Être mère : est-ce si naturel ?

Être mère : est-ce si naturel ?
Être mère : est-ce si naturel ? ©Getty - damircudic
Être mère : est-ce si naturel ? ©Getty - damircudic
Être mère : est-ce si naturel ? ©Getty - damircudic
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L’image de la mère, douce et patiente, qui comprend instinctivement comment entrer dans la maternité, est, aujourd’hui encore, très répandue. Mais la réalité n’est pas si lisse, et le poids mental et physique qui pèse sur les mères pendant les premiers mois de vie des enfants est souvent tu.

Avec
  • Renée Greusard Journaliste à Rue89 et créatrice de la rubrique Tinder Surprise

Les inégalités au sein du couple en termes d’heures passées à s’occuper des enfants persistent, et la fatigue des nouvelles mères est bien réelle, et très pesante au moment du retour au travail. Beaucoup ne découvrent cette face de la maternité qu’en la vivant, et ont l’impression de ne pas avoir été prévenues, que personne ne leur a dit quelles seraient les conséquences de l’épisiotomie, que le congé maternité serait accompagné d’une immense fatigue, et à quel point les premiers mois de la maternité peuvent être durs.

Moi je suis maman d'un petit garçon de 6 ans et… ça va mieux. Les débuts ont été difficiles, pour dire ça.  Moi j'avais considéré que ça allait être le job de ma vie, que ça allait être super, que j'allais être une super maman, que tout allait bien se passer… et ça s'est vraiment pas bien passé. Au delà des nuits sans sommeil, c'est beaucoup de culpabilité comme vous le disiez. De culpabilité de s'énerver contre son bébé, de culpabilité d**'avoir l'impression de ne pas faire bien alors que les autres y arrivent**. Et avec les années je me suis rendue compte qu'elles n'y arrivaient pas non plus, mais qu'on ne le disait pas."

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Il semble que, même aujourd’hui, il y a, sinon un tabou, un non-dit sur les difficultés d’être mère au début. Les femmes qui en souffrent sont souvent mal accompagnées, et pour beaucoup, cela peut conduire à un état de stress et de dépression post-partum. Certaines en viennent à regretter parfois leur maternité, et taisent ce sentiment avec honte…

  • Pourquoi les expériences négatives de la maternité sont-elles tues ?
  • Comment mieux accompagner les mères de jeunes enfants ?
  • Comment lutter contre les inégalités persistantes au sein des couples avec enfant ?

Avec nous pour en parler ce soir :

  • Renée Greusard, Journaliste auteure de Choisir d’être mère (Editions Jean-Claude Lattès, 2 février)
  • Heini Martiskainen, Sociologue spécialiste de la famille. Elle a travaillé sur les manières dont les femmes parlent de leur maternité.

Extraits de l'entretien

Renée Greusard : "Je croyais que ce serait le job de ma vie…" Ce discours existe. C'est l'image de la madone, de la mère parfaite qui pèse sur les femmes. Personne ne parle de la difficulté d'être mère à commencer par les mères elles-mêmes.

Il y a l'idée qu'il ne faut pas en dégouter les autres. Comme si c'était un cadeau qu'on vous faisait, et que si on vous en donnait le prix, ce n'en serait plus un. C'est un secret bien gardé entre mères."

Heini Martiskainen : "Parler de sa difficulté à devenir parent peut être socialement sanctionné. J'ai étudié des conversations entre mères. On peut être exclue quand on se plaint, tellement la maternité est normée, idéalisée et éloignée de la réalité."

La 3e révolution féministe n'a pas changé l'image de la mère

Heini Martiskainen : "La parentalité est très investie affectivement .

Nous avons moins d'enfants, nous les avons plus tard et nous investissons plus. Il y a plus de pression. La volonté d'être un bon parent est un enjeu identitaire important.

L'idéalisation de la mère s'est déplacée : l'enfant est devenu un objet quasiment sacré dans la société. Depuis les années 1950, les discours, et les professions spécialisées dans l'enfance se sont développés. On est entouré de conseils, dont le discours psy centré sur le bien-être de l'enfant. On ne croit plus à la mère au foyer avec son tablier qui se consacrait à son mari, à ses enfants. Mais on adhère à une idéalisation de l'enfance qui donne plus de valeur au bien-être de l'enfant."

Ne pas être seule face à son enfant et à ses difficultés à l'élever

Renée Greusard : "Je suis marquée par une vision de la maternité venu du Sénégal. Ma mère disait : "Un enfant, c'est bien, avec plusieurs mains pour s'en occuper, c'est mieux".

Laisser une femme toute seule avec un tout petit bébé qui pleure est inhumain.

Même les psychologues le disent. On n'est pas fait pour être seule face à un enfant."

Une auditrice : "Je me suis demandé si je n'ai pas fait une très grosse erreur en choisissant d'avoir un enfant. C'est terrible à penser, mais ça fait beaucoup de bien quand on peut en parler."

Renée Greusard : " Si je dénonce les conditions de réalisation de la maternité aujourd'hui, c'est parce que les enfants sont aussi victimes. Si les mères sont mal pendant leur congé maternité, ce n'est pas bon pour eux. Dans les livres il est écrit qu'il faut respecter les besoins des enfants.

Mais les parents ont aussi besoin de respecter les leurs. Comment peut-on imaginer qu'on va prendre soin des enfants sans prendre aussi soin des parents ?"

Adapter la société aux parents pour qu'ils puissent mieux accueillir leurs enfants

Renée Greusard : "Il n'y a pas d'espace imaginé pour les enfants dans les bars, ou les restaurants. "Les 400 coups", le bar de la Cinémathèque à Paris est un endroit génial. C'est un restaurant avec à l'intérieur un petit espace où les petits peuvent jouer, dessiner sur un tableau, faire des choses avec de petits personnages. Et pendant ce temps, les adultes, peuvent vivre leur vie d'adultes, ce qui est très important."

Toutes différentes

Renée Greusard : "On est toutes différentes, il est normal qu'en tant que mère, on le soit aussi. Je suis quelqu'un d'assez sociable. J'aime voir des amis et faire la fête. Je ne vais pas avoir la même réaction toute seule face à un nourrisson qui pleure que quelqu'un qui n'a aucun problème avec la solitude."

La suite est à écouter...

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