Derrière l’affaire Spotify, la surenchère pour les droits des papys du rock

Neil Young sur scène au Québec le 6 juillet 2018.
Neil Young sur scène au Québec le 6 juillet 2018. ©AFP - Alice Chiché
Neil Young sur scène au Québec le 6 juillet 2018. ©AFP - Alice Chiché
Neil Young sur scène au Québec le 6 juillet 2018. ©AFP - Alice Chiché
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Neil Young retirait ses chansons du service de streaming suédois. Le songwriter aux 50 albums accuse Spotify de relayer des fake news sur le Covid en hébergeant le podcast de Joe Rogan, animateur très écouté par les complotistes. D’autres artistes ont aussitôt imité Neil Young.

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Un coup dur pour Spotify qui a dévissé en bourse. Alors que la plateforme aurait payé 100 millions de dollars pour les podcasts de Joe Rogan, elle a dû promettre de s’attaquer à la désinformation pour éteindre le feu. Mais c’est aussi une mauvaise affaire pour Warner, la maison de disques de Neil Young, et pour le fonds d’investissement Hipgnosis, qui perdent ainsi 60% des royalties qu’ils perçoivent sur ses chansons grâce au streaming.

Mais que vient faire un fonds d’investissement dans cette histoire ?

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Hipgnosis, c’est un fonds d’investissement spécialisé dans la musique, créé par Merck Mercuriadis, l’ancien manager d’Elton John et de Beyonce. Il y a un an, il a déboursé 150 millions de dollars pour acheter 50 % des droits d’auteur de Neil Young et de ses enregistrements. Depuis deux ans, on assiste à une avalanche de rachats similaires : les héritiers de David Bowie ont vendu son catalogue à Warner le mois dernier pour un montant estimé à 250 millions de dollars. Bob Dylan a cédé l’ensemble de ses droits pour un total de 500 millions. Bruce Springsteen lui a récolté 550 millions.

Pourquoi ces rachats spectaculaires se multiplient-ils en ce moment ?

D’abord, parce qu’avec la pandémie, finis les concerts. Or, pour des stars de la trempe de Springsteen, ils pouvaient représenter les trois quarts de leurs revenus. Ensuite, l’administration Biden veut alourdir la fiscalité sur le capital pour les plus riches. Si vous êtes une légende du rock ou de la pop, c’est vraiment le moment de vendre vos catalogues.

Mais ce qui fait monter les enchères sur ces droits, c’est surtout la bataille qui oppose les fonds d’investissement qui sont des nouveaux venus sur le marché de la musique, aux trois grandes maisons de disque, Warner, Universal et Sony. Rien qu’en 2021, Hipgnosis a déboursé 2,5 milliards de dollars pour acquérir les droits d’artistes comme Shakira ou les Red Hot Chili Peppers. Son fondateur est convaincu que les chansons à succès sont un excellent placement avec un rendement fiable et prévisible, qui plus est résistant aux aléas de la conjoncture.

La pandémie n’a pas empêché les revenus générés par l’écoute de musique sur les plateformes de streaming de continuer à croître. Son modèle par abonnement a sauvé le marché de la musique, il lui a même permis de retrouver l’année dernière les recettes record qu’il connaissait à son âge d’or au début des années 2000, juste avant que le MP3 ne tue le CD. Alors oui, le streaming ne nourrit pas encore l’écrasante majorité des artistes, mais c’est déjà un filon pour les plus connus d’entre eux, les maisons de disques et les fonds d’investissement. A moins qu’une révolution technologique ne vienne à nouveau tout chambouler. Ou que les conflits comme celui opposant Neil Young à Spotify se multiplient. La musique n’est pas un placement comme les autres.