États-Unis : l'avortement au cœur de la campagne électorale en Géorgie

Aux États-Unis, l'avortement est au cœur de la campagne pour les élections de mi-mandat du 8 novembre 2022
Aux États-Unis, l'avortement est au cœur de la campagne pour les élections de mi-mandat du 8 novembre 2022 ©Radio France - Valérie Cantié
Aux États-Unis, l'avortement est au cœur de la campagne pour les élections de mi-mandat du 8 novembre 2022 ©Radio France - Valérie Cantié
Aux États-Unis, l'avortement est au cœur de la campagne pour les élections de mi-mandat du 8 novembre 2022 ©Radio France - Valérie Cantié
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Joe Biden en a fait la promesse : si les démocrates conservent le Sénat et la chambre des représentants lors des élections de mi-mandat le 8 novembre, la première loi à l’agenda du Congrès garantira le droit à l’avortement, interdit aujourd'hui dans une douzaine d'États,. C'est le cas en Géorgie.

Le sujet de l'avortement est un sujet central pour les élections de mi-mandat du 8 novembre prochain, qui vont renouveler un tiers des sénateurs de Washington, toute la Chambre des représentants et de nombreux gouverneurs. Depuis la décision de la Cour Suprême en juin dernier de ne plus protéger ce droit au niveau fédéral, chaque État peut appliquer sa propre loi. C'est ainsi qu'une douzaine d'États interdisent totalement l'IVG même en cas de viol ou d'inceste. C'est le cas en Géorgie.

Ici à Rome, en Georgie (USA), un restaurant affiche une pancarte "Votez républicain" en soutien notamment "enfants qui ne sont pas nés"
Ici à Rome, en Georgie (USA), un restaurant affiche une pancarte "Votez républicain" en soutien notamment "enfants qui ne sont pas nés"
© Radio France - Valérie Cantié

Après l'annonce en juin de la Cour Suprême des Etats-Unis de révoquer le texte Roe v. Wade qui garantissait le droit à l'IVG, cet État du sud a mis en application une loi locale votée il y a plus de trois ans. Il est désormais interdit d'avorter à plus de six semaines de grossesse. Même en cas de viol et d'inceste (sauf s'il y a eu dépôt de plainte et rapport de la police). Autant dire que l'avortement est interdit.

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Nous sommes à la fête foraine du comté de Floyd, en pleine campagne à 2 h au nord d'Atlanta. Cindy se mobilise pour cette campagne électorale, car le sujet de l'avortement leur tient à cœur. Au milieu du balltrap et des barbe à papa, elle  tient un stand anti avortement avec sa copine Jenny. Ce stand est rempli de prospectus religieux et de mini poupons en plastique sensés représenter des fœtus.

A la fête foraine du comté de Floyd en Géorgie (USA) un stand anti-avortement avec des poupons censés représenter les fœtus
A la fête foraine du comté de Floyd en Géorgie (USA) un stand anti-avortement avec des poupons censés représenter les fœtus
© Radio France - Valérie Cantié

"Ce sont les stades de la grossesse. A 3 mois, ils ressemblent à des bébés, à de vrais bébés qui vont naitre, simplement ils sont plus petits. Et surtout, nous espérons qu'en voyant ce bébé, les jeunes gens réaliseront que presque le lendemain de la conception, ils ressemblent déjà à des petits bébés, qu'ils sont en vie, qu'ils sont réels, et qu'ils ont besoin d'être aimés."

Cindy et Jenny tiennent le stand anti-avortement de la fête foraine du comté de Floyd, en Géorgie (USA)
Cindy et Jenny tiennent le stand anti-avortement de la fête foraine du comté de Floyd, en Géorgie (USA)
© Radio France - Valérie Cantié

On pourrait croire que Cindy est en terrain conquis. Car ici en Géorgie, depuis juillet dernier, pas d'avortement au-delà de six semaines de grossesse. Pourtant, face à elles, les associations de défense du droit à l'avortement redoublent d'efforts elles aussi. Le planning familial et l'association pro-choix Naral investissent 50 millions de dollars dans 9 États-cibles cette année, un record. La plus grosse somme est allée à la Géorgie. Spots de campagne, porte à porte, stands lors d'évènements festifs comme la marche des fiertés d'Atlanta il y a quelques jours.

Alicia Stallworth directrice de campagne en Géorgie pour le mouvement pro-avortement NARAL, à la marche des fiertés d'Atlanta
Alicia Stallworth directrice de campagne en Géorgie pour le mouvement pro-avortement NARAL, à la marche des fiertés d'Atlanta
© Radio France - Valérie Cantié

"A six semaines, la plupart des femmes ne savent même pas qu'elles sont enceintes, donc c'est comme une interdiction totale de l'avortement. C'est pour ça que NARAL s'engage à être de partout, pour parler à tous ceux à qui l'on peut parler, à mobiliser nos plus de 85 000 membres" dit Alicia Stallworth, directrice de campagne du mouvement pro choix Naral en Géorgie.

Mobilisation sur le terrain mais aussi sur le web, en médiatisant des cas devenus emblématiques dans tout le pays, comme celui de Nancy Davis en Louisiane, autre État du sud. Lors d'une conférence de presse, cette mère de famille révèle avoir dû poursuivre sa 2e grossesse cet été alors que son fœtus n'avait qu'une moitié de boite crânienne : "À 10 semaines de grossesse j'ai appris que mon bébé avait une rare anomalie, et qu'il allait mourir peu de temps après sa naissance. On m'a dit qu'il faudrait avorter mais que ce n'était pas possible. En fait, on m'a dit de garder mon bébé, pour ensuite l'enterrer !"

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L'objectif des associations pro-avortement en Géorgie, c'est notamment de faire tomber le gouverneur républicain Brian Kemp, qui a signé la loi des 6 semaines, dans les cartons depuis trois ans, dès que la Cour Suprême a pris sa décision au niveau fédéral cette année. Et il en est très fier : "Ma position au sujet de la vie et de l'avortement, a toujours été très claire. On a voté notre loi définissant la vie au premier battement de cœur il y a plus de trois ans. Nous sommes un État pour lequel toute vie a de l'importance, même si on n'est pas d'accord , certains le sont d'autres pas. En tout cas ne vous y trompez pas : nous avons défendu nos valeurs."

USA : Le gouverneur républicain de Géorgie Brian Kemp, et sa femme Marty, dans la dernière ligne droite de sa campagne pour les élections du 8 novembre 2022
USA : Le gouverneur républicain de Géorgie Brian Kemp, et sa femme Marty, dans la dernière ligne droite de sa campagne pour les élections du 8 novembre 2022
© Radio France - Valérie Cantié

La loi en Géorgie ne fait pas d'exception en cas de viol ou d'inceste, sauf s'il y a eu préalablement dépôt de plainte et  rapport de police. Autant dire jamais. Le combat des femmes favorables à l'avortement est aujourd'hui devenu celui de leurs filles, même de leurs petites filles. De toutes jeunes filles  prennent en effet conscience de la gravité de la situation.

C'est ce qui frappe par exemple dans le défilé de la Marche des fiertés d'Atlanta. Madison, 13 ans, est venue avec ses copines et sa cousine de seulement 8 ans. Elle porte fièrement son badge "légalisez l’avortement dans tout le pays !" : 
"Si on me viole, je ne pourrai pas avorter en cas de grossesse ! moi je ne peux pas m'occuper d'un bébé ! Ca c'est ma cousine et je peux à peine m'occuper d'elle. Je ne sais pas m'occuper d'un enfant, j'aime les enfants mais je dois être plus grande pour en avoir. On doit parler de ces causes là parce que ça nous concerne tous."

Les derniers sondages sont plutôt encourageants pour les défenseurs du droit à l'avortement. Une majorité de Géorgiens se déclare favorable à l'ivg. Mais les associations ont appris depuis le mois de juin que le combat restait fragile.

Un reportage de Valérie Cantié et Hélène Langlois