Le Monde raconte l'origine de nos drames, la fatwa contre Rushdie qui annonçait les morts de Charlie, l'assassinat de Samuel Paty. A propos d'un film sur un républicain espagnol caché, le Figaro rappelle la prière de la maman d'un acteur: "Que Dieu ne m'envoie pas toutes les souffrances que je suis capable d'endurer."
On parle d'un homme humilié...
Humilié, apeuré et seul, et qui se reniait pour avoir la vie sauve, et qui, son geste accompli, allait vomir aux toilettes, écoeuré de lui-même...
Vous lirez dans le Monde une histoire vieille de trente ans mais qui dit notre présent... L'histoire de Salman Rushdie, grand écrivain de langue anglaise, né en Inde, qui avait écrit un livre fantastique, les versets sataniques, plein d'admiration pour le prophète de l'Islam, mais dont une folie s'était emparée, une chaine de prédicateurs islamistes de manifestants enfiévrés et de puissants pousse-au-crime, l'ayatollah Khomeini, guide spirituel de l'iran avait mis à pris la tête de celui que des foules appelaient Satan Rushdie...
Alors, pris dans un guêpier planétaire, si peu soutenu par les gauches progressistes qui jusque là étaient sa famille, Rushdie s'était rendu dans un commissariat de Londres, à la veille de Noel en 1990; il avait fait amende honorable devant des notables musulmans qui ensuite interviendraient auprès de l'Iran pour que la fatwa qui le condamnait à mort soit levée... Il avait vomi après sa reddition qui resta lettre morte... De années plus tard, son traducteur japonais serait abattu. Et cette affaire Rushdie fut la première d'autres tragédies identiques, quand des "colères farfelues" nées de dessins innocents amèneraient des êtres perdus devenus djihadistes à décimer la rédaction d'un journal ou à tuer un professeur d'histoire...
Et quand nous subissons encore le traumatisme de l'assassinat de Samuel Paty, dont Mediapart raconte minutieusement le chemin vers la mort, quand le Un réfléchit à notre confrontation avec l'islamisme, quand notre Thomas Legrand est interrogé dans l'Opinion sur les fractures des gauches entre la Défense de l'opprimé et l'émancipation laïque, il en a réalisé un documentaire diffusé ce soir sur LCP, quand le site de l'Obs donne au ministre de l'Education jean-Michel Blanquer et à nous profitable leçon sur ce que sont les théories intersectionnelles dont il a fait un diable universitaire -c'est une belle visite qui raconte l'étude cumulées des discriminations.. Quand Charlie Hebdo qui jamais ne désarme, moque à sa Une le président Turc Erdogan croqué en poussah égrillard en slip qui soulève la longue robe d'une fausse bigote aux lèvres peintes et rit "ouuh le prophète" en regardant les fesses de sa Madelon venue lui servir à boire... Il est partout Erdogan et même me dit l'equipe derrière l'équipe de football de Basaksehir que le PSG affronte aujourd'hui à Istanbul -mais l'identité qatarie des propriétaires du club parisien désarmerait les tensions...
Bref... Quand par nos journaux nous réfléchissons... Il est bon, par le Monde de redécouvrir l'origine de nos drames... Rushdie, qui a survécu, dit ceci de son aventure. "C'est comme dans "les Oiseaux" de Hitchcock, vous vous dites , c'est juste un oiseau, c'est quand le ciel est rempli d'oiseaux furieux que vous pensez, ah oui, cet oiseau annonçait quelque chose, il n'était que le premier..."
On parle aussi d'une prière...
Et lisant Rushdie, je l'avais en tête, une sombre prière que se murmurait jadis une femme espagnole brave et analphabète, et que son fils, superbe acteur, nous dit dans le Figaro: "
Ainsi psalmodiait la maman d'Antonio de la Torre, quand l'Espagne vivait sous Franco dans l'étouffement d'une dictature politique et morale, et des espagnols avaient alors, nous dit de La Torre, "inventé un langage de secret pour évoquer la terreur sans la dire..."
L'acteur De La Torre est le Depardieu ibérique me dit le Figaro -il aime d'ailleurs beaucoup notre Gérard et a passé un beau moment avec lui en tournant jadis un film sur la fédération internationale de foot qui n'est sorti qu'en dvd, c'est de la vie tout ça... Mais si ce bon vivant nous dit la prière de sa maman, c'est à propos d'un film qui sort aujourd'hui, "Une vie secrète" qui conte une histoire vraie, celle d'un homme, républicain espagnol qui en 1939, à la défaite de son camp, se cache chez lui pour échapper à la vengeance des vainqueurs dans un village méfiant et passe ainsi des années derrière une cloison à retenir son souffle et çà vieillir, le teint pâle, à "suinter la peur et l'angoisse" dit la Croix; on appelait en Espagne "les taupes" ces reclus.. Une taupe, comme longtemps Rushdie.
"Que Dieu ne m'envoie pas toutes les souffrances que je suis capable d'endurer..." Cette supplique me revient de manière incongrue, quand le Président Macron s'apprête à faire de nous des confinés reclus pour notre santé... et on lit dans le Figaro encore, et les Echos ce que les entreprises redoutent de ce nouvel arrêt, mais on lit sur le site de Libération la colère d'un médecin écrivain, Christian Lehmann, qui rage contre les évitements, les habiletés de langue, qui ont retardé le reconfinement indispensable, car toute hésitation se paye au prix de la vie...
Nous voilà donc confinés tout à l'heure sans doute. Et revient alors une sensation de bascule. nos journaux dans leurs pages culturelles me donnent le sentiment d'un monde touchant qui risque à nouveau de s'effacer... Mercredi est jour de cinéma, que deviendront et les mots doux et beaux que l'on pose dans Télérama, Libération, l'Humanité, la Montagne, sur "Garçon Chiffon" de Nicolas Maury qui raconte un acteur dans l'impasse et déchiré de jalousie, sur ADN de Maïwenn qui dit le deuil et les racines...
Même nos indélicatesses me manquent par avance.
Tiens à propos de "Une vie secrète," dans le Figaro donc, Eric Neuhoff, critique réac humain et cultivé, se montre un peu pervers. A propos d'un film qui dit ce que le fascisme fit aux êtres, mais qui dit aussi l'amour d'une femme protégeant son homme caché... Neuhoff cite le titre d'un livre de feu Jacques Chardonne, "l'amour c'est beaucoup plus que l'amour"... Mais quand on sait que Chardonne, d'un rare talent, fut aussi pendant la guerre pétainiste et pro collabo, on se dit que Neuhoff s'amuse de nous, de tout, on ne se fâchera pas aujourd'hui.
On parle enfin d'une délivrance...
Dans une belle histoire que je trouve dans la république du centre, celle d'un petit garçon pour qui le confinement fut la fin du harcèlement qu'il subissait au collège... Il s'appelle Tony, de Malesherbes dans le Moiret, en mars 2020, il fut sauvé confiné loin de ses tourmenteurs, depuis la rentrée il va bien, dans une bonne classe, et puis aussi, il fait du kickboxing au Fight club Malesherbes, qui travaille à rétablir par les arts martiaux la confiance de ceux qu'on a blessés.
Dans le même journal je découvre Sarah qui est forte, qui au Bricorama d'Orléans a pris la défense de son papa Kamel qui souffre de sclérose en plaque et qu'une caissière de mauvais poil refusait de faire passer en priorité en dépit de sa carte coupe-file et de la loi... Elle a obtenu des excuses... Mais je lis que le Bricorama va fermer, liquidé, et que la méchante caissière n'était qu'une future chômeuse. Les souffrances, vous dis-je, que l'on peut endurer.
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