“20 minutes”, ex-vilain petit canard dans la cour des grands ?

20 minutes fait peau neuve
20 minutes fait peau neuve ©Radio France - Frédérick FLORIN
20 minutes fait peau neuve ©Radio France - Frédérick FLORIN
20 minutes fait peau neuve ©Radio France - Frédérick FLORIN
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La semaine dernière, "20 Minutes", a fait peau neuve. Cyril Petit revient sur les évolutions du premier journal de France, un quotidien qui, pourtant, ne se vend pas ...

Cyril, cette semaine, vous nous parlez du premier journal de France : un quotidien qui, pourtant, ne se vend pas...

Il ne se vend pas car il est gratuit : c’est 20 minutes. On ne le sait pas forcément mais c’est le plus grand tirage des quotidiens français (juste devant l’autre gratuit, CNews Matin du groupe Bolloré, et devant Ouest France, premier payant). 20 Minutes, c’est plus de 910.000 exemplaires distribués, et quatre millions de lecteurs chaque jour. Enfin, chaque jour, sauf le mardi, le samedi, le dimanche, une partie des vacances scolaires et pendant un mois et demi l’été, où il n’est pas imprimé pour faire des économies et parce que son lectorat, urbain, est moins présent. Donc les annonceurs moins intéressés. Distribué dans vingt agglomérations, il est l’ami des transports où il constitue une forte part des lectures papier là où l’imprimé disparaît au profit du smartphone.

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La semaine dernière, sans bruit toujours, 20 Minutes a fait peau neuve.  

En effet, 20 Minutes a allégé sa maquette. Elaborée avec les lecteurs, via Facebook, elle a une caractéristique innovante : les couleurs ne représentent plus les rubriques classiques mais diffèrent en fonction de l’émetteur (journalistes, lecteurs ou annonceurs). Quelques marques de fabrique du gratuit subsistent : articles courts, jeux de mots dans les titres ou horoscope et... mots fléchés, auxquels les lecteurs sont viscéralement attachés.

Après tout, c’est facile d’être premier quand on offre les contenus. Le modèle gratuit publicitaire est-il viable ? 

D’autant que le marché pub de la presse ne cesse de chuter. Mais 20 Minutes, qui refuse de donner des chiffres précis, assure que l’exercice 2017 a été positif financièrement et que le résultat s’améliore. Et c’est la version papier qui porte l’essentiel des recettes pub. Pas question ainsi, nous confie-t-on, de cesser d’imprimer le journal dans les toutes prochaines années. Au contraire de l’ex-concurrent, Métro, qui a arrêté le papier à l’été 2015 avant de disparaître. 

Sur le numérique aussi, 20 Minutes joue dans la cour des grands...

En effet ! 20 Minutes a été, en 2017, dans le top 5 des marques de presse les plus consultées sur le web en France derrière Le Monde ou Le Figaro. Mais avec une stratégie 100% gratuite, aux antipodes de celles développées par les autres quotidiens qui misent quasiment tous sur un modèle mixte gratuit/payant et sur l’abonnement. “Le journalisme a un coût, une valeur et un prix” : voilà ce que défendent la plupart des éditeurs de presse, y compris sur le numérique.   

Les gratuits ont longtemps eu mauvaise presse. Est-ce toujours le cas?

On se souvient du lancement chaotique de Metro en 2002. Les journaux payants s’étaient inquiétés, voire insurgés. Un édito du Monde parle alors d’“avatar et d’avorton de la presse”, de “journal fast food”, d’”ersatz de quotidien” et même “d’insulte à la presse”. Encore aujourd’hui, C News Matin est parfois accusé de manquer d’indépendance vis à vis des intérêts du groupe Bolloré. De son côté, 20 Minutes, propriété de Sipa-Ouest France et de Rossel, se targue d’être indépendant de tout groupe financier, industriel ou commercial. Avec les confrères payants, malgré une condescendance qui persiste un peu, ça va mieux. Symbole de la reconnaissance de ses pairs : à l’automne 2017, le quotidien gratuit a été admis à l’IFCN Poynter, organisation internationale qui lutte contre les fake news. Seuls cinq médias français en sont membres, dont Les Décodeurs du Monde.

20 minutes, c’est la durée de "L’Instant M" ; c’était, au début des années 2000, le temps de lecture moyen d’un quotidien en semaine. Est-ce toujours le cas?

Avec ce titre, 20 Minutes a été précurseur dans le minutage de l’info. Cela choquait. La rubrique des brèves s'appelle même encore "20 secondes". Aujourd’hui, et pour répondre aux usages, de plus en plus de sites d’actu (ou encore La Matinale du Monde) indiquent combien de minutes prend la lecture d’un article. Pour 20 Minutes, la durée d’utilisation du journal est en 2018 de 17 minutes. Mais il est trop tard pour changer de nom...