La première loi anti-casseurs de 1970

Gendrames devant l'Ecole des Beaux-Arts à Paris pendant les évènements de Mai 68 à Paris
Gendrames devant l'Ecole des Beaux-Arts à Paris pendant les évènements de Mai 68 à Paris ©Getty - Michel FOLCO
Gendrames devant l'Ecole des Beaux-Arts à Paris pendant les évènements de Mai 68 à Paris ©Getty - Michel FOLCO
Gendrames devant l'Ecole des Beaux-Arts à Paris pendant les évènements de Mai 68 à Paris ©Getty - Michel FOLCO
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Le mot « casseur » flatte la prétention de qui le prononce. Surtout quand il peut ajouter d’un ton martial : « Les casseurs seront les payeurs ». C’est ainsi qu’aujourd’hui, comme en 1970, on parle de loi anti-casseurs.

Avec
  • Jean-Marie Delarue Président de la Commission Nationale Consultative des Droits de l'Homme (CNCDH), ancien contrôleur général des lieux de privation de liberté.

  Le mot « casseur » flatte la prétention de qui le prononce. Surtout quand il peut ajouter d’un ton martial : « Les casseurs seront les payeurs ».

  C’est ainsi qu’aujourd’hui, comme en 1970, on parle de loi anti-casseurs. Sans que soient désignés à l’opinion publique et au jugement de l’histoire les responsables de ces textes.

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  Il est vrai que leur identification est difficile.

  Cette année 2019, l’origine du texte est à chercher dans une proposition de loi déposée par le sénateur LR Retailleau. Elle a été relevée et modifiée par le gouvernement d’Edouard Philippe qui l’a fait voter par l’Assemblée. 50 députés macronistes l’ont refusée car ils la trouvaient trop antilibérale. Bruno Retailleau, le père putatif, l’a reconnue tout en la considérant comme trop libérale. Ce jour, le Senat renoncera à la discuter et la laissera passer telle quelle. C’est ainsi qu’à l’issue d’on ne sait pas bien quelle GPA – gestation par autrui – cette loi arrivera à son terme. Sauf que le président de la République lui-même ne semble plus  si sûr de s’y retrouver puisqu’il a annoncé en Conseil des ministres qu’il la soumettrait de son propre chef  au Conseil Constitutionnel.

  En 1970, le recours au Conseil Constitutionnel n’était pas établi comme aujourd’hui mais le Sénat jouait davantage son rôle de défenseur des libertés publiques. En tout cas, on n’identifiait pas beaucoup mieux les auteurs de la loi anti-casseurs de l’époque. Elle avait été préparée par le Garde des Sceaux, le centriste René Pleven, un grand de la France libre, mais elle servait les intérêts du ministre de l’Intérieur, le très réactionnaire Raymond Marcellin.  Elle avait été défendue par le Premier ministre Jacques Chaban-Delmas mais, en réalité, elle correspondait beaucoup plus aux conceptions du président Pompidou. A cette époque, les deux têtes de l’exécutif s’éloignaient de plus en plus. Chaban voulait une nouvelle société, Pompidou était d’abord préoccupé de l’ordre, de la sécurité et de la prospérité des honnêtes gens. Pompidou cultivait la majorité qu’il avait constituée tandis que Chaban voulait l’élargir. C’était une suprême habileté du président de faire monter en première ligne pour défendre un texte qui empêchait l’ouverture ceux-là mêmes qui, sans son camp, la souhaitaient.