Dans les rues de Paris, on croise ceux qui réussissent et ceux qui livrent à ceux qui réussissent
Comme les restaurants, les supermarchés se lancent dans la livraison à vélo… jusqu’au goûter ou au kit apéritif… même si c’est le livreur qui gagne des cacahuètes…
Oui, mais j’ai décidé d’arrêter de râler contre tout ça, et hier soir, j’ai testé le kit apéro du Monoprix et c’était bon, c’était délicieux. Quand j’ai imaginé l’ouvrier en CDI de chantier qui fait peut-être trois quarts d’heure de transports chaque matin pour venir à l’usine couper le fromage en cubes et qu’ensuite un autoentrepreneur à vélo a brûlé trois feux rouges et a sué pour me l’apporter alors que j’aurais pu descendre l’acheter en bas de chez moi… le fromage en cube avait meilleur goût. Surtout que j’avais invité mon vieux pote Jeanphi, fan de Wauquiez… sa tête quand je lui ai dit : « Hé, ça a du bon l’assistanat ! » Vous savez ce que m’a répondu Jeanphi ? Il m’a dit, c’est génial, à Paris, la vie est devenu un room service !
Dans les grandes villes ça se comprend : avec la hausse des loyers et des taxes foncières, les gens préfèrent rester chez eux, pour rentabiliser. Et puis quand tu rentres chez toi et que t’es déjà au bord du burn-out tu vas pas en plus te mettre à découper des cubes de gouda ! Quand je pense à tous ces petits restos, ces traiteurs et ces supérettes en bas de chez nous qui attendent bêtement… alors que nous, on est tranquilles posey à balayer notre smartphone d’un index dédaigneux pour choisir ce qu’on va bouffer sur une appli... Bientôt les chauffeurs Uber vous proposeront une bouteille d'eau, des bonbons et pour 15 euros de plus le filet mignon en croute de sel accompagné de ses brocolis. Et ce jour-là, quand on entrera dans un resto, le patron vous dira : « Ah non on sert plus sur place, il faut aller sur notre site », le resto sera vidé de ses serveurs, qui seront en train de pédaler quelque part dans Paris.
Les Parisiens abandonnent peu à peu le supermarché… De toute façon on s'en fiche de ne plus pouvoir choisir les fruits dans les rayons, étant donné que de nos jours, ils ont tous la même forme et le même goût ! Ma petite voisine pense déjà que la clémentine n'a pas de peau et qu’elle pousse en quartiers dans du plastique... Je le sais parce qu’hier je suis allée sonner chez mon voisin pour lui demander du sel. Il m’a prise pour une dingue… Je vais d’ailleurs aller m’excuser ce soir, c’est préférable.
Pourtant, le plus dingue, ce sont celles et ceux qui se font livrer de la bouffe depuis leur canapé et qui ensuite font venir un coach sportif à domicile : là je crois qu’on est complet ! Enfin, non, parce qu’après, il faut donner une note au coach, puis au livreur, donner une note au cuisiner, et au type qui a fait le design de l’emballage… et là on aura perdu le temps qu’on aurait passé à la caisse.
Aujourd’hui, dans les rues de Paris, on croise ceux qui réussissent et qui livrent à ceux qui réussissent.
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