

Le Prix Mo Ibrahim, décerné par un jury d'honneur, longtemps présidé par Kofi Annan, ex-secrétaire général de l'ONU, va à un chef d'état ou de gouvernement qui a quitté son poste dans des conditions normales après avoir correctement rempli son mandat. Il est doté d'une somme de 5 millions de dollars.
-Le tend se tend en Guinée... Face à face le président sortant Alpha Condé, 82 ans, candidat à un troisième mandat et son opposant de longue date Cellou Diallo...
Hier l'opposant a proclamé sa victoire avant l'annonce officielle des résultats... Cris de joie de ses partisans mais aussi détonations et gaz lacrymo dans les rues de Conakry... Les difficiles transitions démocratiques en Afrique... Dans l'histoire récente, un homme a essayé et essaye toujours de lutter contre ce phénomène, il s'appelle Mo Ibrahim...
Mo Ibrahim? C'est un homme d'affaires anglo-soudanais qui a fait fortune en équipant l'Afrique en téléphones cellulaires. En Afrique, la modernisation ne se fait pas dans le même ordre qu'en Europe, l'hélicoptère et l'avion précèdent les routes et l'équipement routier et le haut débit l'eau courante.
En 2006, Mo Ibrahim a vendu son entreprise 3 milliards 400 millions de dollars. Il l'a fait un peu contraint mais depuis, il s'est dit que c'était une bonne chose de s'ouvrir une nouvelle vie. Il a créé une Fondation qui compile les statistiques de 54 états du continent et tel un scanner , évalue pays par pays- les Soudans exceptés faute de chiffres suffisants- les réussites et les pathologies des uns et des autres : sécurité et protection du citoyen, participation démocratique et droits de l'homme, développement économique durable condition de la croissance, protection sociale, santé, éducation...
-C'est l'indice Mo Ibrahim. Il y a aussi le Prix Mo Ibrahim
Il est doté d'une somme de 5 millions de dollars - c'est peanuts pour lui. Versés de surcroît sur dix ans. Le Prix, décerné par un jury d'honneur, longtemps présidé par Kofi Annan, ex secrétaire général de l'ONU, va à un chef d'état ou de gouvernement qui a quitté son poste dans des conditions normales après avoir correctement rempli son mandat. Avec ce montant, le dirigeant retraité peut vivre confortablement et voyager. De plus, s'il crée une œuvre humanitaire, la somme à lui versée double automatiquement.
Si d'aventure, Alpha Condé doit quitter le pouvoir, il ne pourra être candidat car il a touché à la Loi fondamentale. Alassane Ouattara, le président sortant de Côte d'Ivoire non plus. A 78 ans, il a lui aussi fait réviser la Constitution après la mort inopinée de son successeur désigné afin d'obtenir un troisième mandat. Il a aussi contraint ses plus vieux adversaires au retrait de candidature voire à l'exil. Ce qui fait que la dangereuse présidentielle ivoirienne, fixée au 31 de ce mois, se traite dans les cabinets d'avocats français et internationaux en même temps qu'elle commence à se traiter dans le sang sur place. Et pourtant l'indice Mo Ibrahim de la Côte d'Ivoire était en progression constante...
-Certaines candidatures au Prix se trouvent empêchées mais d'autres, assez nombreuses, sont envoyées à la Fondation chaque année.
Mo Ibrahim n'a pas jusqu'ici à écorner son magot. Depuis qu'en 2007 le prix a honoré à la fois beaucoup Nelson Mandela et l'ex-président du Mozambique, il n'a ensuite été décerné que quatre fois. A un botswanais, à un namibien, à un cap-verdien et à une libérienne. 2018 et 2019 ont été des années blanches. Kabila, en République dite démocratique du Congo aurait pu donner le bon exemple; il a préféré manœuvrer pour faire désigner le fils passablement falot de son vieil adversaire historique Tshisekedi. Mo Ibrahim qui n'a pas sa langue dans sa poche a déclaré que ce tour de passe-passe était une honte.
Il est d'ailleurs à noter que le Prix n'a jamais trouvé l'occasion de récompenser un représentant de l'Afrique francophone.
Mo Ibrahim s'abstient de tout commentaire sur ce point. Mais, malicieux, il questionne : "Croyez-vous qu'en Europe, en quinze ans, on aurait trouvé quinze lauréats ?"
A 74 ans, Mo Ibrahim vit d’ailleurs sur notre continent, à Londres et à Monaco, dont, soit dit en passant, le prince ne peut concourir lui non plus au prix. Il continue de faire sien un proverbe de sa Nubie natale : "Venu au monde nu, je reviendrai à la terre... nu. Je n'emporterai pas ma Master Card".
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