C’était un pauvre village du Gévaudan. On peut y arriver par un autocar improbable venu de la gare de Saint Chely d’Apcher. Ou bien à pied...
- Eric Favereau Journaliste à Libération
C’était un pauvre village du Gévaudan. On peut y arriver par un autocar improbable venu de la gare de Saint Chely d’Apcher. Ou bien à pied. Comme l’a fait en 1940 le docteur Tosquelles, que vous venez d’entendre. On ne le comprend pas bien mais, avec de l’attention, on l’entend. Et ce qu’il va dire et faire à Saint-Alban mérite l’attention…
C’était un hôpital psychiatrique. Un décret de 1937 avait imposé le mot. Réfugié républicain catalan, Tosquelles préfère dire : asile. Asile signifie hospitalité. Et vers Saint-Alban, en ces années de guerre, convergent les déplacés de Ville-Evrard puis bien des personnes qui ont besoin d’un refuge. On a dit de la Lozère de cette époque qu’elle était devenue un jardin d’Israël. Tristan Tzara, Georges Sadoul, Denise Glaser se sont dissimulés à Saint-Alban. Et, l’hiver 43-44, Paul Eluard avec sa femme, Nusch. Les résistants se récitaient alors le poème qu’il avait voulu lui dédier mais où il avait finalement remplacé son nom par le mot « liberté » : « Sur mes cahiers d’écolier /sur mon pupitre et les arbres/ Sur le sable et la neige/J’écris ton nom… »
A Saint-Alban, la guerre puis l’occupation avaient brouillé les vieilles frontières. Il n’y avait plus d’un côté, eux, et nous, de l’autre. Les hommes libres ne l’étaient plus vraiment, les malades à certains égards l’étaient davantage. La folie pouvait dire son mot. Les circonstances permettaient de jeter sur la table des hypothèses nouvelles. Et si une autre conception de l’institution-hôpital pouvait être une part déterminant du traitement ?
Ainsi, dans un des plus beaux départements de France, se formula une des plus belles expériences de la psychiatrie.
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