

Samedi dernier, lors des journées du patrimoine, environ 20.000 visiteurs ont déambulé dans le palais de l’Elysée. Ils ont découvert les salons, la cour, le jardin. Un jeune chômeur est alors sorti de l’anonymat à la faveur d’une rencontre avec le chef de l’Etat.
Il y avait donc du monde le weekend dernier au palais de l'Elysée ; des milliers de visiteurs qui ont découvert la salle du conseil des ministres et celle où se déroulent les dîners d’Etat. Ils ont pu arpenter la cour, se promener dans les jardins et ils ont même pu voir le président de la République ! Emmanuel Macron est venu serrer les mains, il a fait des selfies, des sourires, des bisous, signé des autographes, baptisé des bébés, guéri quelques lépreux et répondu à ceux qui l’ont apostrophé.
Aidez les retraités ! N’oubliez pas l’écologie ! Pourriez-vous, s’il vous plaît, nommer mon père général ?
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Un jeune homme lui demande ses conseils pour devenir énarque ! Un autre l’interpelle.
Quand on est en recherche d’emploi, vous ne faites rien pour nous !
Le président s’arrête. La discussion s’engage. Le garçon porte un sweat à capuche, il a 25 ans, les cheveux coupés ras, de l’embonpoint, et il raconte qu’il est inscrit à Pôle Emploi, mais qu’il a beau envoyer des CV et des lettres de motivation, on ne le rappelle jamais.
Et vous voulez travailler dans quel secteur ?
De base, je suis horticole.
Il rêve donc un boulot dans l’horticulture. Mais Emmanuel Macron l’invite alors à s’orienter vers le bâtiment, l’hôtellerie, la restauration. Des secteurs qui embauchent.
Vous allez à Montparnasse par exemple… Honnêtement, hôtel, café, restaurant, je traverse la rue, je vous en trouve !
Je traverse la rue, je vous trouve un poste
La petite phrase présidentielle enflamme illico les réseaux sociaux. On se moque et on ironise. « Tu cherches un taf ? Traverse la rue ! » « Attention, trois millions de personnes vont bientôt traverser la rue ! » « Au restaurant, c’était dégueulasse ; le cuisinier horticulteur... »
Dans l’opposition, on dénonce un président donneur de leçon ; mépris de classe et postulat que les chômeurs sont des faignants. Bien sûr, dans la majorité, on défend le chef de l’Etat : il a le mérite de ne pas faire dans la langue de bois, et puis faut savoir s’adapter au marché du travail !
Voilà le jeune horticulteur devenu le symbole d'un paradoxe français : un chômage de masse et pourtant des centaines de milliers d'emplois non pourvus
On organise des débats... « Sur la forme, Macron a eu tort, mais sur le fond, il a raison : c’est vrai qu’il y a des chômeurs qui pourraient être plus arrangeants ! » « Non, même sur le fond, il a tort et il va rendre dépressive toute une génération ! » Puis on apprend l’identité du jeune homme au sweat à capuche : il s’appelle Jonathan Jahan. Certains disent qu'il est « aussi dangereux politiquement que Leonarda »...
Vous vous rappelez Leodarna ? C’était en 2013 : une jeune Kosovare expulsée avec sa famille et le chef de l’Etat de l’époque qui lui avait proposé de revenir en France pour reprendre ses études, mais sans ses parents. Devant les caméras, l’adolescente l’avait alors envoyé paître. « Hollande, c’est mort ! »
Des analystes avancent que la situation de Jonathan s'en rapproche. Sur les plateaux de télévision, dans les journaux à la radio, il a confié qu’il avait été blessé par les paroles d’Emmanuel Macron.
Ça m’a fait mal, c’est comme si j’avais pris une claque et je l’ai en travers de la gorge. Macron ne vit pas dans la réalité. Il est complètement à côté de la plaque !
Le jeune homme de préciser qu’il a déjà effectué des tas de boulots différents : de la soudure en métallurgie, des préparations de commandes, même la plonge dans les cafés. Mais prenant au mot le président de la République, il a quand même été déposer son CV et une lettre de motivation dans les restaurants de Montparnasse. En somme, il a donc accepté de traverser la rue ! Sans succès semble-t-il… Des internautes se sont gaussés.
Normal si ça ne marche pas, vous avez vu comme il écrit ?
Ils ont exhumé des extraits de sa page Facebook où, de fait, Jonathan s’exprime en phonétique. Ils ont dégoté des photos : Jonathan apprécie les feuilles de cannabis. L’horticulture, après tout, ce n’est pas que les massifs de roses !
Depuis sa soudaine notoriété, le jeune homme au sweat à capuche croule sous les propositions
Des pépinières et des mairies se disent prêtes à l’embaucher dans le Loiret où il habite mais quand même à une soixantaine de kilomètres de chez lui… Problème, il n’a pas de permis. D’ailleurs, dans l’entourage du chef de l’Etat, on assure que Jonathan aurait refusé des offres. La fédération du secteur a promis de suivre son cas. Son portable ne cesse de vibrer, et Jonathan est dépassé
Je ne peux pas dire 'oui' à tout...
Il est perdu, déboussolé, perturbé d’être au centre de l’attention médiatique.
Je ne sais plus où j’en suis, c’est trop, ça arrive trop vite…
Ce vendredi, il espère décrocher la première partie d'un concours pour être jardinier à la mairie de Paris. Qui sait, peut-être sera-t-il un jour l'un des jardiniers du palais de l'Elysée.
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