- Manuel Valls Ancien Premier ministre
A l'avant-veille du second tour des régionales, le Premier ministre - qui défend le front républicain depuis une semaine pour barrer la route au FN en PACA, dans le nord et dans Grand Est - répond aux questions de Léa Salamé et de Patrick Cohen.
Manuel Valls répond aux questions de Léa Salamé :
Lundi matin, il va se passer quoi ?
Tirons d’abord les leçons du scrutin. Puis nous poursuivrons le travail. D’abord la lutte contre le terrorisme. Ensuite la priorité des priorités : la lutte pour l’emploi.
Le FN va peut-être gagner une région, deux ou pas, et puis on oubliera. Rien ne changera comme après les européennes, les municipales ?
C’est tout le contraire je crois. Je ne cesse de le dire depuis des mois. Il faut s’adresser aux Français différemment.
Nous vivons avec la menace terroriste.Nous avons un ennemi Daech, que nous devons combattre, et écraser, en Irak, en Syrie et demain sans doute en Libye.
Nous devons être à la hauteur des enjeux historiques. Donc on n’entend pas les messages d’exaspération et on garde la même politique ?
Nous devons répondre aussi à une autre attente, qui me paraît tout aussi importante. Dans le vote pour l’extrême droite il y a aussi cette demande : c’est quoi être Français ? Quel est le projet pour la France ?
La France compte dans le monde par ses armées, sa diplomatie.
J’ai envie de dire que je suis fier de mon pays.
Pourquoi nous sommes à un moment historique ? Parce qu’au fond il y a deux options pour notre pays : qui est celle de l’extrême droite qui prône la division et qui peut mener à la guerre civile , et il y a une autre vision, celle de la République et des valeurs qui est le rassemblement.
Je n’ignore rien des difficultés de mes compatriotes.
Ces réponses, nous ne devons pas les apporter lundi mais d’ici dimanche dans les régions où la gauche peut l’emporter. Il y a 9 régions sur 12 dans l’hexagone, 4 régions dans les outre-mer, plus la Corse, où la gauche rassemblée et unie peut l’emporter . On n’en parle pas assez mais c’est ça aussi qui se joue dimanche.
Claude Bartolone quand il dit que Valérie Pécresse défend la race blanche, est-ce que c’est de la vielle politique avec des vieilles ficelles.
Les pratiques politiques doivent changer donc je ne réponds plus aux questions. Claude Bartolone a un projet pour l’Ile-de-France […] qui vise à rassembler et pas à diviser.
Il a rassemblé la gauche, il doit rassembler les républicains, les démocrates de progrès, les centristes qui sont bien perdus dans une droite qui aujourd’hui court trop souvent derrière l’extrême droite.
Qu’est-ce que vous dites à l’électeur de gauche qui dit je ne pourrai pas voter Estrosi, Bertrand, Richert ?
Je suis sûr qu’il y arrivera. Pierre de Saintignon et Christophe Castaner ont pris des choix courageux.
J’en appelle à tous les électeurs, venez voter.
Qu’est-ce qu’il se passerait si des régions passaient FN?
L’image serait détruite, les entreprises partiraient, je pense aux femmes avec le planning familial.
Tous ceux qui sont tentés par le vote FN, ce serait un désastre, le programme du Front national c’est la division.
Marine Le Pen vous a mis en cause dans son dernier meeting vous accusant d’orchestrer une campagne de diffamation d’Etat. Avec « Manuel Valls qui s’est au-promu directeur de campagne de l’UMP »
L’extrême droite qui au fond est dans « l’arnaque ». Le clan Le Pen, qui en plus est poursuivi par la justice.
40% des Français votent pour une « arnaque » ?
Oui. Les Français qui font ce choix, je les respecte mais ils votent par un parti antisémite, raciste, qui n’aime pas l’Histoire de notre pays.
La diabolisation ça marche encore ? Pourquoi vous ne saisissez pas l’article L212-1 du code de la sécurité intérieure pour l’interdite ? Moi ce que je souhaite c’est convaincre d’abord.
La vidéo intégrale de l'entretien avec Partrick Cohen :
La COP 21, pourquoi avoir repoussé l’échéance à demain ?
C’est l’avenir de la planète.
L’accord final sera exigeant ?
Sur les objectifs il le sera, les 2 degrés, voire moins.
Les financements c’est compliqué ?
Il faut que les pays riches s’engagent […] mais je pense que grâce à la diplomatie française nous trouverons un bon compromis. Je suis confiant .
Près d’un moins après les attentats de Paris, la France vit toujours dans un état d’exception : l’état d’urgence pour faciliter le travail de la police. Qui a permis des perquisitions mais aussi des assignations à résidence. Le Conseil d’Etat aura aujourd’hui à se prononcer sur certaines d’entre-elles. 7 militants écologistes enfermés chez eux jusqu’à la fin de la COP 21. Comment justifier de telles mesures ?
Il y a eu 2575 perquisitions administratives depuis le 14 novembre qui ont donné lieu à 311 interpellations et 202 découvertes de produits stupéfiants parce qu’il y a un lien entre la criminalité organisée et le terrorisme. Et 354 assignations à résidence car c’est un moyen de mettre à l’écart les individus qui peuvent être dangereux pour la République.
Dangereux on ne sait pas mais sans aucun rapport avec les actes terroristes de Paris et donc avec l’instauration de l’Etat d’urgence ? Le tribunal administratif avait été saisi pour 7 personnes sur 354, le Conseil d‘Etat a été saisi. Attendons.
Des militants enfermés chez eux, avec l’obligation de pointer trois fois par jour au commissariat ça ne vous choque pas ?
Ce sont des militants qui pouvaient représenter un vrai problème pour l’ordre public. La réforme constitutionnelle que vous avez présenté dans cette réforme, les mesures d’exception pourraient être prolongé encore six mois, pourquoi ?
Nous vivons avec une menace terroriste. Les mouvements au sein du monde arabo-musulman, la force et la puissance de ces organisations terroristes, […] tout ça nous amène à penser que nous allons vivre avec cette menace terroriste.
Ça veut dire que l’Etat de droit n’est pas assez solide pour répondre à cette menace ? L’état d’urgence c’est l’Etat de droit __ . Nous voulons d’ailleurs le constitutionnaliser.
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C’est l’Etat de droit ou l’Etat d’exception ? L’état d’urgence n’est pas contraire au droit. Nous voulons consolider dans la Constitution l’Etat d’urgence**. Le texte pourrait être adopté le 23 décembre en Conseil des ministres.** Nous attendons l’avis du Conseil d’Etat.
Dans ce projet de réforme il y a un point contesté à gauche et au PS c’est la déchéance de nationalité pour les binationaux nés Français condamnés pour terrorisme. Quel pourrait être l’effet dissuasif ou répressif ?
Il y a déjà eu des déchéances de nationalités pour les Français binationaux qui ne sont pas nés Français et qui peuvent être expulsés.
Nous n’avons jamais dit que c’était l’arme absolue pour lutter contre le terrorisme.
Ça peut décourager qui que ce soit ?
Ce n’est pas la question. Quand des Français renient tout ce que nous sommes, l’Etat peut être amené à prendre des mesures […] symboliques.
C’est une mesure symbolique qui pourrait avoir un effet concret : en liberté au Proche Orient plutôt qu’enfermé en France ? Cambadélis dit lui-même que ce n’est pas une idée de gauche mais qu’elle a été annoncée par la gauche pour faire plaisir à la droite.
La vidéo intégrale d'Interactiv :
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La question posée est que des Français qui tuent d’autres Français, qui ont acquis la nationalité française, au nom d’une idéologie totalitaire, que la question de déchéance de nationalité se pose, ça me parait légitime.
(Auditrice) Je suis électrice de gauche et je vais aller voter Christian Estrosi. En 2002, j’ai voté Jacques Chirac pour les mêmes raisons. J’ai l’impression d’être le dindon de la farce électorale. Nous électeurs de gauche, on est de plus en plus amenés à voter contre le FN. Que pouvez-vous faire pour contrer le Front national, en ayant une vraie politique de gauche, sur la santé, l’éducation, le respect d’autrui et par ailleurs j’aurais aimé avoir votre sentiment sur le « ni ni » ?
Sur les 13 régions métropolitaines, elle est posée uniquement, même si c’est beaucoup dans 3 régions, dans les 10 autres régions, en Corse, la gauche est présente et porte un projet.
Parfois, on a le sentiment qu’il n’y a que trois régions.
Les électeurs de gauche peuvent choisir vis-à-vis d’une droite, je pense à Monsieur Wauquiez en Rhône-Alpes Auvergne qui court derrière l’extrême droite , celle de Nicolas Sarkozy qui est incapable de choisir, l’honneur de la politique c’est de pouvoir choisir. Moi j’aurais rêvé que Nicolas Sarkozy soit à la hauteur du nom de son parti : les Républicains. En renvoyant dos à dos la gauche et l’extrême droite, il se trompe . Nous, nous assumons nos choix. C’est aussi comme cela qu’on donne ses lettres de noblesse à la politique.
Le discours de Laurent Wauquiez est si différent de Christian Estrosi ?
Si la question s’était posée en Rhône-Alpes Auvergne, nous n’aurions pas hésité non plus. Je fais une différence entre la droite et l’extrême droite. Une grande partie de la droite, pas toute, court après l’extrême droite, et ça créé de la confusion. Quand il y a de la confusion, on choisit toujours l’original.
(Auditeur) Je suis maire PS d’une ville à coté de Reims, j’ai reçu les bulletins de vote et à mon étonnement j’ai vu que sur la liste de monsieur Masseret il y avait toujours le logo PS. Que fait-on dimanche, pour nous ce n’est pas clair ?
Tous les maires, les élus, sont rassemblés, pour que la République l’emporte dans cette région face à l’extrême droite. Le parti socialiste ne soutient pas Jean-Pierre Masseret. Il utilise peut-être le logo du Parti socialiste mais les valeurs du parti socialiste on les porte dans son cœur.
(Twitter) La déchéance de nationalité ne fait-elle pas citoyens de seconde zone ?
Ces propos sont insupportables.
Je n’admettrais jamais qu’on puisse comparer les propos stigmatisant de Monsieur Trump de de Madame Le Pen à propos des musulmans et ce que nous pensons qu’il faut faire en matière de déchéance de la nationalité.
(Patrick Cohen) L’Etat d’urgence court jusqu’en février et vous envisagez de le prolonger ensuite ?
En fonction de la menace nous verrons s’il faut lever l’état d’urgence.
(Thomas Legrand) Dans trois mois on sera toujours sous la menace. On risque de vivre sous l’état d’urgence jusqu’aux présidentielles ? L’interdiction de manifester par exemple ?
Aujourd’hui est-ce que vous avez des manifestations interdites ? Les salariés de la CGT sont allés manifester devant le siège d’Air France, ça n’a pas été interdit.
L’immense majorité des perquisitions administratives sont aujourd’hui efficaces.
(Patrick Cohen) Sur un autre plan, vous avez célébré les 110 ans de la loi de 1905, on a eu un sondage qui montrait que 81% des Français estimaient cette laïcité en danger. Vous avez dit qu’il y avait urgence à retrouver le sens de cette loi. Certains ont compris que ça présageait une nouvelle loi ?
Non il faut faire vivre les valeurs que représente la laïcité. Tous les débats sur l’attitude de l’attitude de certains élèves à l’école, la formation des enseignants à ces valeurs, l’application des règles qui interdit les signes ostentatoires à l’école, la séparation nette entre l’Etat et les Eglises, le respect de croire ou ne pas croire. Je pense aux musulmans de France que nous devons protéger.
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