(Patrick Cohen) La vérole et l'infarctus
(Bruno Duvic) "La crise des subprimes, ce sont de jeunes esprits de la finance qui ont filé la vérole au monde entier."
La phrase date de février 2009, on la retrouve ce matin dans Libération dans le portrait d'Antoine Bernheim, l'un des patriarches du capitalisme français. L'ancien associé gérant de la banque Lazard est mort hier dans son sommeil à 87 ans.
Comment dit-on vérole en Espagnol ? Les Echos , Le Monde , Libération … la crise bancaire à Madrid est à la Une d'une bonne partie de la presse ce matin.
Depuis quelques mois, Jacques Attali se fait prophète de malheur dans les colonnes de L'Express . Il repasse une couche de noir cette semaine.
Si l'Europe continue comme cela "elle n'existera bientôt plus. (...) L'histoire est écrite d'avance : laisser la Grèce faire faillite, ne pas sauver les banques espagnoles, rester impuissants face aux demandes à venir, italienne et française. Et voilà, c'en sera fini de 60 ans d'efforts. On se rendra compte alors seulement qu'un peu de solidarité aurait pu tout sauver. (...) Si cette faillite advient, les Européens l'auront décidé, (...) emportés par un chacun pour soi suicidaire. (...) Les historiens retiendront que l'idéal démocratique aura été dévoyé en une dictature de l'individualisme, dont nos civilisations seront mortes. »
"Europe, le changement, c'est urgent !", titre Alternatives économiques .
Et dans l'éditorial, Thierry Pech écrit ceci, qui n'est pas très différent de l'analyse de Jacques Attali. « L'Europe forme aujourd'hui une communauté de destin (…) Jamais les Européens n'ont été aussi près de l'échec et jamais ils n'ont eu aussi vivement le sentiment de partager la même histoire. (…) Il leur faut désormais coopérer davantage, en mutualisant une partie de leurs charges et de leurs investissements. »
On l'avait déjà remarqué pendant la campagne présidentielle : cette ambiance de crise s'accompagne d'un climat de lutte des classes en France.
Illustration en couverture de L'Express : "Les riches sous Hollande" et du Nouvel Observateur demain : "Ces privilèges qu'il faut abolir".
Cette société de l'avoir et de la consommation à outrance, c'est l'objet d'un film aujourd'hui au cinéma et qui recueille de très bonnes critiques dans les journaux. "Le Grand soir", réalisé par le duo de Groland, Benoit Delépine et Gustave Kervern. Histoire de deux punks qui vivent dans une zone commerciale.
Acteur principal : Benoit Poelvoorde, qui accorde une interview à Telerama dans laquelle il se définit comme un anar de droite.
« - Vous pourriez vous indigner ? lui demande le journal
- C'est casse gueule de répondre à ça dans un hôtel confortable. Vu les salaires que nous touchons, nous, les acteurs nous sommes les premiers à devoir nous écraser.
- En vingt ans de carrière, vous avez changé de classe sociale ?
- Non, je suis resté un plouc. Les acteurs sont des parvenus, ils veulent singer les riches. Mais vous avez beau avoir la même voiture qu'un riche, vous êtes un plouc et vous resterez un plouc. Les riches sont les riches et resteront les riches. »
Echos de la campagne des législatives à présent
Campagne qui ne passionne pas grand monde. Serge July croit savoir pourquoi dans Les Inrockuptibles : Cela fait en réalité deux ans que nous sommes en campagne. July en date le début au pacte de Marrakech entre Aubry, Strauss Kahn et Fabius à gauche et au discours de Grenoble de Nicolas Sarkozy à droite. Deux ans... "La lassitude dévore même les meilleures volontés du monde"
François Fillon fait campagne à travers une interview au Figaro . Il « dénonce la politique désastreuse de Hollande », titre le journal à sa Une, politique présentée comme une hausse massive des impôts et l'impasse sur la réduction des dépenses publiques. Il prédit de grandes difficultés pour l'économie française à court terme.
La campagne pour le parti socialiste, ce sont les mesures annoncés ou déjà appliquées par le nouveau pouvoir. Retour partiel à la retraite à 60 ans aujourd'hui en conseil des ministres. "L'exécutif veut marquer l'opinion avant les législatives", titrent Les Echos .
Cela fait 22 jours que François Hollande est officiellement président et Le Canard Echaîné lève le voile sur le tête à tête qu'il a eu avec Nicolas Sarkozy le jour de la passation de pouvoirs. "Notre tête à tête a été très froid, aurait-il confié à des proches. Sarkozy n'a pas parlé, comme d'habitude, que de lui"
Une fois le gouvernement nommé, les cabinets se sont constitués. Et les conséquences sont présentées dans Le Parisien : le siège du Parti socialiste est une maison vide. Une pléiade de collaborateurs a quitté le navire pour aller travailler dans les ministères. « A mon étage, sur sept permanents, quatre sont partis », explique un dirigeant national.
Drôle d'ambiance, décrite par Eric Hacquemand : il y a ceux qui font la gueule parce qu'ils n'ont pas été appelés. Et d'autres sont tétanisés, en attendant un coup de fil.
Quoi d'autre dans la presse, Bruno ?
A propos de François Hollande, rue89 en a marre de cet adjectif, "normal", mis à toutes les sauces. Le site vous invite à participer au no normal day, sur les réseaux sociaux en particulier.
Comment aider les dyslexiques ? Des chercheurs du CNRS à Marseille ont une piste. Mettre plus de blanc entre les lettres et entre les mots. Très simple mais efficace selon La Provence . Vitesse de lecture améliorée de 20%
« Pas de regrets », titre de L'Equipe entre guillemets après la défaite de Tsonga contre Djokovic à Roland Garros. On a du mal à la croire après ces 4 balles de matches perdues. Dans sa chronique Mats Wilander assure que Jo-Wilfried Tonga est désormais tout près des meilleurs.
Et un hôpital hors du commun, pour terminer
Dans Le Monde , Julien Bouissou nous emmène dans un hôpital de Bangalore, dans le sud de l'Inde. C'est là qu'opère un cardiologue considéré comme un demi-dieu. On vient d'Afrique, du Moyen Orient et d'Asie du Sud pour le consulter. Certains patients, écrit Julien Bouissou, sortent de son bureau à reculons et les mains jointes.
Le docteur Devy Shetty a inventé les opérations cardiaques à la chaine et low-cost. 2000 dollars en moyenne, 10 fois moins que dans les meilleurs établissements européens et américains. Les malades arrivent chez lui dans des voitures de luxe avec chauffeur ou bien à pied, juste vêtus d'un pagne. Son credo : seuls 10% des patients dans le monde peuvent s'offrir une opération cardiaque, c'est un crime.
Comment fait-il ? Lui qui était le médecin de mère Theresa est aussi un sacré businessman.
Management, logistique, gestion, tout est pensé au cordeau et contrôlé tous les jours. Un seul exemple : ce qui coûte le plus cher en Inde, ce ne sont pas les salaires, mais tous les achats inhérents à la vie d'un hôpital. Alors le docteur Shetty s'est demandé qui au monde savait le mieux acheter. Réponse : Wal Mart le géant de la grande distribution aux Etats-Unis. On s'est donc inspiré de ses méthodes.
Aujourd'hui le groupe possède 14 hôpitaux dans le pays. + 1 dans les îles Caïman. Des projets sont en cours en Ethiopie et dans les pays de l'Est.
Le docteur Shetty, conclut, Julien Bouissou, a inventé l'hôpital privé qui ne soit pas réservé aux riches. Il sauve les vies par le management.
Drôle de paradoxe, en ces temps où la rigueur provoque des infarctus.
A demain
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