Quand on écoutait Michel Serres, la vie devenait plus colorée, plus gaie

France Inter
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Ce matin, toute la presse rend hommage au philosophe Michel Serres, décédé hier à 88 ans. On salue à la fois sa carrière et son caractère résolument optimiste... A la Une également, un sujet politique : le plan du chef de l'Etat pour "achever la droite" (LE JDD), laquelle doit "reconquérir son électorat" (LE PARISIEN).

Mesdemoiselles, Messieurs, écoutez-bien car ce que vous allez entendre va changer votre vie… 

Voilà comment Michel Serres avait l’habitude de commencer ses cours, et, en effet, il arrivait parfois qu’en l’écoutant, l’existence de ses élèves se modifie. « Elle était tout à coup plus colorée, plus gaie », lit-on sur le site du MONDE dans un sensible portrait du philosophe mort hier à l’âge de 88 ans. 

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Toute la presse lui rend hommage ce matin. Notamment LE PETIT BLEU D’AGEN, Agen où il était né en 1930. Sa photo pleine page à la Une. Il aimait sa région, et la ville est en deuil, souligne le journal… Sur LE HUFFINGTON POST, récit de sa dernière intervention médiatique. C’était dimanche dernier, dans l’émission Questions Politiques sur France Inter… L’occasion, pour lui, de livrer son regard éclairé sur l’état de la société… Un regard qui tordait le coup au déclinisme ambiant.

Si vous regardez globalement ce qui se passe depuis 10, 20, 100 ans, disait-il, la violence ne cesse de baisser...  

Sans cesse, le philosophe nous rappelait l’importance de reconnaître le bonheur quand il est là

Celui de vivre dans un pays en paix, comme celui, tout simple, d'être en bonne santé.

Nous sommes si nombreux à nous contenter d’avancer un pied devant l’autre, sans même nous étonner de ce petit miracle matinal ...

Michel Serres souriait encore l’hiver dernier lors d’une rencontre avec des classes de maternelle… Un enfant lui a demandé : « C’est quoi, ton projet en ce moment ? » Réponse de l’académicien : « Peut-être que je vais disparaître dans quelques temps… Alors, en ce moment, j’essaie d’écrire mon dernier livre. » Ce sera Morales espiègles, paru en février, nous rappelle LE PARISIEN. 

Mais c’est bien sur le site du MONDE qu’on trouve ce matin le récit le plus complet de sa belle carrière au service des idées… L’école navale puis l’ENS, l’amour pour les mathématiques, la musique, le rugby, Tintin, ses enseignements aux Etats-Unis, l’écriture de 80 livres, dont les best-sellers Les Cinq Sens, Petite Poucette, Le gaucher boiteux… 

On évoque également son accent rocailleux, et son tempérament. C’est toujours sur le site du MONDE.

« C’était un philosophe comme on en fait trop peu, un bon vivant doublé d’un mauvais caractère, un amoureux des sciences et des saveurs, un esprit encyclopédique, un prodigieux manieur de mots, un touche-à-tout de génie, un maître plutôt qu’un professeur, un arlequin, un comédien… » 

Et, surtout, surtout, Michel Serres était gai. Ou, du moins, il faisait très bien semblant de l’être… 

Faire semblant d’être gai. Comme une leçon de vie.

Il était également très sensible à l’écologie, et justement, on parle d’environnement dans la presse… Avec, là aussi, quelques raisons d’être gai… 

Un dossier dans L’EXPRESS, qui met en avant les initiatives de cinq métropoles françaises : Bordeaux, Lyon, Toulouse, Nantes, Issy-les-Moulineaux… 

Des villes qui misent sur le numérique pour réduire la consommation d’énergie, en favorisant le bien-être des habitants

Ici, c’est une application permettant d’éviter les bouchons… Là, une application permettant de trouver une place de parking – les automobilistes qui cherchent à se garer représentent 5 à 10% du trafic urbain… Ici, des capteurs qui détectent les fuites sur les canalisations… Et là, des lampadaires connectés dont l’intensité lumineuse n’augmente qu’à l’approche des véhicules et des piétons. 

Une autre initiative sur le site UZBEC & RICA…. Cette fois, ça se passe en Inde, et c’est un nouveau modèle de récupération des funestes particules fines, dégagées notamment par les pots d’échappement et les cheminées des usines. Une pollution de l’air qui, selon les derniers rapports sur le sujet, provoquerait plus de 7 millions de morts par an – c’est la sixième cause de décès dans le monde… Mais en Inde, donc, une société a trouvé une façon de les recycler : après filtrage, elle les transforme en encre noire… De l’encre pour les stylos et les marqueurs et qui, à l’avenir, pourrait être utilisée pour imprimer les journaux, ou encore pour la coloration des textiles.  

Elle, ce n’est pas à l’encre, mais au crayon qu’elle dessine…  

Portrait d’une courageuse dans M, LE MAGAZINE DU MONDE

Elle a 35 ans, s’appelle Amani Al-Ali… Elle est syrienne et elle habite à Idlib, la dernière zone du pays encore tenue par l’opposition… Une ville pilonnée sans relâche par les forces pro-gouvernementales depuis un mois… Et c’est cette guerre que dessine la jeune femme. Voilà maintenant trois ans qu’elle passe ses journées à caricaturer le régime de Bachar Al-Assad, mais aussi les groupes djihadistes présents dans la région… Des croquis souvent teintés de noir et de rouge, les couleurs de l’obscurantisme et du sang… Ces coups de crayon contre les bombes, elle les partage sur Facebook et sur un site d’info en ligne… 

Certaines de ses caricatures ont même été exposée en Angleterre, lors d’une rétrospective sur la révolution syrienne… Mais depuis quelques temps, Amani Al-Ali reçoit des menaces de mort venue de partisans de Bachar Al-Assad… Elle ne sort plus de chez elle qu’accompagnée par son père ou son frère et espère pouvoir bientôt quitter la Syrie. Rester ici, confie-t-elle, « ce n’est pas une vie »… La dessinatrice d’Idlib a l’intention de demander asile à la France… 

Je sais que les Français aiment bien les artistes ! » 

Cette dernière phrase, elle la prononce sur le ton de la plaisanterie.

La France est-elle encore une terre d’accueil ? On se pose la question, ce matin, à la lecture d’une lettre ouverte adressée au Préfet de Côte-d’Or…  Lettre publiée sur un blog hébergé par MEDIAPART, et qu’évoquait hier matin LE BIEN PUBLIC…

L’histoire de Guimba, un Malien de 20 ans scolarisé dans un lycée professionnel de Dijon

Depuis trois ans, il y apprend le métier de boulanger-pâtissier. Mais la semaine dernière, il a reçu de la préfecture une obligation de quitter le territoire. Guimba ne s’y attendait pas. Ses camarades et ses professeurs non plus, et ils se mobilisent pour empêcher l’expulsion de, je cite, « cet enfant qui aurait bien pu être le vôtre, monsieur le préfet ». Ils espèrent de ce dernier qu’il annule sa décision.

D’autres sujets très politiques font la Une de la presse dominicale… 

Photo du chef de l’Etat pleine page dans LE JDD… Il apparaît de profil, mains jointes et visage satisfait… Le titre, c’est : « Son plan pour achever la droite »… Et dans LE PARISIEN DIMANCHE, cette fois, c’est une photo de Laurent Wauquiez. Il apparaît de profil, mais le regard baissé, la mine déconfite… Et le titre dit à peu près la même chose que le précédent.

« Droite cherche électeurs désespérément »

Dans les deux journaux, ce sont donc les tourments - on peut même parler de crise ouverte - chez Les Républicains. Aujourd'hui, nous dit-on, les macronistes traquent les barons de la droite en vue des prochaines élections municipales… Pour preuve, les propos d'un ministre dans le JDD :  Sébastien Lecornu il appelle les maires de droite à quitter le parti de Laurent Wauquiez. Un appel déjà suivi par plusieurs d’entre eux… 

Enfin, revenons à la matière de prédilection de Michel Serres, avec cette question dans le mensuel PHILOSOPHIE MAGAZINE, question qui, à première vue, peut sembler incongrue…

Pourquoi mâchons-nous du chewing-gum ?

"Pour s’aider à penser", aurait sans doute dit Érasme… Pour passer le temps", aurait pu répondre Cioran… Quant à Aristote, il observait, je cite, que « Tous les animaux qui ruminent prennent autant profit et plaisir à ruminer qu’ils en prennent à manger »… 

Conclusion : si l’on mâche du chewing-gum, ce serait, avant tout, par plaisir gustatif… Dès lors, que l'on en mâche ou pas, n’oublions pas notre plaisir et, ce matin, n’oublions pas non plus les leçons de vie de Michel Serres… 

Malgré les malheurs du monde, soyons gais ou, du moins, faisons donc semblant d’être gais !

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