Un jour Mariame sentit le vent dans ses cheveux... Histoire de dévoilement et leçon de sagesse, Libération.

France Inter
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Renate Reinsve subjugue le Monde et le Figaro, entre autres, Céleste Brunnquell éclaire Télérama, deux jeunes femmes de cinéma et de cinéphilie nous donnent de la vie. Dans l'Humanité l'écrivain Pierre-Louis Basse, frêre rêvé de Guy Moquet, nous rend vivants les otages de Chateaubriant.

On parle d'une jeune femme...

Qui pour la première fois depuis des années sent le vent dans ses cheveux, elle qui s'est voilée à l'âge de dix ans, tout est nouveau, elle se sent nue, elle ne sait pas se coiffer, elle se coupe les cheveux courts, c'est toute une histoire que ce dévoilement, quand on a tant subi avant parce qu'on y croyait. Voilée parce que musulmane croyante, pour être une fille bien, elle se disait cela, Mariame, c'est son nom, avait rencontré la violence, on lui crachait dessus dans la rue, une grande ethnologue la faisait chasser de la bibliothèque universitaire où elle faisait ses recherches, une sous-préfecture des Yvelines avait averti ses parents qu'elle était lycéenne une des islamistes de Mantes la Jolie... Mais elle tenait bon, insolente battante et même un peu célèbre chez ses sœurs en identité, elle avait créé un site féministe glamour et muslim, hijab and the city, elle était vivante surtout, elle faisait voilée de la boxe française, les corps se touchaient dans les combats, ce fut le début d'une autre conscience, plus tard, son fiancé l'amènerait à la piscine, elle ne savait pas nager, se mettre en maillot de bain serait une violence, et puis finalement, dans l'indifférence des autres, elle nagea... 

Et donc ce matin dans Libération et aussi dans un livre, "dévoilons-nous", Mariame Thiganimine qui a des cheveux, un corps, et bientôt un doctorat en sociologie, nous parle de son chemin et de la liberté et son récit est un antidote aux bruits et aux certitudes... Le voile dit-elle est un archaïsme patriarcal, mais en même temps elle refuse qu'on humilie les femmes qui le portent. Elle se souvient d'une prof d’histoire-géo devenue une amie, qui l'avait regardée, lycéenne voilée, comme une adolescente et pas comme une menace.

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Et que ce soit une prof qui ait incarné la République de l'intelligence, nous fait tressaillir puisque ce matin encore  on nous rappelle le prof scrupuleux et assassiné Samuel Paty -dans Libération encore, dans Charlie Hebdo également, un reportage signé Laure Daussy auprès des enseignants un an après le drame, reportage sans fard qui complexifie aussi le paysage. Il y a les prurits islamistes juvéniles, mais aussi la détresse de cette lycéenne portant le voile hors de son établissement, qui s'est reçue un "rentre chez toi" d'un passant, et sa prof, lectrice et militante de Charlie doit la consoler. Il y a aussi, en Picardie des parents d'élèves qui refusent que leur enfant aille visiter une mosquée -l'islam est au programme de 5e- parce que « je rejette le monde musulman» écrit un père sur le carnet de correspondance….  

Pendant ce temps dans l'Express, l’inlassable Elisabeth Badinter ne nuance pas sa laïcité de combat, elle cite à propos de Samuel Paty l'écrivain algérien Kamel Daoud, selon lequel le programme des islamistes, plutôt que d'instaurer le califat, serait de laisser les enfants grandir... En grandissant vous me direz, Mariame s'est dévoilée. 

On parle aussi d'une amoureuse...

Et c'est bonheur et une logique de ce jour où après Mariame d'autres jeunes femmes nous donnent de la vie... L'amoureuse est norvégienne, se prénomme Julie, elle n'est hélas que de cinéma mais c'est aussi bien, son interprète Renate Reinsve,  a décroché le prix d'interprétation à Cannes pour Julie en 12 chapitre - où l'héroïne éponyme court tourne papillonne virevolte écrit dans le Figaro, l'homme critique ému  Eric Neuhoff qui aime avec les mots de son âge un film qui lui rappelle notre nouvelle vague et une fille qui lui rappelle l’Antoine Doinel de Truffaut... Le Monde se départit de ce regard tendre mais daté et raconte Renate Julie en jeune femme de son temps, qui a un coirps qui nage, qui lit de la philo et qui doute d'elle-même et si le cinéma la lâchait elle ferait de la menuiserie... 

Dans Télérama nous attend une française qui semble la sœur de Renate, une jeune fille de 19 ans aux yeux bleus qui fait du cinéma et s'en nourrit aussi, adepte d'un lieu rare que je vous recommande, le vidéo club de la butte à Montmartre aux trente mille dvd, adepte aussi d'une plateforme dédiée aux films d'auteurs, Mubi, et puis les salles, et Céleste Brunnquell, choisie par Télérama comme tête d'affiche d'un numéro vibrant consacré à l'amour du cinoche toujours là chez les jeunes gens, Céleste Brunnquell donc nous raconte son apprentissage de cinéphile, ce qui lui manque, ce qu'elle retrouve, et comment elle fut bouleversée par une héroïne d'un vieux film tchèque, les amours d'une blonde, qui pleurait dans les bras de son aimé... Et elle dit ce mot juste, “Vous ne trouvez pas qu’il est toujours plus difficile de parler des films qu’on aime ?”

Elle y parvient pourtant. Elle dit aussi Celeste Brunnquell, qu'après son rôle de nageuse dans le doute dans la série thérapie, on lui propose des rôles de filles névrosées :  on s'en veut adulte d'être sans grâce devant la grâce qui vient...

Dans l'Equipe nous attend Loui Sand qui n'est plus une jeune femme, mais quelle fille forte elle était avant quand elle était Louise, jeune vedette de l'équipe féminine suédoise de handball, Louise est devenu Loui, un homme transgenre aux traits doux, qui joue toujours au handball, mais avec des garçons, son premier but a été une délivrance. 

Dans la Croix vous verrez un jeune homme du même âge, Alexandre Allain, atteint de mucoviscidose, greffé des poumons, et qui dimanche aborde le marathon de paris, en confiance  et à 10 km/heures... Dans Nice Matin vous entendrez Mikhaïl qui lui a 25 ans, russe, homosexuel, et il le sait depuis un an, séropositif, touché par le sida, il est aussi études accomplies sans papier et menacé d'expulsion vers son pays où homophobe où il a peur de mourir, il supplie et d'autres pétitionnent pour qu'on ne l'expulse pas. 

Et on parle encore de jeunes gens...

Qui à l'âge des possibles n'eurent pas d'autre choix que de devenir des héros, Hubert Germain nôtre dernier compagnon de la Libération, est si bien conté dans le Monde et dans le Figaro, il avait choisi de Gaulle à 19 ans quand son père général choisissait Pétain, mais le régime de Vichy le jugea tiède, et l'abandonna à la déportation... Hubert, jeune héros au cœur jusqu'à ses 101 ans, ne cessa jamais d'aimer ce père vaincu...

Nice matin et la Provence nous disent les beautés d'Yves Montand qui aurait eu 100 ans aujourd'hui. L'Indépendant nous prépare au festival Don Quichotte qui viendra dans l’Aude cette fin de ce semaine, chaque papier est une invite à l'engagement.

Dans l'Humanité vous lirez le souvenir des 27 otages de Chateaubriant, donnés par Vichy parce que communistes et fusillés par l'occupant, le 22 octobre 1941, l'écrivain Pierre-Louis Basse va nous les raconter en huit épisodes et un livre, il vit cette histoire comme la sienne, et le jeune Guy Moquet comme un frère possible, alors ses mots nous prennent, un poète instituteur nommé Louis Cadou, chanta ainsi les 27...

"Ils disent qu'ils ne sont pas des apôtres et que tout et simple

et que la mort est une chose simple, puisque toute liberté se survit."