Ukraine: les médiations (Turquie, Israël, Chine) ont peu de chances d'aboutir pour l'instant

Le premier ministre israélien Naftali Bennett s'est rendu à Moscou le 7 mars voir Vladimir Poutine
Le premier ministre israélien Naftali Bennett s'est rendu à Moscou le 7 mars voir Vladimir Poutine ©AFP - RONEN ZVULUN / POOL / AFP
Le premier ministre israélien Naftali Bennett s'est rendu à Moscou le 7 mars voir Vladimir Poutine ©AFP - RONEN ZVULUN / POOL / AFP
Le premier ministre israélien Naftali Bennett s'est rendu à Moscou le 7 mars voir Vladimir Poutine ©AFP - RONEN ZVULUN / POOL / AFP
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La guerre en Ukraine est donc entrée dans sa 3ème semaine. Et plusieurs pays s’essaient à des formes de médiation entre Moscou et Kiev. La plus visible, c’est l’initiative turque, avec une vraie séance de négociations aujourd’hui dans la ville d’Antalya au Sud de la Turquie.

C’était une première depuis deux ans : les deux ministres des affaires étrangères ukrainien et russe face à face autour d’une même table.

Sergueï Lavrov et Dimitri Kuleba ont échangé pendant près de 2h. Leur homologue turc, Mevlüt Cavusoglu a qualifié les échanges de « civilisés ».

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C’est déjà ça : la preuve que se voir reste possible.

Pour faire se parler deux pays en guerre, il faut un tiers acceptable pour les deux parties.

C’est le cas de la Turquie. Et son initiative est donc bienvenue.

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Membre de l’Otan, elle livre des drones à l’Ukraine et bloque l’accès à la Mer Noire aux navires russes. Mais elle évite de condamner trop fermement Moscou. Et comme elle sait montrer les muscles, elle a le respect de Poutine.

En plus, la Turquie a tout intérêt à voir le conflit cesser.

Pour des raisons économiques : Ankara, déjà frappé par une inflation galopante, a besoin du gaz et du blé russes, et aussi des touristes russes et ukrainiens (une manne pour la Turquie, 6 millions de visiteurs).

Et puis à 15 mois d’élections générales qui s’annoncent très serrées, le président turc Erdogan espère marquer des points sur sa scène politique intérieure.

Cela dit, la négociation de ce matin a fait chou blanc. Pas de cessez-le-feu. Aucun accord. Rien à part l’hypothèse très floue d’une éventuelle rencontre Poutine-Zelensky.

Bref, la Turquie essaie, et à visage découvert. Mais sans succès.

A Moscou un jour de Shabbat

Le deuxième pays à essayer, c’est Israël ! Et  là, c’est plus informel. Pas de négociation devant les caméras. Pas davantage d’ailleurs d’initiative coordonnée avec la Turquie.

Plutôt des consultations bilatérales avec les deux belligérants. Le premier ministre israélien Naftali Bennett a repris la méthode « d’avant-guerre » d’Emmanuel Macron.

Comme la Turquie, Israël a des atouts et des intérêts bien compris qui en font un médiateur potentiel, acceptable pour les deux camps.

Le zoom de la rédaction
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D’abord, il y a les liens avec les communautés juives russe et ukrainienne. 15% de la population israélienne est russophone. Le président ukrainien est juif. La ville d’Odessa est parfois surnommée « Jérusalem d’Europe ».

Ensuite, Israël n’a pas de conflit direct avec Moscou. Et comme la Turquie, Israël est une puissance qui sait recourir à la force. Donc respect de Poutine.

Ça va plus loin : les Russes, qui maîtrisent l’espace aérien en Syrie, laissent les Israéliens frapper régulièrement des cibles iraniennes dans la région.

Enfin Israël compte sur Moscou pour peser dans les négociations sur le nucléaire iranien à Vienne, et éviter un accord trop favorable à Téhéran, le grand ennemi.

Naftali Bennett s’est donc rendu à Moscou samedi dernier, en plein Shabbat, un fait rarissime. Il est le seul dirigeant étranger à avoir fait ce déplacement depuis le début de la guerre.

Et l’un de ces ministres, originaire de Kharkiv en Ukraine, sert même de traducteur avec Poutine !

Donc oui, Israel possède aussi une carte à jouer. Et cette initiative est plutôt bien vue à Paris ou Berlin.

Sauf que là encore, jusqu’à présent, chou blanc. Aucun résultat visible.

Le rêve chinois

Reste la Chine.

C’est l’hypothèse la plus audacieuse. Le français Jean-Yves Le Drian en a parlé aujourd’hui même avec son homologue chinois.

Pour l’instant, Pékin regarde. Et se contente de dire :

« Nous sommes prêts à jouer un rôle de médiation le moment venu ».

Dans cette phrase, la formule-clé, c’est « le moment venu ».

Comme toujours, la Chine mise sur le temps long et ne veut pas prendre d’initiative précipitée. Peut-être espère-t-elle aussi voir la situation s’enliser pour mieux proposer ensuite ses services.

Une chose est certaine : la Chine, elle aussi, n’a aucun intérêt à une guerre interminable et à une déstabilisation économique générale.

Elle est l’alliée de Moscou, mais elle est aussi le premier partenaire commercial de l’Ukraine et elle a tout à perdre à un ralentissement économique occidental.

A l’inverse, elle a tout à gagner à jouer les Salomon, apparaître comme le « courtier honnête » qui fait le « go between ».

Ce serait même un monde idéal pour son image : devenir une puissance d’équilibre.

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Mais bon, tout cela reste très théorique. On voit mal les Occidentaux et surtout les Etats-Unis laisser Pékin endosser ce rôle.

Là encore, on est donc loin du compte.

En résumé, les médiateurs potentiels vont avoir beaucoup de mal.

Surtout que jusqu’à présent, Vladimir Poutine ne semble pas en humeur de négocier. De négocier vraiment, j’entends.