50.000 militants ultras veulent renverser la République, dit le Président Macron à la presse, elle s’en moque.

France Inter
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Entre Mediapart qui accentue l’affaire Benalla et un journalisme politique de petit salon qui prend le café à l’Elysée, est-ce le même métier? Eric Rochant s’inquiète pour la France dans l’Opinion, Marianne raconte la réinsertion des jeunes hors système, le Monde me dit que le couscous toque à la porte de l’UNESCO.

On commence par une menace...

Je la lis dans Libération et sur le site de Paris Match. "Quelques dizaines de milliers de militants  actifs" d'extrême gauche et d'extreme droite, dit Libération, pilotent et récupèrent les manifestations des gilets jaunes les samedis, afin de « provoquer une crise de régime»; ce sont  «40 à 50.000 militants ultras qui veulent la destruction des institutions», lis-je dans Paris-Match, toujours entre guillemets, et ces mots sont du Chef de l'Etat, Emmanuel Macron, qui les a tenus hier devant des journalistes invités à l’Elysée, mais étrangement, ils ne font ni la Une ni les gros titres; et l’avertissement du Président se noie dans des articles de longues paraphrases sur une aimable rencontre  entre un Chef de l'Etat bavard et des confrères passifs. Et les mots les plus graves s'envolent ainsi dans les journaux comme bulles de savon... 

L'article de Paris Match commence ainsi...  

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« «J’ai beaucoup appris de ces vingt mois. Ca m’a scarifié.» Se redressant sur le canapé de son bureau à l’Elysée, Emmanuel Macron  (…) col roulé noir sous un costume gris, reçoit cinq journalistes ce jeudi 31 janvier en fin de matinée pour une «discussion informelle» autour d’un café. »

Et ce style est celui  d'un journalisme politique qui délaisse l'intérêt public pour muter en journalisme de cour ou de petit salon; ce sont quasiment les mêmes  anecdotes de la page 10 de Libération à la page 5 du Figaro, où l'on apprend que le président promet une "conversion personnelle" en matière de petites phrases, d'ailleurs dit Libération, Mme Merkel lui a dit à Aix-la-Chapelle de ne plus aller vers les passants qui  l'apostrophent, "une folie"... 

Rassuré par cette sagesse, je tourne les pages et surprise! Page 12 de Libération, page 10 du Figaro, le même chef de l'Etat me hurle d'autres mots. “Tu vas les bouffer. T’es plus fort qu’eux, c’est pour ça que je t’avais auprès de moi." Teneur d'un message qu'Emmanuel macron aurait envoyé à Alexandre Benalla le 25 juillet dernier, est-ce le même Président, sont-ce les mêmes journaux...

Ce message à Alexandre que l'Elysée dément, on le trouve d'abord dans l'article mis en ligne hier sur Mediapart, né de l'enregistrement d'une conversatiion entre Benalla et son ami Vincent Crase, le 26 juillet, en violation de leur controle judiciaire note Mediapart, et dans cette conversation, non seulement Benalla se vantait du soutien du patron, "il fait plus que nous soutenir, Il est comme un fou" mais on entendait aussi Benalla et Crase évoquer leurs affaires avec un oligarque russe proche de Vladimir Poutine dont les deux hommes devaient organiser la sécurité des propriétés en france... 

Et ce que révèle Mediapart nourrit un scandale politique… Mais dans les rubriques politiques, on débriefe un café et on ne sait même pas, dans les mots du président, souligner le risque ou le fantasme d'une guerre civile qu'il semble envisager... Est-ce le même métier, si l'on ne sait même pas prendre au sérieux les mots d’un chef d’Etat? 

On aurait pu aussi commenter ces autres propos que seul Le Point rapporte, qui a eu l'oreille fine au café, sur la conception de l'information du Président, que les media déçoivent. « Le bien public, c'est l'information. Et peut-être que c'est ce que l'État doit financer », dit-il,  et il poursuit: « Le bien public, ce n'est pas le caméraman de France 3, c'est l'information sur BFM, sur LCI, sur TF1, et partout. Il faut s'assurer qu'elle est neutre, financer des structures qui assurent la neutralité. Que pour cette part-là, la vérification de l'information, il y ait une forme de subvention publique assumée, avec des garants qui soient des journalistes... » Et cette idée d'une vérification financée par l'Etat qui superviserait toute la profession, s'appelle une mise sous tutelle, cela vaudrait un long et puissant débat bien au-delà du café, et cette question, qu'aurait fait, cette tutelle, à Mediapart ce matin?  

Un cinéaste s'inquiète du pays... 

Et son inquiétude se remarque dans l'Opinion, qui interroge Eric Rochant, le quel veut contribuer au grand débat national, il veut aider le Président et se montre lucide: « Macron  a tué les oppositions raisonnables et se retrouve avec les extrêmes. Or l’extrémisme, c'est la violence, c'est la radicalité », et Rochant s'angoisse des violences  et elle est intéressante, cette interview d’un cinéaste au discours modéré, dont le premier film, " Un monde sans pitié", montrait un jeune homme qui refusait la société et les discours des vainqueurs, "qu'est ce qu'on nous a laissé" disait Hippolyte Girardot qui n’aurait pas été macronien.

Marianne raconte les jeunes hors système, génération sacrifiée de trois millions d’enfants dont certains se réinsèrent dans une association d’Alès...  Le chef Thierry Marx  veut former les galériens à la cuisine, « votre passé ne m'intéresse pas » leur dit il...

Le journalisme est d'abord ce qui raconte la vie des gens... Ce sont les unes du Parisien, de Libération, de Sud-Ouest, qui parlent des autoroutes car les péages augmentent, lisez, vous saurez où. Pendant ce temps, on supprime des TGV en Lorraine et les usagers renâclent, c'est dans le Républicain lorrain.

On parle de collectionneurs enfin...

Et nous méritons la part de rêve que nous offre la Vie... Qui raconte les cabinets de curiosité, ces collections hétéroclites nés au XVe siècle quand dans les chateaux de la renaissance, on croyait pouvoir appréhender le monde dans un bric-à-brac, et qui se poursuvent aujourd'hui, chez Eric Poindron qui vit au milieu de 20000 livres , d’une fiole de sang de dragon, d’une licorne rouge, de trèfles à quatre feuilles, et de boules de cristal. Il n'y a dans le désordre de son logis que son plaisir et sa poésie... 

Dans Ouest France une autre collectionneuse a trouvé son bonheur à l'hôtel des ventes de la Roche sur Yon. Céline pour 3000 euros a raflé un chapeau, un fedora blanc que porta Michael Jackson et qu'il signa, « All my love, Michael Jackson », et un autre chapeau, noir, au nom du chanteur brodé à l'intérieur, 800 euros, vinyle de Thriller dédicacé par l’artiste. Elle a appelé sa banquière avant de faire ses folies, le bonheur se discute-t-il?

Dans le Monde se raconte un bonheur qui est aussi une dispute; Le couscous, dans toutes ses métamorphoses, va être proposé par les pays du Maghreb réunis pour entrer au patrimoine immatériel de l'Unesco... Et ce ne fut pas simple car d'Algérie, du Maroc, de Tunisie ou de Mauritanie, on parle du même plat mais de saveurs différentes, et l'on peut se battre dans les cuisines multiculturelles, faut-il ajouter du raisin... Ce sont les français qui ont inventé le couscous royal aux quatre viandes, merguez incluse…

Dans Sud-Ouest, j'apprends que la France veut faire classer par l'Unesco le phare de Cordouan, un choix du Président qui ne prend pas seulement des cafés mais a choisi ce phare planté à l’embouchure de l'estuaire de la Gironde... Une vigie dans les temps troublés.