
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La production de l’émission "Quotidien" que présente Yann Barthès a décidé de diffuser sur YouTube l’intégralité des 40 minutes d’images qu’elle avait tournées au moment de la perquisition du siège de La France Insoumise. Bruno Donnet a vu dans cette démarche une nouveauté qui interroge la pratique du journalisme ...

Pour bien comprendre, il faut d’abord expliquer que tout a commencé mardi matin : en direct sur LCI, le député Insoumis Alexis Corbière s’en est violemment pris au programme de TMC qu’il accuse d’avoir manipulé la vérité : "Parce que les images, c’est celles notamment de l’émission Quotidien de Monsieur Barthès, elles sont coupées les images"

Pour mémoire, les images auxquelles Alexis Corbière fait référence, ce sont celles où l’on voit Jean-Luc Mélenchon arriver furibard devant la porte de son parti et hurler à deux centimètres du visage d’un policier chargé de lui interdire d’entrer : "La République, c’est moi !"

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Une séquence saisissante, maintes fois diffusée dans Quotidien et dans laquelle on découvre également le leader de La France Insoumise haranguer ceux qui l’accompagnent ("Enfoncez la porte, camarades") _t_enir tête au Procureur de la République et s’adresser à un flic comme à un p’tit garçon ("Eh vous le policier, j’veux plus vous voir remonter sur cette table hein !")

Bref, des images pas vraiment à l’avantage de Jean-Luc Mélenchon mais qu’Alexis Corbière récuse formellement, arguant qu’elles ont été coupées, montées, bref bidouillées, dans l’unique but de nuire à La France Insoumise. Une accusation grave, qui revient à mettre en cause l’honnêteté journalistique du programme et à laquelle la production a donc choisi de répondre, mercredi soir, en diffusant, sur YouTube, l’intégralité de la séquence, c’est-à-dire 40 minutes d’images brutes, sans le moindre montage

A ma connaissance, c’est une initiative absolument sans précédent

Jamais jusqu’ici une émission de télévision n’avait montré ses rushs au public. Mais ce qui est encore plus inattendu, c’est que 3 heures plus tard, C News, une chaîne du groupe Canal +, concurrente de TMC, a décidé de diffuser, in extenso, ces mêmes images, dans la tranche présentée par Thomas Hugues ("Et nous, à C News, on a décidé de relayer cette démarche de transparence journalistique")

Ce que Thomas Hugues évoque, c’est "la transparence journalistique". Et il a parfaitement raison de le faire car c’est bien ce qui, ici, est en jeu. Mais est-ce que diffuser des images brutes peut suffire à établir la vérité et surtout, à mettre tout le monde d’accord ? Eh bah ça, c’est pas sûr et surtout pas si simple. Car...

Que voit-on de plus, ou de nouveau, dans les images qui nous ont été montrées cette semaine ? 

De mon point de vue, pas grand-chose et si j’avais dû, moi-même, opérer une sélection et choisir dans les 40 minutes, 1 minute 30 d’images, j’aurais probablement fait à peu près le même choix éditorial... Cependant, et c’est ça qui est totalement inédit dans cet épisode, en choisissant de montrer ses rushs et donc en nous proposant d’arbitrer nous-même l’épineuse question de "qui dit la vérité", Quotidien brise ici un pacte, le pacte tacite qui existe entre un journaliste et son public et qui repose sur la confiance. Sur le postulat que le journaliste est honnête et que ce qu’il résume en 1 mn 30 est bien fidèle à ce qu’il a vu pendant des heures ! Dans un contexte de grande défiance à l’égard des médias, Quotidien accepte donc de devoir se justifier et de livrer des preuves de sa bonne foi. C’est un pas très important qui est franchi ici et qui pose deux questions : 

1/ Est-ce que ça suffit ? La réponse est non, puisqu’aujourd’hui encore les représentants de La France Insoumise estiment que le montage a été fait « à charge ». 

2/ Est-ce que c’est reproductible ? La réponse est encore une fois non car la séquence qu’a montré Quotidien, le rush, est en fait un long plan séquence, réalisé, c’est du bol, sans que le cameraman n’ait coupé un seul instant sa caméra. Qu’en sera-t-il le jour où, comme c’est généralement le cas lors d’un tournage, la caméra aura été coupée plusieurs fois ? Comment feront alors les journalistes pour prouver leur bonne foi ? En voulant faire « la transparence », Quotidien vient d’ouvrir une inquiétante boite de pandore qui sera désormais très difficile à refermer.

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La vidéo postée par Quotidien :