Dans l'espace, les vols habités coûtent cher. Peut-on pour autant s'en passer ? Non, affirment une centaine de "vétérans" de l'espace réunis à Toulouse.
Bertrand Piccard, l'homme aux paris insensés dont le premier tour du monde en avion sans une goutte de fuel, sait ce qu'il doit aux premiers aventuriers de l'espace :
C’est le fait d'avoir rencontré enfant presque tous les premiers astronautes du programme Apollo qui m’a donné envie d’être explorateur. J’ai vu des gens qui allaient au bout de leur rêve et se donnaient les moyens d’y arriver.
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Si la vie de Bertrand Piccard a été inspirée par le programme Apollo, quel destin auront les jeunes qui ont suivi la mission de Thomas Pesquet ? Iront-ils vers les filières scientifiques ? Mine de rien, vu les enjeux d'aujourd'hui – énergétiques, alimentaires, environnementaux – beaucoup d'enseignants-chercheurs y sont sensibles.
Comme François Forget, spécialiste de Mars, pour qui "attirer des jeunes vers la science, sachant que la science et les technologies, c’est ce qui est capital pour l’avenir de la terre, rend les astronautes indispensables. Avec nos robots, on peut participer, mais les astronautes sont sans pareil pour inspirer les jeunes".
Quel message diffuser en priorité ? D'abord celui de la fragilité de la planète et la nécessité de la protéger. De l'espace, le constat est sans appel. Au point de rendre tous les astronautes écolos, même les américains. Philippe Perrin en est convaincu :
Aujourd’hui, on ne monte pas sur une fusée sans faire un pari sur le retour. On ne prend pas des risques pour faire un tour de manège. On le fait car il y a une urgence environnementale, et les astronautes se doivent d’être des ambassadeurs de ces questions.
Un luxe abordable
Mais les vols habités coûtent très cher. Trop cher ? Les robots ne peuvent-ils pas faire le travail ? "Le débat entre robots ou hommes est dépassé, estime Jean-François Clervoy. Les robots sont les éclaireurs, (...) mais les meilleures roches lunaires sont celles rapportées par le géologue Jacques Schmitt."
Selon l'Agence spatiale européenne, dans l'Union, la dépense pour les vols habités est de 1 euro par an et par habitant. Finalement, bien peu au regard des retombées.
Ce qui est difficile, réputé impossible, est un aiguillon pour l'innovation. Les airbags, les panneaux solaires des sondes spatiales, la télémédecine on les a ensuite retrouvés dans notre vie quotidienne.
On peut aussi se demander si entretenir un corps d'astronautes, ce n'est pas aussi une histoire de prestige. On fait partie du club fermé des grandes nations spatiales – ou pas. La dernière à avoir intégré ce cénacle, c'est la Chine. Depuis la mise en orbite de son premier "taïkonaute", en 2003, avec une fusée nationale, Pékin repousse ses limites : depuis 2009, la Chine construit de sa propre station spatiale et, bientôt, elle pense pouvoir aller sur la Lune.
Plus forts ensemble
Il faut dire que, selon Isabelle Sourbès-Verger, chercheur en stratégie spatiale au CNRS, Pékin n'a pas le choix : le pays n'a à ce jour rejoint aucune coopération internationale (ESA, Nasa...).
La Chine coche les cases. En terme d’image, elle ne peut passer à côté de ces compétences que seuls maîtrisent les Russes et les Américains. De plus, le vol habité, par sa difficulté, est un défi intéressant pour les ingénieurs chinois.
Enfin, et on le mentionne rarement, la Station spatiale internationale (ISS) reste l'un des rares projets d'entente multilatérale. Seize pays sont associés au projet, dont la Russie et les États-Unis. Lesquels, on l'aura remarqué, n'ont pas réussi à appliquer sur terre la recette de convivialité qu'ils mettent en œuvre dans l'espace.
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