J-7 : le risque d'un nouveau malentendu après les voeux du Président. J+7 : le Rassemblement national dans la bataille des européennes.
La semaine politique, avec vous Yaël GOOSZ, chef du service politique de France Inter. On regarde dans le rétroviseur et on se projette. Et ce que vous retenez de cette première semaine de 2019, Yaël, c’est le risque d’un nouveau malentendu après les vœux d’Emmanuel Macron.
10 décembre, 31 décembre 2018, le même Président, pas la même partition...
Nous ne reprendrons pas le cours normal de nos vies (...). Mon seul souci, c'est vous" (E. Macron, le 10 décembre 2018, à la télé)
Certains prennent pour prétexte de parler au nom du peuple, mais lequel, d'où, comment ?" (E. Macron, le 31 décembre 2018, voeux présidentiels à la télé)
Et ce n’est pas parce qu’Edouard Philippe a fait son premier déplacement de l’année dans une entreprise de désenfumage naturel contre les incendies (si si, c’était hier, dans le Val d’Oise !), qu’on y voit forcément plus clair. Le Président a parlé debout, des vœux de combat. Finie l’auto-contrition, la compassion pour les « foules haineuses », cette minorité en jaune qui prétendrait incarner le peuple.
Un Président debout. Les spécialistes du langage corporel ont déjà tout dit là-dessus. Mais il a aussi remis d’équerre son agenda : il ne cale pas, au contraire, les réformes annoncées sont toujours là. Vous aviez cru à un tournant ? Il n’est que sur la méthode... Et encore. La Lettre aux Français pour mobiliser en vue du débat national, Mitterrand et Sarkozy l’ont déjà testée avant lui.
Écrire pour dire quoi ? Si l’agenda est déjà tracé, de quoi débattre ? Le 10 décembre, le Macron compassionnel disait que « nous ne reprendrions pas le cours normal de nos vies ». C’était puissant, mais ça fait pschitt si c’est du théâtre.
Le Président sème des cailloux : cette lettre, qui paraîtra mi-janvier, la promesse d’un projet européen renouvelé, d’une initiative démocratique. Des cailloux trop petits pour être vus et ramassés. L’impatience est sans doute une déformation professionnelle. Mais la politique du petit Poucet n’est plus adaptée. Quelle est la suite ? Un référendum ? Si oui, sur quoi et quand ? La table, il la renverse ou pas ? Perdre sa plume et son communicant dans ce moment critique n’aidera pas à désenfumer le quinquennat.
Allez Yaël, on se projette sur la météo à 7 jours...
Et même à 9 ! Dimanche 13 janvier, Marine Le Pen sur la scène de La Mutualité à Paris : le rassemblement national se lancera dans les européennes...
Le peuple exige une seule politique, la politique des Français, pour les Français, avec les Français" (Marine Le Pen, déclaration après l'annonce des résultats, le 25 mai 2014)
Les européennes 2014. Marine Le Pen, victorieuse. 24% et 24 élus. Faire aussi bien cinq ans après, c'est l'objectif. C'est aussi son match retour de 2017 qu’elle ne peut pas, ne veut pas perdre. Or, l'Europe est un terrain glissant sur lequel elle a trébuché l'an dernier. Frexit or not Frexit... Cette fois, la piste d’atterrissage paraît dégagée. L’euro vient de fêter ses 20 ans, et Marine Le Pen a compris la leçon : ne plus parler de cette monnaie. Plutôt les « Gilets » que les pièces jaunes !
Un dirigeant RN me confiait hier son optimisme : les idées défendues depuis toujours vont être au cœur de la campagne. Avec des partenaires (et notamment la Lega de Salvini en Italie) qui ont pris le pouvoir à l’étranger ! Un atout de plus par rapport à 2014. Marine Le Pen veut renverser Bruxelles, en en prenant le contrôle de l’intérieur, avec, a minima, une minorité souverainiste de blocage.
Alors, la force, la flamme, tranquilles ? Il y a des obstacles sur sa route : elle manque de cadres, sérieuse hémorragie depuis 2017, de cadres et de femmes pour faire un « chabadaba » crédible sur la liste. J’ajoute la concurrence d’un Dupont Aignan, celle d’un Philippot dépositaire de la marque « les gilets jaunes », et pourquoi pas une liste gilets jaunes autonome… Tout ça pourrait grignoter des parts de marché électoral et contrarier son objectif : virer en tête comme en 2014 et regagner ses galons pour 2022. D’où cet empressement (et elle n’est pas la seule), à faire d’Eric Drouet le martyre du macronisme.
Qu’on se le dise, Marine Le Pen sera dernière sur sa liste... mais c’est bien elle qui tirera les ficelles.
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