Les Morts de la Rue

Un SDF rue de Rivoli
Un SDF rue de Rivoli ©AFP - KENZO TRIBOUILLARD
Un SDF rue de Rivoli ©AFP - KENZO TRIBOUILLARD
Un SDF rue de Rivoli ©AFP - KENZO TRIBOUILLARD
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Au lendemain de la Toussaint, Frédéric Pommier évoque, dans un slam, la mémoire d’hommes et de femmes qui font rarement la Une de l’actualité.

Des hommes et des femmes qui vivaient dans la rue. Dormaient dans le métro ou les halls des immeubles. Dormaient sur des cartons et parfois sous la pluie. Des hommes et des femmes qui sont morts dans la rue. Sur des cartons et sous la pluie. On en compte en moyenne 500 chaque année en France. Moyenne basse ; sans doute sont-ils bien plus nombreux… 

Les accidents, le manque de soin, le froid, l’isolement, l’épuisement, les agressions… L’espérance de vie de ceux qui passent leurs nuits dehors est de 49 ans. Une association, « Les Morts de la Rue », recense les décès – déjà près de 350 depuis le mois de janvier… Elle tente de retrouver le passé de ces hommes, ces femmes qui étaient sans-abri… Elle leur rend leur histoire, et d’abord, leur identité. 

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Henri-Paul se faisait appeler « Astérix »

Mort à Lille, au printemps, à 68 ans

Jean-Claude se faisait appeler « Le Cow-Boy »

Mort le 1er mai à Saint-Etienne, 64 ans

Alain se faisait appeler « La Tortue »

Mort dans les Yvelines, cet hiver à 62 ans

Jean-Pierre se faisait appeler « Trésor »

Mort à Saint-Denis, fin janvier, 60 ans

André se faisait appeler « Chapeau rouge »

Mort à Paris, plein été, à 55 ans

Paul avait choisi comme surnom « Chico »

Mort à Perpignan, en mai, 49 ans

Sylvain, lui, se faisait appeler « L’Indien »

Mort à Saint-Jean-d’Angély, 48 ans

Quant à Emmanuel, on l’appelait « Manu »

Il est mort à Biarritz, à 42 ans

Que vivaient-ils ? Que faisaient-ils ?

Pourquoi étaient-ils à la rue sans domicile ?

On ne sait pas leur nom.

Non, juste un prénom.

Et parfois, on connaît uniquement le jour de leur mort.

Le 4 février… Elle s’appelait Suzanne

Elle est morte à Paris… Suzanne avait 63 ans

Le 26 juin… Elle s’appelait Marie-Christine

Paris, là aussi… Et là aussi, 63 ans

Le 30 juillet… Elle s’appelait Martine

Elle est morte à Lille… Martine avait 58 ans

Le 30 mars… Elle s’appelait Brigitte

Elle est morte à Marseille… Brigitte avait 45 ans

Le 22 mai… Elle s’appelait Zohra

Paris, de nouveau… Zohra avait 44 ans

Le 31 août… Elle s’fappelait Isabelle

Elle est morte à Strasbourg… Isabelle avait 40 ans

Le 28 mai… Elle s’appelait Bintou

Paris, encore Paris… Bintou avait 36 ans

Le 9 mars… Elle s’appelait Anaïs

Elle est morte à Bordeaux… Anaïs avait 35 ans

Que vivaient-elles ? Que faisaient-elles ?

Pourquoi étaient-elles à la rue sans domicile ?

On ne sait pas leur nom.

Non, juste un prénom.

Et parfois, on connaît uniquement le lieu de leur mort.

Pau… un homme de 78 ans

Tarbes… un homme de 64 ans

Les Mureaux… un homme de 52 ans

Dieppe… un homme de 48 ans

Toulouse… une femme de 46 ans

Montpellier… un homme de 45 ans

Annecy… une femme de 43 ans

Vannes… un homme de 41 ans

Lyon… un homme de 40 ans

Cannes… un homme de 39 ans

Rouen… Un homme de 31 ans

Valence, un homme d’environ 30 ans

Rennes… une jeune-femme de 23 ans

Croisilles… un jeune-homme de 19 ans

Saint-Martin-Boulogne… une jeune fille de 16 ans

Pontoise… un bébé… il avait une heure

Que vivaient-ils ? Que faisaient-ils ?

Pourquoi étaient-ils à la rue sans domicile ?

On ne sait pas leur nom.

Pas même leur prénom.

D’eux, on sait simplement qu’ils vivaient dehors et qu’ils sont morts.

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