La cacophonie européenne sur le virus est repartie pour un tour

Tests à la frontière grecque pour tous les ressortissants venant de Bulgarie et de Roumanie
Tests à la frontière grecque pour tous les ressortissants venant de Bulgarie et de Roumanie ©AFP - Nicolas Economou / NurPhoto / NurPhoto via AFP
Tests à la frontière grecque pour tous les ressortissants venant de Bulgarie et de Roumanie ©AFP - Nicolas Economou / NurPhoto / NurPhoto via AFP
Tests à la frontière grecque pour tous les ressortissants venant de Bulgarie et de Roumanie ©AFP - Nicolas Economou / NurPhoto / NurPhoto via AFP
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En fin de semaine dernière la commission européenne a appelé les 27 pays européens à coordonner leurs mesures anti Covid. Mais on est loin du compte : on pourrait même dire qu’en la matière, on a fait marche arrière. Les Européens avancent à nouveau en ordre dispersé. C’est le « monde d’après ».

On y a pourtant cru, début juillet. Avec la levée des frontières à l’intérieur de l’Europe et le rétablissement d’une circulation quasiment libre pour les citoyens de l’Union. Avec aussi l’adoption de ce plan de relance très ambitieux qui entérine pour la première fois une vraie solidarité entre les 27.

Et puis patatras ! Chassez le naturel, il revient au galop ! Petit à petit depuis un mois, la cacophonie du printemps dernier est revenue. Chaque pays s’est mis à prendre ses décisions dans son coin. 

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C’est vrai sur les frontières : on a tout le panel. Depuis la Hongrie quasiment fermée au monde extérieur jusqu’à la Suède, toujours ouverte. En passant par le Danemark qui ne veut pas des Français, les Autrichiens qui ne veulent pas des Slovènes, etc.

C’est vrai aussi sur le port du masque : obligatoire à l’intérieur en France ou en Belgique, mais uniquement dans certains lieux dans d’autres pays. Vrai encore sur la quatorzaine après une suspicion de contamination : sa durée varie d’un pays à l’autre. Vrai enfin sur l’interprétation des tests. Par exemple, en Irlande, même si on arrive avec un test négatif, on part en quatorzaine.

J’arrête l’inventaire. Vous avez compris. Une chatte n’y retrouverait pas ses petits. Le « nationalisme sanitaire » a fait son grand retour depuis un mois, depuis que les cas sont vraiment repartis à la hausse dans plusieurs pays.

Vers un code couleur rouge orange vert

En face la commission européenne a eu, comme au printemps dernier, un peu de retard à l’allumage. Mais depuis la fin de la semaine dernière, ça se réveille en effet.

En grande partie sous pression du Parlement européen et aussi sous impulsion franco-allemande : Paris et Berlin préconisent l’harmonisation. Soit dit en passant, c’est un peu l’hôpital qui se moque de la charité puisque la France et l’Allemagne ne font pas la même chose sur la gestion de leur frontière ou sur la quatorzaine. Mais bon peu importe. 

Le résultat est quand même là : la commission européenne est enfin montée au créneau pour dénoncer ce « kaléidoscope ». Et vendredi, la présidente de la commission, Ursula Von der Leyen, a annoncé la couleur, c’est le cas de le dire. Objectif : mettre en place, d’ici au 22 septembre, un code couleur uniformisé en Europe, rouge, orange, vert. En fonction du nombre de tests pratiqués par habitant, et du nombre de cas positifs. Et la couleur serait attribuée par régions, ce qui est pertinent, puisqu’on l’a vu depuis mars : il y a beaucoup de différences entre les régions à l’intérieur d’un même pays.

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Tout cela parait sensé. Il s’agit à la fois de préserver la liberté de voyager au sein de l’Union, et bien sûr d’afficher un symbole politique d’unité retrouvée. Tout cela parait sensé. Mais ce n’est pas gagné.

L'Europe de la santé en recul

En réalité, on est encore loin d’une Europe de la santé. Sur ce sujet précis, on a même plutôt reculé d’une case. 

Je m’explique : en mai dernier, la commission annonçait plus de 7 milliards pour la santé dans le futur plan de relance. Sauf qu’entre temps, ils ont disparu. Ils ne sont plus dans le plan adopté cet été. La raison est simple : chaque pays veut conserver cette prérogative chez lui, et la peur d’une 2nde vague alimente le repli nationaliste un peu partout.

C’est donc le statu quo, ne serait-ce qu’au niveau institutionnel : l’Europe compte 5 agences de santé différentes (une sur les maladies, une sur les médicaments, une sur la santé au travail, etc) mais elles ne coopèrent pas entre elles. Et surtout elles manquent de pouvoirs et de moyens. Un seul exemple : la plus connue, l’ ECDC basée à Stockholm compte 30 fois moins de salariés que son homologue américaine basée à Atlanta.

Tout dans cette crise met pourtant en évidence la nécessité d’une harmonisation européenne:

  • pour cartographier la propagation du virus, pour mieux décompter les cas, 
  • pour définir les seuils de contagion critiques, 
  • pour partager les informations sur la validité des tests, 
  • pour contraindre les industriels de santé à travailler ensemble.

Tout plaide pour l’échelon européen. Dans l’intérêt supérieur de la santé publique. Et pourtant chacun se recroqueville derrière ses petites frontières. C’est quand même un peu consternant.

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