

En Allemagne, la CDU, le parti d’Angela Merkel, se réunit pour désigner son nouveau chef. C’est le début du processus électoral qui va conduire à l’élection en septembre du nouveau chancelier allemand. Et c’est donc le début d’une succession que toute la planète va surveiller. C'est le monde d'après.
Tout contribue à rendre passionnante, cette année électorale allemande.
D’abord, bien sûr, il y a ce défi, énorme, de succéder à Angela Merkel. Difficile de faire plus compliqué. Une page d’Histoire va se refermer le 26 septembre prochain, date des élections. La chancelière aura passé 16 ans au pouvoir. Personne n’aurait parié dessus lorsqu’elle l’a emportée pour la première fois en 2005 : on l’a oublié, mais à l’époque sa notoriété était encore faible et sa majorité fragile.Trois fois réélue depuis, elle a imposé sa marque de fabrique : un mélange de détermination et de calme.
Elle a préservé la cohésion de son parti, la CDU qui lui doit de caracoler en tête des sondages, 36% des intentions de vote. Elle s’est imposée comme le point d’équilibre de l’Union Européenne, qu’elle vient de présider pendant 6 mois avec un bilan flatteur. Elle a impressionné par sa gestion de l’épidémie de Covid, même si la situation se dégrade depuis mi-décembre en Allemagne. Lui succéder semble tellement compliqué qu’il existe même des voix dans son parti pour murmurer qu’une cure d’opposition serait presque plus simple.
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En plus, évidemment, il y a ce fait majeur, historique : c’est une femme. La 2ème femme seulement, après Margaret Thatcher, à avoir dirigé un grand pays occidental dans l’Histoire moderne. Et on a d’ailleurs cru, pendant quelques mois qu’une autre femme allait lui succéder : Annegret Kramp Karranbauer, AKK, mais elle a jeté l’éponge.
Cinq noms sur la ligne de départ
Ce sera donc un homme. Et ils sont plusieurs sur la ligne de départ, trois en première ligne avec un vrai suspense politique. Là aussi, passionnant, un peu comme lors des élections primaires aux États-Unis. Premier round donc, demain et après-demain : les délégués de la CDU doivent désigner leur nouveau chef. Sur les rangs:
- Léger favori, Friedrich Merz, 65 ans, un vieux rival de Merkel : visage taillé à la serpe, il incarne l’aile droite du parti, libéral en économie, conservateur sur les questions de société.
- Ensuite, il y a son opposé, Armin Laschet aussi rond que Merz est carré. 59 ans, le visage rondouillard et souriant, c’est l’héritier de Merkel, de centre droit.
- Enfin, il y a le troisième larron, Norbert Röttgen, 55 ans, spécialiste de politique étrangère, qui pourrait tirer les marrons du feu après une campagne très dynamique sur les réseaux sociaux.
Normalement, le chef de la CDU a vocation à mener le parti pour les élections, et a donc de bonnes chances de devenir chancelier. Mais cette fois-ci, ce n’est pas sûr. Comme dans les Trois Mousquetaires, il y a un 4ème, voire un 5ème homme.
Jens Spahn, l’actuel ministre de la Santé, un portefeuille qui compte aujourd’hui. Beaucoup plus jeune, 40 ans. Il n’est pas candidat pour diriger le parti, mais rien n’interdit qu’il le mène aux élections. Les deux fonctions peuvent être dissociés. Et enfin Markus Söder : lui n’est pas membre de la CDU. Il dirige le Land de Bavière et la CSU, le parti frère de la CDU dans cette région. Il est très populaire, et pourrait très bien se retrouver investi au niveau national par le parti de Merkel, même s’il n’en est pas membre.
Bref, suspense complet, et les couteaux s’affutent.
Plusieurs alliances possibles
Et toute la planète regarde parce qu’il y a beaucoup en jeu.
De quel côté penchera le nouveau chancelier ? S’il doit bâtir une alliance de gouvernement, avec qui ? Avec les Verts, comme certains le prédisent ? Avec les libéraux ? A nouveau avec les sociaux-démocrates ? Selon qui sort du chapeau, entre les 5 noms évoqués à l’instant, ce ne sera sans doute pas la même chose.
L’avenir de l’Europe en dépend en partie : sur les mécanismes de solidarité budgétaire, la politique climatique, la question des réfugiés, l’autonomie en matière de Défense. Tous les grands partenaires de l’Allemagne sont sur le qui-vive : les Etats-Unis version Biden, la Chine, et bien sûr la France. D’autant que, coïncidence du calendrier, la France votera dans la foulée de l’Allemagne, 7 mois plus tard.
Ce n’est d’ailleurs pas un calendrier électoral très confortable pour Emmanuel Macron. Il va sans doute se retrouver en campagne pour sa réélection (une position qui affaiblit mécaniquement à l’international), au moment où l’Allemagne aura vu entrer en fonction un nouveau chancelier fort de sa nouvelle légitimité.
C’est tout ce meccano qui s’enclenche à partir de demain. Fascinant.
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