
Le débat sur la croissance revient sur le devant de la scène européenne. Avec la mauvaise surprise du retour de la récession au Royaume-Uni, en Espagne et aux Pays-Bas, plusieurs voix s’élèvent (pas seulement en France) pour réclamer un « pacte européen pour la croissance ». Surprise : même la Commission semble vouloir faire de la croissance.
Payer ses dettes, c’est bien, mais encore faut-il éviter de noyer le moteur européen. Devant le parlement de Strasbourg, la Commission a lancé un appel aux Etats membres il y a quelques jours : mettez des incitants fiscaux pour créer de l’emploi, créez un salaire minimum pour éviter des salaires ultra bas comme en Allemagne, ces salaires faibles qui ne permettent pas de relancer la consommation.
Autre recette : créez des emplois dans les soins de santé, où 700 000 postes seront à pourvoir en 2015, mais aussi dans les nouvelles technologies ou dans l’économie verte. Et pour créer ces emplois, la Commission propose de réduire la fiscalité sur le travail et de la remplacer par la fiscalité verte ou par la fiscalité sur l’immobilier. Un discours de la Commission plus social que d’habitude
- Et cet appel du pied de la Commission est surprenant, compte tenu de ses compétences limitées
La question, maintenant, c’est de savoir comment on va payer ces services aux personnes âgées, cette transition verte, etc. Pour l’instant, à l’image de la chancelière Angela Merkel, plusieurs pays veulent bien faire de la croissance, mais sans mesures de relance, coûteuses pour les budgets publics.
Alors, gadget ou instrument vers plus de croissance, cet appel de la Commission ? C’est toute la question. La balle est dans le camp des Etats membres qui, dans un premier temps, ont augmenté les allocations chômage, ou qui ont autorisé du chômage partiel comme en Belgique et en Allemagne. La crise se poursuivant depuis deux ans, le mot d’ordre c’est, à l’inverse de déréguler le social, de privatiser la protection sociale, alors que ce n’est pas une cause de la crise et que cela ne permettra pas de la surmonter.
- Les marchés financiers commencent, eux aussi, à s’inquiéter de cette austérité radicale et généralisée
L’austérité généralisée ne peut créer de la croissance : l’OCDE, le FMI, les agences de notation, les syndicats et les partis de gauche font la même analyse. A l’heure où l’Espagne, l’Italie, le Royaume-Uni et même les Pays-Bas entrent en récession, à l’heure où le chômage atteint un record (près de 11% dans la zone euro), la Banque centrale européenne réclame, elle aussi aujourd’hui, de la croissance.
Alors comment faire ? La Commission n’a pas de compétence en termes d’emplois et de salaires -les Etats membres ne l’ont jamais voulu, pas plus les gouvernements de droite, que certains gouvernements de gauche dans les pays scandinaves du nord de l’Europe. Il n’y a sans doute pas non plus de plan Marshall pour la croissance. Mais cela n’empêche pas l’Europe d’avoir quelques idées pour la relancer.
Il y a d’abord les « project bonds » : on emprunte pour de grands projets, dans les énergies propres ou les infrastructures.
Autre possibilité : renforcer les capacités de la Banque européenne d’investissement. Sa force de frappe pourrait être démultipliée.
Ces idées, les dirigeants européens vont en discuter en juin à Bruxelles. On ne sait pas ce que ça va donner, mais cela montre une chose : la croissance est déjà dans le débat européen (même si elle n’est citée que trois fois en tant que telle dans le Pacte budgétaire européen) et là, on dirait bien que cela devient une priorité.
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