Comment va se dérouler le déconfinement ? Cette question domine dans la presse dominicale, qui fait état de multiples inquiétudes, notamment pour les usagers des transports et les élèves qui retourneront dans leur établissement le 11 mai. Nos façons de travailler, et même de nous saluer, pourraient en outre changer.
On va enfin arrêter de s’embrasser sans arrêt !
C’est l’actrice Macha Méril qui se réjouit ainsi dans La Dépêche du Dimanche. Fini, la bise à tout bout de champ, y compris pour saluer des gens que l’on connaît à peine. Chez nous, c’est deux ! Chez nous, c’est trois ! Chez nous, c’est 4 ! Oui, ça dépend des régions. Mais, bientôt, toutes seront sans doute logées à la même enseigne. Macha Méril a raison : à cause de la pandémie du coronavirus, il est probable qu’à l’avenir, on n’embrasse plus que les intimes.
Dès lors, plus de bise au boulot. Et ce n’est pas le seul changement à prévoir dans les entreprises, comme l’explique Emmanuelle Souffi dans Le Journal du Dimanche. A cause du Covid-19, de nombreux espaces de travail vont devoir être repensés, pour limiter les risques de contagion.
On pourrait assister à la fin des open space
Dans le pays, un tiers des actifs partagent aujourd’hui leur bureau, dont 12% avec plus de dix personnes. Çà et là, trainent des dossiers, des souvenirs de vacances, des photos des enfants. Or, ces lieux-là passent désormais pour de véritables nids à microbes. Osera-t-on même encore proposer à ses collègues d’aller prendre un crème à la machine à café ? Peut-être, mais en restant à distance. Et, sans cesse, on dira : "Dis, tu veux bien te reculer ?"
Voilà donc comment ce matin, les journaux nous racontent ce que sera le monde d’après la pandémie. Mais ils nous parlent aussi du monde d’aujourd’hui, notre monde confiné avec, tout à la fois, ses nuits noires, sa dureté, et ses rayons d’humanité.
La dureté des chiffres, d’abord : hier soir, le bilan en France faisait état de 22 614 morts. Mais les décès à domicile ne sont toujours pas comptabilisés. Le principal syndicat des généralistes a mené une étude auprès de 2 300 médecins. En ressort une estimation.
Environ 9 000 personnes seraient mortes chez elles du coronavirus entre le 17 mars et le 19 avril
Selon le JDD, s’appuyant sur des sources administratives, il faudrait vraisemblablement multiplier par deux le bilan officiel afin d’être au plus près de la réalité, soit déjà 40 000 morts d’après les premières projections.
Sur Médiapart, on lit l’enquête de Lou Syrah : les coulisses de la morgue géante de Rungis, vaste et ancien hangar géré par une société funéraire. Loin des caméras, lieu interdit aux journalistes, plus de 1 300 défunts y ont été entreposés. Ils y restent entre 6 et 10 jours en moyenne, avant d’être inhumés ou de passer à la crémation. Les cercueils sont déplacés en transpalettes. Les images sont violentes.
On se console à la lecture des témoignages des guéris… L'actrice Mylène Demongeot dans Monaco Matin. Elle a eu très peur, mais "ce n’était pas mon heure", dit-elle.
La solidarité tient encore, ce matin, sa place dans les journaux. C’est ainsi que Le Bien Public nous raconte le parcours d’hommes et de femmes qui ont choisi de changer de métier pour participer à la lutte contre le virus – ce virus dont on se demande s’il ne s’est pas échappé accidentellement d’un des centres de recherche de la ville chinoise où il est apparu. Il faut lire à ce propos l'enquête du Monde dans "la jungle des labos de Wuhan".
Mais revenons au Bien Public, qui nous présente donc trois agents du CHU de Dijon.
Jacques, Florence et Stéphane ont changé de métier le temps de la pandémie
Jacques, 56 ans, travaille en temps normal au service planification d’une société de fabrication de machines. Depuis plusieurs semaines, il prête main forte à la blanchisserie de l’hôpital dijonnais. Florence, 44 ans, est kinésithérapeute. Depuis plusieurs semaines, elle prête main forte pour le transport des patients. Quant à Stéphane, météorologue de profession, il s’occupe aujourd’hui du filtrage des gens à l’accueil.
De son côté, L’Alsace nous présente d’autres bénévoles, qui se démènent pour apporter des repas aux personnes isolées dans les petits hameaux. Politis nous présente des jeunes des quartiers de Sartrouville qui se démènent pour faire les courses des personnes âgées. Ces jeunes et ces moins jeunes sont nos rayons ce matin.
Sachant qu’ils sont rares, les rayons, quand on est confinés. Du coup, même les plus banales corvées du quotidien deviennent pour certains des moments quasi festifs : faire ses courses au supermarché, étendre son linge, faire un flan et le réussir, sortir son chien et enchaîner en sortant les poubelles… Réjouissant papier du Monde sur le sujet. On peut y lire la déception d’une sexagénaire découvrant que les poubelles de sa résidence avaient déjà été vidées. "C’était mon tour !" s’est-elle offusquée dans les échanges WhatsApp des habitants de l’immeuble. Le journal a sollicité le regard d'un prof de yoga.
Il s’est développé une sorte de mystique de l’ordinaire.
Il est aussi question du déconfinement dans la presse.
L'organisation du déconfinement
Une opération plus difficile encore que de réussir un flan. On saura tout mardi, tout du dispositif qui commencera le 11 mai. "Philippe sera à l’heure", prévient Le Journal Du Dimanche. Philippe : Edouard Philippe, le Premier ministre, qui viendra présenter son plan à l’Assemblée devant les députés. Un plan en six points : réouverture des écoles, réouverture des commerces, reprise du travail, santé publique, relance des transports publics et autorisations des rassemblements dans les lieux culturels et de cultes.
Pour chaque sujet, des dates et des consignes précises seront données, validées demain par le président de la République et, par la suite, mises en œuvre en collaboration avec les élus locaux – les maires, en premier lieu. "Déconfinement : deux jours pour être clair", annonce l’hebdomadaire.
Mais la clarté promise n’empêche pas les inquiétudes, et celles-ci sont nombreuses.
Inquiétude pour les protections : selon une note de Bercy, il n’y aura pas assez de masques grand public le 11 mai.
Inquiétude pour les usagers des transports publics, et c’est à lire aussi dans Le Parisien.
« Métro, bus, tramway : l’angoisse du déconfinement »
Le journal a mené l’enquête et constaté qu’en Ile-de-France, les conditions de sécurité étaient loin d’être réunies. Alors qu’on est encore en période de confinement, des lignes sont déjà saturées aux heures de pointe.
Inquiétude, enfin, pour les écoliers : hier soir, on a appris que le Conseil scientifique avait préconisé la fermeture de tous les établissements scolaires jusqu’au mois de septembre. Une recommandation qui, finalement, n’a donc pas été suivie. Un sourire, malgré tout, enfin demi-sourire, grâce à ce savoureux dessin publié dans Le Point : c’est une mère qui s’adresse à son fils, prêt à retourner en classe.
Ton goûter, tu le préfères au doliprane ou à la chloroquine ?
Est-ce que ce sera vraiment ça, "le monde d’après" ?
Une chose est sûre : dans le monde actuel, pour moi, c’est un grand jour. Ce dimanche, c’est mon tour de sortir les poubelles.
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