Ce matin dans votre édito carré : écologie, le Ministère qui fait du yoyo.
Année 1971 : Pompidou est président de la république et Jacques Chaban Delmas est son premier ministre. Et alors même que l’écologie politique n’existe pas officiellement, l’environnement fait son entrée au gouvernement. C’est Robert Poujade qui est chargé à l’époque de la Protection de la nature et de l’environnement. Il reste ministre 3 ans, 1 mois et 20 jours ce qui n’est pas mal du tout si l’on regarde la moyenne des titulaires du poste qui est de 18 mois.
En 1975 Robert Poujade publiait « Ministère de l’impossible ». Le titre de ce livre évoque à lui seul les difficultés de ce maroquin dont la place et l’importance n’ont cessé de changer.
Les aveux d’échec sont nombreux et beaucoup d’ex-ministres témoignent de la difficulté qu’ils ont eu à imposer l’environnement dans l’agenda de leurs gouvernements respectifs.
Et comment explique t-on cette situation ?
Dans son ouvrage « D’un monde à l’autre » qui vient de paraître**, Nicolas Hulot** explique que « tant que Matignon et l’Elysée ne partageront pas avec le Ministre en charge de l’écologie la vision puis la coordination de la mutation sociétale, cette dernière se révèlera impossible ». Il raconte avoir été confronté aux différents lobbies agricole, nucléaire, de l’automobile ou de la chasse qui refusaient d’abandonner leurs pratiques ou leurs modèles.
Nicole Bricq qui a été ministre socialiste de l’écologie 1 mois et 2 jours seulement en 2012 sous le gouvernement Ayrault a elle aussi fait les frais des lobbys pétroliers et gaziers en étant limogée après avoir voulu suspendre les forages du groupe pétrolier Shell au large de la Guyane.
En 2001 après 4 ans comme ministre de l’environnement Dominique Voynet déplorait les "lenteurs et lourdeurs" de la machine administrative qui "freinent" le travail gouvernemental et l’extrême difficulté de mettre en œuvre ce qui a été promis aux citoyens".
Alors comment régler le problème ?
Selon le philosophe Bruno Latour qui était l’invité de la Terre au carré la semaine dernière, « C’est le premier Ministre qui devrait être aussi Ministre de l’environnement afin d’articuler les contradictions au plus haut sommet ». Idée partagée par Nicolas Hulot qui a échoué à imposer le titre de vice-premier ministre à Emmanuel Macron.
Hulot explique qu’avec le Président Macron et son premier Ministre Edouard Philippe, « ils n’avaient pas la même conscience du niveau d’urgence, de gravité et donc forcément pas la même vision sur le périmètre du changement à opérer ».
Delphine Batho évincée elle aussi du gouvernement de Jean-Marc Ayrault en juillet 2013 après avoir émis publiquement des critiques sur le budget de son ministère évoque « un problème démocratique structurel qui s’est posé sous tous les présidents de la république et à tous les gouvernements ».
Souhaitons donc maintenant bonne chance à Barbara Pompili qui est la quatrième Ministre d’Emmanuel Macron dans la catégorie environnement et qui a déjà été obligée de rétropédaler sur sa propre loi d’interdiction des néonicotinoïdes.
La difficulté d’être ministre de l’écologie on en parle cet AM avec Nicolas Hulot.
L'équipe
- Production
- Chronique