La folle autobiographie d'Hedy Lamarr, les nouveaux Rufin et Dan Franck… Critiques des livres dont on parle

Que lire en ce joli mois de juin ? Suivez les conseils de nos critiques !
Que lire en ce joli mois de juin ? Suivez les conseils de nos critiques !  ©Getty - 	Chris Tobin
Que lire en ce joli mois de juin ? Suivez les conseils de nos critiques ! ©Getty - Chris Tobin
Que lire en ce joli mois de juin ? Suivez les conseils de nos critiques ! ©Getty - Chris Tobin
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Nos critiques ont-il aimé la nouvelle traduction de "1984" de George Orwell, "Ectasy and me. La folle autobiographie" d’Hedy Lamarr, "Ma grande" de Claire Castillon, "Scénario" de Dan Franck , "Le suspendu de Conakry" de Jean-Christophe Rufin ?

Pour en débattre, Jérôme Garcin s'est entouré d'Olivia de Lamberterie (Elle), Nelly Kapriélian (Les Inrockuptibles), Michel Crépu (NRF) et Arnaud Viviant (Transfuge) 

« 1984 », George Orwell, nouvelle traduction de Josée Kamoun

L’événement de la saison, c’est la nouvelle version française que donne Josée Kamoun, la traductrice de Philippe Roth et de Jack Kerouac, au célèbre roman d’anticipation 1984, de George Orwell, chez Gallimard. 

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Un roman visionnaire paru en 1949 dont la figure centrale, Big Brother, est devenue la métaphore des régimes totalitaires. En 1984, le monde est divisé en trois régions, l’Océania, l’Eurasia et l’Estasia. L’Océania, qui vit sous la dictature d’un parti unique et où est placardée la fameuse affiche « Big Brother vous regarde ».  Avec ses trois corollaires : « La guerre, c’est la paix », « La liberté, c’est l’esclavage » et « L’ignorance, c’est la force ». Le personnage principal, Winston Smith, travaille au ministère de la vérité, où il expurge les journaux de tout élément nocif. Bref, rien à voir entre la nouvelle traduction de 1984 et l’ancienne, d’Amélie Audiberti, qui datait de 1950.  Dans la nouvelle, on passe de l’imparfait au présent, la novlangue est devenue le néoparler, et lapolice de la pensée, la mentopolice. Et surtout, cette version est beaucoup plus terrifiante, glaçante, oppressante que la première. 

► Publié chez Gallimard

«  Scénario », Dan Franck 

Tout est faux et tout est vrai dans Scénario, le gros roman de Dan Franck. 

Vrai que cet écrivain s’est vu commandé par Netflix le scénario de la fameuse série Marseille et qu’il a connu bien des déboires. Tout cela est forcément transformé dans ce roman dont le héros enquête dans la cité phocéenne, fréquente les flics, les truands, les caïds marseillais, apprend à fabriquer de faux dirhams et à conduire une Porsche Cayenne, avant de soumettre le scénario de Marseille, pardon, de Fausse Monnaie, aux Américains de Netflix, pardon de WDM, qui veulent toujours plus de sexe, de came et de violence. A la fin, évidemment, son projet est haché menu... On apprend ici comment naissent les séries – on rappelle qu’au romancier Dan Franck on doit, pour la télé, les scénarios de La Dame de Berlin, Jean Moulin, Les hommes de l’ombre, La vie devant elles et... Marseille, série en 8 épisodes avec Gérard Depardieu, Benoît Magimel et Géraldine Pailhas.  

► Publié chez Grasset

« Le Suspendu de Conakry », Jean-Christophe Rufin 

Le suspendu de Conakry, c’est un polar, ou plutôt une fantaisie policière, signée par l’académicien-médecin et ex-ambassadeur au Sénégal Jean-Christophe Rufin, qui tire plus vite que son ombre : il publiera en effet dès la rentrée la suite de cette série consacrée aux enquêtes d’Aurel le consul. Malgré son accent roumain et son passé de pianiste de bar, Aurel Timescu est Consul de France en Guinée, où il s’habille comme en hiver, boit du tokay et compose des opéras. Jusqu’au jour où un riche plaisancier blanc est retrouvé suspendu au mât de son voilier. Suspendu et assassiné d’une balle de gros calibre. J’ajoute que le coffre-fort et la petite amie de la victime ont été forcés. L’occasion rêvée pour Aurel Timescu de distraire son ennui et de mener l’enquête. Un thriller diplomatique... 

► Publié chez Flammarion

« Ma grande », Claire Castillon 

Dans ce bref roman, Claire Castillon se glisse dans la peau d’un homme. D’un homme que sa femme a  martyrisé pendant 15 ans et qu’il a tuée. Je ne dévoile rien, c’est écrit en quatrième de couverture : 

La vérité c’est : je t’ai tuée et c’est tout. J’ai sans doute pas raison. Je regrette rien, et c’est mal. 

Le livre se présente en effet comme un monologue, une confession. Ils s’étaient rencontrés à la piscine, avaient eu le coup de foudre, s’étaient mariés à Las Vegas, avaient acheté un pavillon en banlieue, et même eu un enfant. Et puis elle l’avait humilié, dévalorisé, cassé, appelé « gros nase », mais il était resté, à la fois lâche et impuissant. « Tu étais tarée, ma grande, mais ça paraissait pas » ;  « Tu me faisais des brûlures et je débrûlais jamais » ; et à la fin : « ça prend du temps de s’alléger ».

► Publié chez Gallimard

Autant en emporte l’histoire
53 min

« Ecstasy and me. La folle autobiographie » d’Hedy Lamarr 

Ecstasy and me, c’est, comme l’indique le sous-titre « la folle autobiographie » d’Hedy Lamarr. Née à Vienne, en 1914, sous le nom de Kiesler, elle fit ses débuts, à 16 ans et à poil, dans un film érotique, Extase, interdit par Hitler et condamné par le pape Pie XII. Elle devint ensuite, dans les années 40, une star d’Hollywood, où elle ravagea les cœurs de Sam Spiegel, Robert Capa, Errol Flynn, Jean-Pierre Aumont, Charlie Chaplin, Orson Welles, Otto Preminger. Elle se maria six fois et fut sacrée « plus belle femme du monde ». Féminine et féministe, l’actrice de Samson et Dalila tourna aux cotés de Clark Gable, John Garfield, Spencer Tracy, avec Cecil B. DeMille et Victor Fleming.  Elle était aussi passionnée de sciences : elle inventa les variations de fréquence qui permettent de guider les torpilles et qui sont  aujourd'hui  utilisées dans le wifi, le GPS et le Bluetooth. Le documentaire d’Alexandra Dean, sorti en salles il y a dix jours, s’intitule d’ailleurs : Hedy Lamarr, From extase to wifi

Quant au livre, traduit par Charles Villalon, rien ne prouve qu’il soit d’elle. Ce serait plutôt l’œuvre de deux  journalistes du "Hollywood Reporter", l’un enregistrant ses confidences, l’autre les mettant au propre. Elle est morte en 2000, à 85 ans.

► Publié chez Séguier

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