

Si tout est bon dans le cochon, tout n'est pas naturellement bon chez l'homme, n'en déplaise à Rousseau, surtout quand il s'occupe des cochons. Il ne s'agit pas là de balancer les porcs - quoique...- mais bien de souligner combien l'homme s'est mal comporté pendant ces dernières décennies avec ces animaux.
Qu'ils soient roses, gris ou noirs à la queue en tire-bouchon. En tout cas principalement en Occident tandis que dans nombre de pays, notamment d'Asie, c'est un animal sacré comme il l'était en Grèce antique déjà. Sous prétexte qu'il est supposé sale et que même notre langage l'utilise en le dépréciant comme une injure, il y aurait eu comme une sorte d'autorisation tacite de se mettre au plus bas niveau du respect de la condition animale.
Les chiffres sont déments : 90% des cochons vivent dans des bâtiments fermés, moins de 5% vivent sur une litière de paille et moins de 1% vivent en plein air.
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Dans les élevages industriels les truies sont maintenues dans des cases individuelles et dans des milieux appauvris leur empêchant de faire un nid et restreignant leurs mouvements malgré une Directive européenne de 2013
Les porcs à l'engraissement sont élevés sur caillebotis intégral sans apport de litière et leur interdisant ainsi de fouiller le sol. On leur coupe la queue, ou plutôt les deux si vous voyez ce que je veux dire, et on leur meule les dents quand on ne les leur coupe pas.
Dans les élevages en plein air et élevages bio, c'est une toute autre ambiance : les truies comme les porcs sont élevés en extérieur et certains passent même leur vie entière au pré. Les porcelets restent avec leur mère jusqu'à 8 semaines, la coupe de la queue est proscrite et beaucoup ont cessé d'être castrés. Avec l'entrée en vigueur au 1er janvier 2022 du nouveau Règlement européen pour l'agriculture biologique certaines pratiques vont être interdites mais d'autres vont subsister : 30% des aliments devront provenir d'exploitations bio (contre 20% actuellement), un porcelet sera défini comme un animal de moins de 35 kilos (contre 30 aujourd'hui), les bâtiments devront comporter une ouverture sur trois côtés avec une aire extérieure à tous les stades physiologiques; mais le lisier conventionnel pourra toujours être épandu sur des terres bio.
Il a fallu attendre 2015 pour que soit inscrit dans notre Code Civil que "les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité", c'est dire combien nous avions perdu ce lien nous unissant à l'animal.
C'est au consommateur de faire les bons choix en gardant à l'esprit que dans la production intensive les veaux sont élevés en batterie et interdits de pâturages, 80 % des poulets ne verront jamais la lumière du jour, qu'une chèvre sur deux est élevée en intérieur, que 2/3 de la production française de poules vivent en cage, avec parfois, comme l'a pointé le magazine 60 millions de consommateurs, à peine l'équivalent d'une feuille A4 par animal dans les élevages de lapins.
Tous les professionnels vous le diront : un cochon bien élevé - j'adore cette expression - est un cochon qui prend son temps, qui pousse lentement entre 12 à 30 mois, entre prairie et forêts. Sa nourriture est à base d'herbe, de glands, de châtaignes, de feuilles et d'un complément de céréales. C'est ainsi qu'il fera du bon gras, celui avec une teneur élevée en acide oléique comme dans l'huile d'olive.
Il nous faut redevenir copains comme cochons !
Et c'est possible ! Je pense aux porcs des vignerons Stéphane Meyer dans le Jura et Oronce de Beler en Bourgogne, au Porc Noir de Bigorre qui bénéficie d'une appellation d'origine, aux jambons exceptionnels de Patrick Duler à Saint Géry, ou ceux de Nicolas Brahic dans les terres libres du Larzac, et aussi au jambon Prince de Paris, fabriqué en plein cœur de la capitale par Yves Le Guel. Toutes les informations sont sur le site de l'émission. Alors peut-être que les bourgeois, plus ça devient gros plus ça devient bêtes, mais pour le cochon plus ça devient gros, plus ça devient bon. Et sans nul doute heureux.
Coups de cœur vins
- Jean-Louis Dutraive,
Domaine de la Grand'Cour en Fleurie
- Domaine de la Bénissons-Dieu, Côte Roannaise, Régis et Aude-Reine Anouil
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