Hezbollah, les armes de la discorde

Un panneau à l'effigie du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah
Un panneau à l'effigie du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah ©AFP - Mahmoud ZAYYAT
Un panneau à l'effigie du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah ©AFP - Mahmoud ZAYYAT
Un panneau à l'effigie du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah ©AFP - Mahmoud ZAYYAT
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Inscrit sur la liste américaine des organisations terroristes, le Hezbollah a deux visages : l'un politique, l'autre militaire. Dans un Liban en crise, son rôle est devenu incontournable.

Le siège de la machine médiatique du Hezbollah est situé dans une zone ultra sécurisée de la banlieue sud de Beyrouth. Les locaux d’Al-Manar, sa chaîne de télévision, est un véritable bunker sous-terrain, dont les accès sont sévèrement gardés. Les studios et la rédaction sont installés au deuxième sous-sol.

Laila Masboudi est journaliste depuis une quinzaine d'années à Al-Manar. Elle nous rappelle que pendant la guerre de 2006 qui avait opposé Israël au Hezbollah, la chaîne avait été bombardée dès le troisième jour des combats. La télévision avait continué à émettre avec des moyens mobiles.

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Les studios de la chaîne Al-Manar
Les studios de la chaîne Al-Manar
© Radio France - Christian Chesnot

La ligne du parti

Aujourd’hui, Al-Manar dispose de studios flambants neufs. "Un nouveau bâtiment a été construit il y a quatre ans, explique Laila Masboudi. Au total, 300 à 400 personnes travaillent pour la chaîne, dont une cinquantaine de journalistes. Notre principale édition est à 19h30."

A Al-Manar, la ligne éditoriale est clairement affichée. "Nous sommes dans la ligne du parti, poursuit Laila Masboudi, c’est-à-dire celle du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah. Nous ne sortons pas de cette ligne. Mais cela ne veut pas dire que nous ne couvrons pas des événements internationaux ou régionaux."

Laila Masboudi, journaliste pour la chaîne Al-Manar
Laila Masboudi, journaliste pour la chaîne Al-Manar
© Radio France - Christian Chesnot

Au Liban, le Hezbollah gère un réseau d’entreprises, d’associations et de fondations caritatives. Parfois, il donne l’impression d’être un État dans l’État. Le mouvement gère huit hôpitaux au niveau national et de nombreuses cliniques.

En 2014, il a même racheté un établissement chrétien, l'hôpital St Georges de Haddath, aujourd'hui en première ligne sur le front du Covid. L’établissement compte 90 lits et dès le début de l’épidémie, il s’est mis en ordre de bataille.

L’hôpital St Georges victime des sanctions américaines

"Dans le quartier, les hôpitaux publics ont des capacités limitées, explique le directeur de l’hôpital St Georges, le Dr Hassan Oleik. Nous sommes le seul établissement privé consacré à 100% au Covid.»

Mais son établissement, estampillé Hezbollah, est aussi dans le dans le collimateur des sanctions américaines. "Malheureusement, on nous impose une guerre, ajoute le Dr Hassan Oleik. On nous interdit tout transfert bancaire ce qui complique notre administration et nos achats. Mais on a su contourner l’embargo. On est habitué. Comme le dit cheikh Nasrallah, ce n’est pas le Hezbollah qui est le plus touché par les sanctions."

L'hôpital Saint-Georges, de Haddath
L'hôpital Saint-Georges, de Haddath
© Radio France - Christian Chesnot

Dans la crise actuelle, le Hezbollah est accusé d'avoir, lui aussi, précipité la chute du pays car il a participé à de nombreux gouvernements.

Le Hezbollah, le seul parti armé

Fondé avec l'aide de l'Iran lors de l'invasion israélienne de 1982, le mouvement chiite est aujourd'hui le seul parti politique libanais à disposer d'armes lourdes.

Anouar Joumaa, député du Hezbollah de Zahlé, justifie cette exception :

"Pourquoi le Hezbollah ? Parce que les gens au sud ont subi des décennies l’agression israélienne. L’aviation, les chasseurs bombardiers continuent de se promener dans le ciel du Liban. Le Liban est désarmé. On ne peut pas acheter des MIG de la Russie. Les Américains nous l’interdisent. Nous ne pouvons pas nous défendre contre Israël."

Anouar Joumaa, député du Hezbollah de Zahlé
Anouar Joumaa, député du Hezbollah de Zahlé
© Radio France - Christian Chesnot

Pour lui, "la résistance a évolué. On a commencé à prendre l’initiative. Nous ne voulons plus recevoir des coups. Si vous nous bombardez, nous vous lançons des missiles Katiouchas."

Des armes qui faussent le jeu politique

Pour beaucoup au Liban, cette force militaire, qui échappe au contrôle de l'armée, inquiète et fausse le jeu politique. Le Hezbollah fait valoir qu'il n'a jamais dirigé ses armes contre des Libanais.

C’est un argument fallacieux, estime Anthony Samrani du quotidien francophone L'Orient-Jour : "La question n’est pas de savoir s’il utilise ou pas ses armes au Liban. La question, c’est : est-ce qu’il peut s’en servir pour obtenir ce qu’il veut dans les dossiers en cours au Liban."

Anthony Samrani, du quotidien francophone L'Orient-Jour
Anthony Samrani, du quotidien francophone L'Orient-Jour
© Radio France - Christian Chesnot

Face aux pressions qui s’abattent sur lui de toutes parts, le Hezbollah a choisi de faire le dos rond, sûr de sa puissance, car personne aujourd'hui, n'est en mesure de le désarmer.