Daniel Defoe, l'auteur dissimulé de “Robinson Crusoé”

Robinson Crusoé, gravure de 1719
Robinson Crusoé, gravure de 1719 ©Getty - The Print Collector/Print Collector
Robinson Crusoé, gravure de 1719 ©Getty - The Print Collector/Print Collector
Robinson Crusoé, gravure de 1719 ©Getty - The Print Collector/Print Collector
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Quand les Français pensent à l’île de Robinson, ils voient maintenant au premier plan “Vendredi et les Limbes du Pacifique”. C’est la réussite de Michel Tournier d’avoir retourné le mythe de Robinson en faisant de son serviteur le personnage déterminant de l’histoire.

Avec
  • Baudoin Millet Maître de Conférences en Études Anglophones à l’Université Lumière Lyon 2

Tournier, en conséquence, a été tenté de jeter par-dessus bord celui qu’il appelait « le pauvre Daniel Defoe ». C’était, disait-il, un puritain anglais qui, de surcroît, voulait jouer au gentleman. Autant dire que le monde contemporain n’a plus grand’chose à attendre de lui.

Néanmoins, même si le mythe de Robinson a échappé à son créateur,  nous restons toujours devant Defoe un peu comme devant Homère. Étonnés par ses postérités imprévisibles et cherchant tout de même à en apprendre davantage sur lui.

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Or nous en savons beaucoup. Il est né en 1660, il a atteint la soixantaine quand il écrit Robinson. Il lui en reste une douzaine à vivre qu’il occupera, comme à l’accoutumée, par maintes mésaventures financières et d’innombrables publications. On a pu faire le total impressionnant de celles-ci, on a même été bien au-delà du compte. On disposerait même de l’inventaire précis de sa bibliothèque si celle d’un ministre du culte son contemporain n’était venu la parasiter malencontreusement. Bref, Defoe est un personnage bien documenté.

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Reste un mystère. Jamais jusqu’à sa mort en 1731, il n’a voulu se reconnaître l’auteur de Robinson non plus que de Moll Flanders et de ses autres œuvres de fiction. Nombre de ses contemporains avaient percé le secret mais pour sa part, il ne l’a jamais levé. Il touchait de l’argent de la vente de ses livres mais il aurait pu tirer de Robinson, tout de suite reconnu et traduit, un « capital symbolique » qui lui aurait été utile dans les situations rocambolesque où il aimait se mettre… Eh bien non !

Pour Defoe, ce qui est vrai a une valeur morale insurpassable. Aussi s’acharnera-t-il à qualifier les Aventures étranges et surprenantes de Robinson, de récit de voyage. Il reste celui que dit Tournier : un puritain qui, lorsqu’il se commet avec la fiction, ne s’en vante pas.

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