Justine Guitton-Boussion, du magazine "Reporterre", a voulu comprendre si les smartphones d’occasion reconditionnés sont plus écologiques que les modèles neufs. Et pour ça, elle s'est rendue à Saint-Mathieu-de-Tréviers, près de Montpellier.
Justine Guitton-Boussion est allée découvrir l’usine de reconditionnement de la marque SMAAART. Là-bas, ils reçoivent chaque jour des centaines de smartphones d’occasion, qui ont été récupérés auprès d’opérateurs téléphoniques, d’entreprises, ou de gens comme vous et moi qui laissent traîner leurs vieux portables dans les tiroirs.
Elle a donc pu suivre toutes les étapes du reconditionnement d’un téléphone. D’abord, quand l’usine le reçoit, les techniciens vont systématiquement effacer ses données personnelles. Ils vont ensuite le regarder sous toutes les coutures, et lui donner une note esthétique. Par exemple, A s’il est comme neuf, B s’il a quelques rayures, ou D s’il a un écran cassé.
Le smartphone subit une dizaine de tests, pour vérifier si la batterie est en bon état, si le micro fonctionne correctement, etc. Selon les pannes identifiées, le téléphone est amené à un technicien formé pour réparer cette panne. Il attrape une pince, un tournevis, il change la pièce défectueuse et hop ! Le problème est réglé, le smartphone est comme neuf.
Acheter un smartphone reconditionné : plus écologique que de s’offrir un téléphone neuf ?
Sur le principe, oui.
Pour fabriquer un nouveau smartphone par exemple, on a besoin de lithium, d’aluminium, de cuivre, et même d’or et de platine. Les mines ont un coût social et écologique, elles polluent les sols et les cours d’eaux. Or, un téléphone neuf nécessiterait l’extraction de 44 kilogrammes de matières premières à lui tout seul, contre 4 à 10 kilogrammes « seulement » pour un smartphone reconditionné. Pareil pour les émissions de gaz à effet de serre. Un appareil neuf émettrait sur toute sa vie 56 kilogrammes de CO2, tandis qu’un modèle reconditionné n’en émettrait que 9 kilogrammes. Ce qui pèse le plus dans ce calcul, c’est la production du téléphone : plus de 75 % de son impact écologique provient de sa fabrication. Donc, si on réutilise un téléphone déjà fabriqué, c’est forcément tout de suite plus écolo.
Essayons de choisir le smartphone le plus vertueux possible
Dans l’usine où elle est allée, le reconditionnement est fait en France. Mais certaines entreprises françaises font appel à des usines de reconditionnement dans d’autres pays, ce qui fait un peu perdre le côté vertueux de la chose. Il y a aussi des market place, c’est-à-dire des sites internet qui regroupent des "reconditionneurs "du monde entier. Dans ces cas-là, si vous achetez sur ces sites, mieux vaut être attentifs à l’origine des sociétés et à l’emplacement de leurs usines : votre téléphone reconditionné peut avoir fait le tour du monde…
Développer sur tout le territoire français davantage d’ateliers de reconditionnement ?
Oui, et de favoriser l’achat de ces produits. Par exemple, le gouvernement français a annoncé son ambition d’atteindre 20 % de matériel reconditionné dans ses commandes publiques. Mais à côté de ça, il voudrait faire payer deux fois aux consommateurs de smartphones reconditionnés la « redevance copie privée » : c’est une taxe sur les appareils qui peuvent copier du contenu culturel, qui pourrait faire augmenter de 14 euros le prix des téléphones. Elle a discuté avec plusieurs "reconditionneurs" qui sont très en colère : ils ont peur que, si cette taxe était mise en place, les consommateurs se détournent du reconditionné et se disent « à ce prix-là, autant acheter du neuf ». Les députés aborderont ce sujet à l’Assemblée nationale le 25 mai prochain.
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