Tiraillés entre la nécessité de retourner travailler et la difficulté de trouver des solutions de garde pour leurs enfants, les parents doivent être inventifs et le déconfinement vire bien souvent au casse-tête. Les employeurs commencent à les aider, financièrement.
Une petite rue, avec de coquettes maisons dans le centre de Poissy, dans les Yvelines. C'est ici que vit la famille Ameline. Sylvain, le père, est pompier, Delphine, la mère, travaille dans la finance. Un mois après le début du déconfinement, les parents sont encore loin d’avoir retrouvé un quotidien "normal". Et pour une bonne raison : leurs enfants sont toujours à la maison. Jusqu’ici moins de deux millions d’élèves sont retournés à l’école primaire, sur un total de 6,7 millions, soit environ 27 %. Au collège, ils sont 600 000 sur 3,3 millions. Ces chiffres ne disent qu’il ne s’agit que d’un accueil partiel, un ou deux jours par semaine.
L’organisation vire au casse-tête particulièrement quand les parents jonglent avec le télétravail. Quand Delphine travaille, et quand les réunions sur Zoom ou Teams s’enchaînent, il faut trouver une solution pour occuper les enfants. C’est comme ça qu’elle s’est inscrite sur la plateforme Sikidou : un abonnement de 20 euros par mois et elle peut, ensuite, se mettre en relation avec d’autres parents qui se proposent de garder ses enfants quelques heures de temps en temps. Les gardes donnent droit à des points qui permettent ensuite de faire garder ses propres enfants. "C’est une bonne alternative", se félicite Delphine. "Nous avons une nounou qui vient les mercredis mais nous n’aurions pas pu la prendre à temps complet. Cela aurait été trop cher. Le fait de pouvoir avoir des créneaux de deux-trois heures, c’est un bon complément. Et on peut se tourner vers des parents que l’on connait, dans le voisinage."
Les entreprises réclament le retour de leurs salariés sur site
L’entraide entre voisins, entre amis, a permis à certains de souffler, un peu. Mais pour beaucoup, il faut plus. Avec le déconfinement qui s’accélère, les entreprises poussent à la reprise, réclament le retour de leurs salariés dans les locaux. Laurent Tourdes est responsable des partenariats au sein de la société Cogelec en Vendée et il voit bien que pour beaucoup, la reprise n’est pas évidente : "Une cinquantaine de salariés ont des difficultés pour faire garder leurs enfants. Une dizaine n’ont aucune solution." Et cela pèse ; sur ces salariés évidemment, mais aussi sur les autres qui commencent à être surchargés.
Des offres sur-mesure pour les employeurs
L’entreprise a donc commencé à chercher comment elle pouvait aider ses salariés à financer une nounou. Elle s’est tournée vers le groupe O2, spécialiste des services à domicile et elle n’a pas été la seule. "On a vu les demandes des entreprises affluer", confirme Marc Cesbron-Lavau, responsable des partenariats. Au point que le groupe propose désormais des offres sur-mesure pour les employeurs : "Il y a des entreprises qui arrivent avec de gros moyens qui sont capables de financer des prestations. Des CESU peuvent être préfinancés par des entreprises ou par le CSE de l’entreprise. Et puis il y d’autres entreprises qui ont beaucoup moins de moyens et qui nous demandent plus simplement de mettre en place un partenariat avec lequel les salariés bénéficieront d’un avantage client."
Pour Djamila, la solution passe par des carnets de tickets, financés par son employeur, Léonard Sellem, directeur général de "litige.fr." : "Chaque ticket représente trois heures de garde, autour de 30 euros le ticket. L’entreprise bénéfice d’un crédit d’impôt de 50% et les 50% qui restent à notre charge sont déductibles de notre résultat fiscal."
Un coût moindre pour un bénéfice important. "Nous n’avions pas le choix. C’est Djamila qui a mis en place le protocole de reprise, qui permet aux salariés de pouvoir revenir travailler dans les locaux. Il était impératif qu’elle soit physiquement là." explique son directeur.
Pour la salariée, c’est aussi un soulagement. "J’avais essayé de trouver par moi-même mais c’était très compliqué et très cher. Cette solution me donne plus de souplesse dans l’organisation, j’utilise les tickets pour venir au travail évidemment, mais aussi quand je suis en télétravail pour être vraiment efficace."
De nouveaux métiers vont émerger
Et tout cela pourrait se poursuivre. Car la crise du coronavirus a mis cette problématique des gardes d’enfants en lumière. "C’est un problème qui se posera partout encore des mois", confirme Léonard Sellem. Les solutions sont encore rares, l’économie du coronavirus est en train de se mettre en place. De nouveaux métiers vont émerger". Celui-là en fera partie.
La société avec laquelle il a mis en place ce système de tickets, "Nanny Please", ne peut aller que dans son sens : quand elle monte son entreprise, Nihel Bemrah imagine des animations de quelques heures pour prendre en charge les enfants, et soulager les parents, le temps d’un dîner. Elle monte des partenariats avec plusieurs chaînes hôtelières mais avec le confinement et surtout la reprise, elle aussi a été submergée par des demandes d’entreprises. Des petites d’abord, plus agiles, mais aussi des groupes.
"Ça a plus que boosté notre activité. Au point que nous prévoyons une prochaine levée de fonds pour accélérer, investir sur le tech et recruter."
La qualité de vie au travail est au cœur de la relance. Et l’aide à la garde d’enfants semble de plus en plus en faire partie. En tout cas, pour Léonard Sellem, "en terme de confort pour les salariés, cela peut devenir un investissement, au même titre que des tickets restaurants ou une bonne mutuelle."
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