La Belle Époque

La Belle Époque
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À partir de quand les années 1900 ont-elles paru belles à ceux qui les avaient vécues et comment nous les ont-ils fait regretter à nous qui ne les avons pas connues ? Jean Lebrun s'entretient ici avec Dominique Kalifa, historien et auteur.

Avec
  • Dominique Kalifa Historien, professeur d'histoire contemporaine à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Cléo de Mérode, avant la Première Guerre, avait été une grande professionnelle de la danse. C’est du moins ce qu’il convenait de dire : elle intentait un procès dès qu’on soutenait qu’elle avait aussi été une "cocotte". Après la Seconde Guerre, elle était devenue une professionnelle du témoignage. Dès qu’on voulait parler du début du XXe, on se tournait vers elle et quelques autres survivants du même milieu, on remontait la manivelle du phono et hop, surgissaient les fantômes du Moulin Rouge et de Maxim’s. Peut-être les journalistes sont-ils paresseux ? Ou bien le souvenir des professionnels du loisir est-il nécessaire à la mémoire populaire ?

C’est à se demander si, eux aussi, les historiens ne croient pas aux mythes. Les nécessités de la demande leur font souvent reprendre l’expression de « Belle Époque ». Certes ils s’interrogent doctement sur la fixation chronologique de ses débuts. L’Affaire Dreyfus, 1898 l’année antisémite avec des incidents dirigés contre les juifs dans tout le pays, était-ce déjà la Belle Époque ? Certes, font-ils remarquer avec bon sens, l’époque n’était pas belle pour tout le monde…

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Les contemporains, en tout cas, ne la voyaient pas comme telle et ne prévoyaient pas qu’ils la verraient plus tard comme telle. Le charme du passé, c’est qu’il est une catégorie du présent, il est vivant puisqu’il se transforme avec nous. Un autre témoin de l’époque, Roland Dorgelès, dit cela très bien.

La vraie question est donc de savoir à partir de quand les années 1900 ont paru belles à ceux qui les avaient vécues. On répondra que c’est l’effet naturel du vieillissement des témoins : ils regrettaient leur jeunesse. Oui, mais comment nous l’ont-ils fait regretter, à nous qui ne les avons pas connues ?

Pour en savoir plus

L'émission du 3 janvier 2013, Les Scandaleuses de la Belle Époque.

La musique

  • Prenons un vieux fiacre, par Jacques Pills sur l'album Contre ta joue (du film Marie la Misère)  
  • Ah la belle époque ! par Robert Burnier, dans l'opérette La Poule (1936)